Multiple-s, le nouveau projet de Salia Sanou

De Salia Sanou, avec Nancy Huston et Germaine Acogny

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Cherchant à décrire des identités plurielles, le projet de Salia Sanou , Multiple-s, présenté au Festival des Francophonies en Limousin, peut paraître simple, voir simpliste au premier abord. Mais en y regardant de près, dans cette négociation permanente, pour dire sa part du monde, part en rien figée, c’est le portrait de l’Homme contemporain que tracent le chorégraphe burkinabé et ses deux complices, l’écrivaine Nancy Huston et la chorégraphe Germaine Acogny. Une véritable conférence dansée tout en illumination.

S’épier avant de se rencontrer

Composée de deux duos, la pièce s’ouvre sur un tête-à-tête entre Salia Sanou et Nancy Huston. Un exercice visiblement pas facile pour l’autrice dont les mouvements, certes justes, manquent quand même de fluidité. Elle danse dans l’ombre de Sanou et lit un texte, écrit par elle, dans lequel elle se revendique femme multiple. Elle égraine des expériences personnelles, des contradictions, des contrariétés subies par le passé dans un monde trop uniforme, trop univoque, trop occidental qui n’entend pas les autres voix. Malheureusement le texte n’a pas la profondeur du propos. Durant toute la scène, les deux protagonistes s’épient, se rapprochent s’apprivoisent peu-à-peu jusqu’à établir enfin un contact pudique : le tanchant du pied, un coup de bassins, puis d’épaule… et fin du premier tableau.

Et Germaine Acogny était soluble dans la lumière.

La scène se vide, l’ambiance change et un miracle s’opère. Germaine Acogny fait son entrée en scène. Elle se tient debout dans un coin, comme si elle voulait reconnaître un chemin avant de l’arpenter. Tout se suspend. Elle amorce le mouvement vers l’avant du plateau, en diagonale. Elle passe entre les deux panneaux de lumière qui constituent avec la plaque circulaire à l’avant-scène, les deux seuls éléments du décor. Et lorsque la lumière converge sur elle, elle disparaît un instant, elle est comme happée par la lumière, avec laquelle elle fait corps. Ce moment de grâce à lui seul a remplit la pièce, cette seule présence a été nécessaire pour transformer un simple spectacle de danse en manifeste. Germaine et Sanou se donnant la réplique. L’une mettant à nue sa multiplicité et l’autre, ne cachant pas son admiration, tente de lui emboiter le pas pour une transmission non verbale, archaïque. Je te laisse mon geste fait de toutes mes vies, semblait dire Acogny, je sais ce qu’il vaut répondait Sanou, aussi heureux qu’un enfant qui réussit à plaire à sa mère.

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