Une entreprise de désacralisation

Entretien d'Olivier Barlet avec Hassan Legzouli à propos de Le Veau d'or

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En sortie en salles en France le 10 décembre 2014, Le Veau d’Or décape par l’humour à la fois la question de l’identité immigrée et celle de la sacralité du roi au Maroc.

Depuis Tenja, huit années ont passé ! Ce n’est pas Woody Allen qui fait un film par an !
Effectivement ! J’ai un rythme un peu lent, et je suis un peu perfectionniste au niveau de l’écriture. J’ai du mal à lâcher un scénario tant que je ne suis pas sûr qu’il soit bon. Et puis j’ai travaillé dans d’autres domaines : j’ai contribué à la création de l’école de cinéma de Marrakech, la formation au scénario Méditalent, et j’ai travaillé sur des scénarios d’autres réalisateurs. Cela tient aussi au fait que j’ai écrit deux scénarios en même temps ; c’est le Veau d’or qui a accroché tout de suite mais l’autre se fera après.
Quelle est jusqu’ici la réaction du public au film ?
Plutôt bonne. Je suis agréablement surpris. C’est un film qui fut très difficile à accoucher : cet accueil chaleureux dans les différents festivals me confirme qu’il fallait se battre pour que le film ne soit pas enterré vivant. J’espère qu’on aura un accueil aussi positif au moment de la sortie en salles.
Que s’est-il passé ?
C’était une situation kafkaïenne. C’est un film majoritairement financé par le Maroc et l’argent y était disponible, sauf que la réglementation marocaine stipule qu’il faut montrer le film fini pour obtenir la quatrième tranche et ma production française disait « donnez-nous l’argent pour qu’on vous montre le film » et la réglementation marocaine répondait « montrez-nous le film pour qu’on verse l’argent ». Cela a traîné ainsi durant un an et demi, jusqu’au jour où le directeur du Centre cinématographie marocain est intervenu pour que la commission fasse une exception. Le labo a fourni une version béta digitale siglée sur laquelle la commission technique s’est prononcée, ce qui a permis de payer le labo. Mais la production française avait toutes les garanties juridiques comme quoi cet argent allait arriver.
C’était donc un problème de coproduction ?
Oui, quand ça marche c’est très bien, mais dans le cas contraire, c’est l’enfer. Le film et le réalisateur sont pris en otage. Par le biais du Centre cinématographique marocain, j’avais un dialogue avec le producteur marocain, mais ça ne fonctionnait pas avec la production française. C’était une question de confiance : les rapports étaient impossibles à remonter. J’avais l’impression qu’on me prenait pour un imbécile.
Cela ne se sent pas au niveau du film !
On a fait en sorte que ça ne se sente pas car il y avait une cohésion totale dans l’équipe artistique C’est un film qui est tourné en 35 mm scope, qui demande de la machinerie. On l’a fait en 5 semaines alors qu’il en aurait fallu 8, mais on avait fait une bonne préparation avec mon chef opérateur, mon assistant et mon décorateur, en faisant le parcours du film, avançant décor par décor en tenant compte de tous les paramètres et en essayant de concilier la volonté artistique avec les contraintes de production. Le plan de travail final donnait ainsi 5 semaines, en travaillant sans filet ! Le risque de rater des trucs était là mais c’était ça ou rien. On a réussi à le faire, à une ou deux fois près. On tourne et on avance : c’est tourné en 35, et on ne voyait donc les rushes que deux jours après, qui montaient à Paris pour développement. J’avais la chance d’avoir un très bon chef opérateur et un très bon assistant : chacun était impliqué totalement, on a collaboré très étroitement. Cette locomotive a drainé toute l’équipe et ça a bien fonctionné.
Il était important de mettre ces difficultés de production en exergue, comme exemple pour le milieu professionnel, souvent confronté à ce genre de problèmes.
Oui, je n’ai pas envie de faire semblant. Il ne s’agit pas que quelqu’un s’attribue un travail dont il ne serait pas le porteur. C’est un film que je dois à mon équipe, non à ma production. Le distributeur amené par la production, était sur le coup dès le départ. Quand le film a été terminé, on a relancé la relation et il était partant en le voyant. Il travaille dur pour avoir un nombre de salles suffisant pour la sortie, c’est un vrai engagement de sa part.
Le Maroc ne faisait qu’appliquer ses règles et n’est en rien dans la difficulté rencontrée ?
Absolument, mais une spécificité du Maroc est de rendre les choses à la fois possibles et impossibles. On vous tend une main tandis que d’autres vous mettent des bâtons dans les rues. La thématique du film ne rendait pas les choses faciles. Le film est financé par le Centre cinématographique marocain : normalement, la télévision devrait abonder, ce qu’elle n’a pas fait, de par le sujet je pense. Quand je cherchais à monter le financement, je suis allé les voir : ils n’ont jamais dit non, mais n’ont jamais dit oui non plus, ils m’ont fait cette réponse typiquement marocaine Makayene mouchkile (Y a pas de problème) ! Jusqu’à ce jour, le film n’est toujours pas acheté par la télé marocaine. J’avais besoin des archives de l’enterrement de Hassan II : je n’ai jamais pu même les consulter. Je voulais avoir ce journaliste qui pleure en annonçant la mort du roi. Heureusement qu’il y avait des archives au Centre cinématographique marocain qui était très ouvert : j’y ai eu accès gratuitement. Les images d’archives qu’on voit dans le film sont issues du CCM sans aucun contrôle sur ce qu’on prend ou pas. Pour le décor du ranch, on nous a interdit de tourner dedans au dernier moment. La gendarmerie royale nous a fait des difficultés sur la scène où des gendarmes apparaissent : il aurait fallu tourner les attitudes que eux voulaient et non moi, notamment sur le rire du gendarme. Ils voulaient carrément me réécrire la scène. Le service de la communication de la gendarmerie royale s’en est mêlé, mettant mon régisseur sous pression, et là encore, le CCM a pris le problème en charge et les a calmés.
Où se situe le problème au fond ?
Ce n’est pas une position officielle de censure ou de rejet, ce sont des intermédiaires qui ont tout simplement peur et se disent « si jamais il y a un problème, ça va me retomber dessus ». C’est pourquoi dans le film mon personnage dit à un moment « à partir du moment où tu as touché à ce fil de fer barbelé, tu nous as foutu dedans ».
Cette peur n’est-elle pas liée à l’époque Hassan II ?
Bien sûr, complètement. Je n’arrive pas avec un discours militant, au contraire, j’humanise Hassan II, je le traite comme un être humain, qui a un pouvoir mais qui reste un être humain. Quand le peuple le pleure, c’est l’image du père qu’il pleure : père spirituel, commandeur des croyants. Toute une génération n’a connu que ça. Même moi, quand j’ai vu l’annonce de la mort du roi, je sentais l’émotion monter : cette personne faisait partie de nous, même s’il n’a pas fait que du bien, en cela il est humain.
Sami est impressionné par le fait que son père se met à pleurer.
Oui, il n’arrive pas à comprendre. Il revient du Maroc, a côtoyé un jeune au Maroc, il s’étonne. La réponse du père résume le film : « donc, tu ne pleureras pas ma mort, moi qui ne t’ai pas fait que du bien ». Cela met le fils dans la même situation schizophrénique que le cousin qui, lorsqu’il entend la nouvelle au milieu de nulle part, sort du camion et ne sait s’il doit rire ou pleurer. On sait ce qu’on perd, on ne sait pas ce que sera le lendemain.
Le film est ainsi une entreprise de désacralisation.
Oui, la volonté est là : rendre plus humain le pouvoir et relativiser la dimension musulmane de la société. Cela me tenait très à cœur. Je suis d’origine berbère, venant d’une région près de Fès où il existait une forte communauté juive. Un jour, on m’a raconté qu’un cirque était passé et qu’une girafe s’était échappée. Et voilà qu’un village s’est entièrement mis à croire au retour de l’ancien dieu : c’était l’histoire du veau d’or. Ce qu’on a essayé de gommer, c’est qu’avant l’arrivée de l’Islam au VIIIème siècle, les Berbères étaient soit juifs, soit animistes, d’autres étaient chrétiens, alors qu’on essaye de nous faire gober qu’on est nés avec l’Islam. En ces temps d’intégrisme où on essaye de nous réduire à cette entité musulmane, il faut rappeler qu’il y a d’autres composantes au Maroc : africaine, berbère, juive. C’est ce millefeuille qui fait ce que nous sommes et qui fait la spécificité d’un pays comme le Maroc.
Le titre est donc à entendre ainsi aussi.
Absolument. C’est un titre qui joue sur les mots : en lien direct à l’histoire du veau d’or qui va rapporter l’argent pour partir, le veau d’or à dimension religieuse et puis le veau royal. Quand dans ce village, le cousin indique au vieux chef que c’est un bœuf du roi et qu’il faut le ramener, le vieux dit : « on va être maudits ». Ce n’est plus la malédiction religieuse, et effectivement, l’autorité débarque chez eux. C’est un sage qui sait regarder la réalité en face.
Cela donne au personnage de Sami un côté encore plus transgressif : il ne rentre dans aucun système.
Oui, c’est le propre de ces jeunes nés en France, qui sont non dans un rejet mais dans une crispation. Il leur faut passer par une initiation, un thème qui était déjà dans Tenja. Ce gamin au début ne rêve que de récupérer son passeport français, retrouver son amoureuse et pouvoir encore dire merde à son père. Mais une fois de retour, le café cassé lui manque. Il est devenu des deux côtés. Quand on a goûté à autre chose, on a rencontré des hommes et des femmes : cela crée des liens. Le rapport à la différence n’est pas handicapant. On est composé de plusieurs couches qui s’additionnent pour donner le goût final. On n’est pas entre deux sociétés, mais sur deux appuis. Le personnage de Sami est désinhibé au Maroc, il ne se gêne pas, alors que le cousin a un flic dans la tête. Ce couple des deux cousins permet de faire en sorte que chacun libère l’autre. Le cousin marocain l’aide à retourner en France et le cousin français aide son homologue à se libérer des grilles qu’il a dans la tête. Je crois beaucoup à l’inconscient au cinéma.
Sami est agaçant par sa personnalité mais aussi par sa double appartenance, ce dont on ne sait pas trop quoi faire et qu’on vit mal.
Absolument ! Ce serait trop beau si c’était facile. Il se définit comme français et n’a rien demandé à personne. Il est dans cette résistance, ce rejet et en prend plein la gueule aussi : c’est dans cette confrontation que se construisent les liens. Dans Tenja aussi, le personnage rencontre des hommes et des femmes qui l’éclairent : il intègre l’idée qu’il peut être d’ailleurs. D’où la réconciliation avec le père sans avoir besoin d’y mettre des mots. La pudeur des Berbères ne passe pas par les mots.
Ce couple Louis de Funès / Bourvil, puisqu’on est dans le couple de la comédie, rebondit sur un autre couple tout aussi drôle, celui des policiers, qui s’agacent également l’un l’autre, comme un miroir de l’autre couple. Le scénario semble construit sur ce jeu de miroir des deux duos.
Oui. Le couple des policiers rejoue d’une part le pur produit de la bureaucratie marocaine et d’autre part ce qu’on appelait au Maroc les Awacs : une politique forgée par le ministre de l’intérieur de Hassan II, grâce à laquelle on embauchait de vrai-faux étudiants, dotés d’une bourse confortable pour faire leurs études et faire ainsi de l’entrisme en milieu universitaire. Ils y étaient l’œil du ministère de l’Intérieur. Mais ils avaient les moyens et faisaient des études : ils sortaient diplômés, et ont tous fini cadres au ministère de l’Intérieur, commissaires ou policiers. Ces flics ont verrouillé l’université où la gauche marocaine était très présente. Le mouvement fut cassé ainsi et grâce à l’encouragement des Islamistes. Dans le film, l’un est paternaliste et l’autre rejette ce paternalisme, l’un est mû par ses certitudes et l’autre par ses ambitions avec des dents qui rayent le parquet. Cela ne fait jamais bon ménage !
Ils ont une discussion très intéressante sur le crime et le délit !
Oui, c’est le côté absurde de cette histoire. On parle de la personne du roi. L’un est complètement dans le sacré et l’obéissance aux ordres. L’autre est jeune et ramène sa fraise. C’est la confrontation des discours de la pseudo-modernité et des discours obscurs. On nous a tellement bassinés avec cette dichotomie qu’Hassan II entretenait en disant que le Maroc avait un pied dans la tradition et l’autre dans la modernité. Mais il se servait de l’un pour contrebalancer l’autre. Quand il voyait que la modernité peut entraîner vers la démocratie et la liberté, il ramenait la tradition. Quand il voyait que la tradition pouvait mener à l’extrémisme religieux, il ramenait vers la modernité. Même maintenant, une classe supérieure marocaine entretient cette schizophrénie : modernes avec des comportements extrêmement conservateurs. Des médecins qui demandent à leur femme de porter le voile… La tradition contrebalance le fait de rentrer dans une vraie modernité.
Comment les Marocains réagissent-ils ?
Cela les met mal à l’aise. Cela nous met face à nos contradictions, pas forcément en valeur. D’ailleurs, après le festival de Tanger, plus aucun festival marocain ne m’a contacté en dehors d’Agadir qui travaille sur les thématiques de l’immigration.
Le roi reste un sujet très délicat.
C’est cette façon décomplexée d’en parler qui gêne. Il y a un proverbe marocain qui dit de laisser de côté ce qui peut te nuire. La façon dont est abordée la photo du roi comme quelqu’un qui boit du thé n’est pas anodine pour un spectateur marocain. Quand on a déposé le scénario à la commission marocaine, tout y était : je ne voulais pas jouer à cache-cache. Je me disais : s’ils nous financent, ils assument. La seule chose sur laquelle j’ai cédé, c’est sur le titre original qui était Crime de lèse-majesté. Mon producteur m’a dit que personne ne lirait le scénario avec un titre pareil… il a proposé Le Veau d’or, que je trouvais plus large et englobe toutes les strates de sens du film.
Tous ces déplacements, les plans larges sur les paysages, l’ambiance générale jusqu’à l’arrivée au ranch qui confirme le tout : on a l’impression que tu voulais mettre une atmosphère de western dans le film.
Absolument ! Pour chaque film j’essaye de trouver une référence qui me serve de point de repère. Ce n’est pas une révérence. Je suis un grand fan des westerns spaghettis et Sergio Leone a été très important pour moi, un vrai plaisir de cinéma : cet étirement de l’espace, ce découpage aberrant, ces positions de caméra abracadabrantes… Quand j’étais adolescent, on a regardé beaucoup de ces westerns dans les cinémas de quartier au Maroc. Ce sont des films qu’on aimait beaucoup : le décor nous rappelait le Moyen Atlas dont on venait. Il y a du Le Bon, la brute et le truand dans Le Veau d’or : des bons, des brutes, des trafiquants, des truands, etc. Le choix du scope y fait également référence, de même que de nombreux éléments de mise en scène, des clins d’œil mais sans être dans la citation. Par exemple pour le nom du ranch, River Law devient Oued Laou, qui existe effectivement au Maroc.
Un petit hommage à Mohammed Majd : le film a été tourné avant sa disparition. Il y développe une extraordinaire présence comme à son habitude ! Comment cela a-t-il été de tourner avec lui ?
Il jouait déjà le rôle du père dans Tenja. Dans Le Veau d’or, le rôle a été écrit pour lui. Il avait une gueule magnifique, de western, le visage marqué, la peau tannée. On pourrait l’imaginer chez Sergio Leone, ou chez Sam Peckinpah dans Apportez-moi la tête d’Alfredo Garcia. Majd était un minimaliste : il n’avait pas besoin d’en faire davantage pour être présent. Il avait ce regard du père marocain dans ce qu’il peut avoir de sagesse et de pudeur, de retenue. C’était un bonheur de travailler avec lui : on n’a pas eu besoin de parler beaucoup pour poser le rôle. Nous tournions dans des conditions difficiles et il avait une magnifique patience, malgré le fait qu’il était malade et fatigué. C’est une grande perte pour le cinéma marocain. Les comédiens sont façonnés par le théâtre et la télévision : ils sont sur un mode très expressif, surjoué, avec une langue très déclamée. Il fallait toujours leur demander de diminuer pour arriver à la justesse. Majd l’avait tout de suite. Ce fut son dernier film de cinéma.
Le veau est un acteur en soi, pesant et présent !
Je voulais au départ tourner avec les bœufs du ranch royal. Etant en semi-liberté, ils étaient très craintifs. Les responsables du cheptel royal nous ont proposés, parmi les quelque 5000 têtes, quelques-uns qui étaient presque domptés, qui venaient manger dans les mains. Puis ils nous ont dit non, ayant peur de complications. C’était dommage car on aurait pu faire une mise en scène avec des milliers de bêtes sur le bas de la route ! Il était dès lors très difficile de trouver la bonne bête ! Ce n’est pas un élevage très courant au Maroc. Je suis finalement tombé sur celui du film, qui était très doux. Son défaut était de ne pas avoir de cornes ! On a continué à chercher sans trouver. Le chef décorateur a donc essayé de lui mettre des cornes avec de la colle. Et le veau ne réagissait pas ! Il était très réactif : il tournait la tête vers la personne qui parlait, mais il a parfaitement supporté les cornes ! Par contre, il était opérationnel vingt minutes sous la chaleur, puis il s’avachissait complètement. Il fallait lui donner de l’eau, lui laisser faire une pause. Pour la scène du marché, c’était l’enfer car on a tourné dans un vrai marché qui ferme à 14 heures De plus, les deux comédiens principaux avaient une peur bleue de l’animal, le considérant comme un taureau. On a joué en juin-juillet, en pleine chaleur : les bêtes peuvent s’énerver !
Et comment l’avez-vous géré ?
Un monsieur s’occupait du bœuf : une relation s’est créée et il lui mangeait dans la main. Ensuite, pour le transporter, c’était de la logistique. La bétaillère était un personnage à part entière dans le film et il ne pouvait y rester. Il vivait dans une autre. Il fallait suggérer la présence de la bête mais pas la montrer en permanence, sinon on tombait dans le côté gaguesque de La Vache et le prisonnier. Le son et la mise en scène faisaient le reste.

Cf. la critique du film : [critique n°12615]///Article N° : 12611

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