En exergue de ce cinquième album en dix ans de carrière, l’ébouriffant chanteur-pianiste anglais Jamie Cullum présente ainsi Mina Agossi : « l’écouter, c’est comme foncer en moto à travers Paris : cahoteux, palpitant, magnifique mais dangereux
ne vous attendez pas à vous en sortir indemne ! »
Paris n’est pourtant qu’une étape pour cette franco-béninoise, qui a grandi entre la province française, la Côte d’Ivoire et le Niger, se sent aujourd’hui très attirée par Londres, et vient d’enregistrer cet album pour un label anglais dans un club new-yorkais, le Jazz Standard.
La moitié des titres sont d’ailleurs des standards du jazz. Elle les trafique sans les trahir, elle les traite comme une matière plastique qu’elle triture avec son outil vocal assez exceptionnel. Car plus qu’une chanteuse, Mina Agossi est une musicienne qui use de sa voix comme d’un instrument, ou plutôt comme de tous les instruments.
Sa façon décapante d’improviser en onomatopées très loin du scat traditionnel des jazzmen lui offre l’audace de revisiter de façon convaincante des classiques marqués par les plus grands, comme » It’s Alright With Me » (Armstrong & Ella Fitzgerald) ou » The Very Thought of You » (Nat King Cole, Billie Holiday, Chet Baker).
Casse-cou jusqu’au bout, elle a pris l’habitude, dans chacun de ses albums, d’interpréter un thème de Jimi Hendrix : ici » Spanish Castle Magic « , où sa voix nue parvient à restituer les effets » larsen » et » wah wah » du génie de Seattle. Au delà de ces pures performances, » Who Wants Love ? » est un beau moment d’improvisation collective. A son nouveau trio (avec Éric Jacot, contrebasse et le turbulent Ichiro Onoe à la batterie) viennent se frotter la trompette expressionniste de Rob Henke et la percussion très colorée de Daoud David Williams.
Se considérant comme » nomade de naissance » plus que » métisse « , Mina Agossi se garde bien de s’appesantir sur ses origines africaines. Cette référence n’apparaît que par transparence dans ses propres compositions, comme » Aloe » (chanté dans une langue africaine imaginaire), » You Came Back » ou » Pause « .
Prochains concerts le 29/06 à Montréal, le 2/07 à Toronto, le 13/07 à Bayonne et le 31/07 à Crest (26).
Who Wants Love ?, de Mina Agossi (Candid)///Article N° : 6651