Petit portrait de Média Tropical, une radio à vocation communautaire, qui tente avec un égal succès de parler à tout le monde. Ou comment la diaspora d’Outre-Mer déclame son ouverture, tout en revendiquant ses racines.
Considérée comme une radio communautaire à vocation généraliste, un peu comme ses surs (Beur FM et Espace FM), Média Tropical est née en 92 sur un capital de 2 millions de francs dans un seul et unique but au départ : servir de » cordon ombilical « entre les 2 millions de Français d’Outre-Mer installés en Métropole et leurs parents restés au pays. Plus de 800 000 parmi eux vivent en Ile-de-France et l’écoutent religieusement. En famille ou sur le chemin du travail, » tous nous écoutent au moins un moment dans la journée « . Alice Catoire, directrice de l’information, est catégorique sur la question : » Selon un sondage réalisé par Médiamétrie, nous sommes la radio qui enregistre le temps d’écoute le plus long par auditeur « . La moyenne d’âge de cet auditoire est de 25/35 ans. Elle correspond à un besoin.
Les premières générations venues en France ont pris leur retraite et sont rentrées. Leurs enfants ou leurs petits-enfants sont nés ici et ne cultivent guère » le mythe du retour « . D’autres jeunes débarquent pour des études ou pour des raisons professionnelles. Des couples de plus en plus mixtes se forment tous les jours. Tous souhaitent garder le contact, les uns pour exorciser leurs angoisses identitaires, les autres pour ne pas succomber au poids de la nostalgie grandissante. Avec Média Tropical, le pays semble proche. En créole ou en français, les émissions de la station font la part belle à l’actualité des différents départements et territoires d’Outre-Mer. Des correspondants sur place la relaient, avec des analyses pertinentes que peu de personne trouveront sur une radio généraliste à vocation nationale sur la France. » Elle nous laisse en plus nous exprimer, nous, les auditeurs sur les ondes, en établissant un dialogue sonore avec le pays. Elle crée de la proximité entre là-bas et ici « raconte une auditrice.
Média Tropical bien sûr pourrait jouer la carte du communautaire jusqu’au bout. Mais elle se refuse à contribuer au sentiment de ghettoïsation ambiant. Elle rivalise donc d’ingéniosité pour satisfaire à l’image d’ouverture qu’elle se taille désormais auprès des autres communautés, tout en respectant sa mission première. Environ 100/150 000 métropolitains ( » pour ne pas dire des Gaulois « ) lui prête une attention soignée, soit à cause de sa programmation musicale, soit à cause de la manière dont elle traite l’information (dans laquelle on trouve à la fois l’Outre-Mer, la France et l’International). Certains se sont raccrochés à la fréquence de la radio (92.6 FM), parce que des amis antillais ou réunionnais les y ont poussé. Les émissions ont dès lors commencé à devenir un peu plus éclectiques. En 96, il paraît que le Figaro la considérait parmi les 20 premières radios généralistes de l’Hexagone. C’est dire
Depuis, elle n’a pas arrêté son ascension : elle est montée sur le satellite pour diffuser dans toute l’Europe, s’est attaquée à l’Afrique, à Maurice dans l’Océan Indien.
Sa programmation parle beaucoup de la culture d’Outre-Mer, créole surtout, mais laisse la porte ouverte aux autres francophones. De France et d’ailleurs. Pour mieux asseoir sa mission, elle co-produit du théâtre, défend le cinéma, octroie des prix littéraires, organise un rendez-vous culturel et sportif annuel, où l’on retrouve à chaque fois une cinquantaine d’artistes et de stars venant des pays concernés (le prochain aura lieu les 17 et 18 juillet au Parc de la Courneuve en région parisienne). L’an dernier, elle conduisait avec fierté les cortèges, noirs de monde, qui commémoraient les 150 ans années d’abolition de l’esclavage dans les rues de Paris Et dire que c’est une petite équipe d’une quarantaine de personnes qui en est le moteur
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