Fiche Disque
Musique
ALBUM 2005
Identidade
Mohamed Damak
Genre : Album
Date de sortie : 31 Janvier 2005

Français

Profonde comme la terre qu’elle évoque, la pensée de Jorge Humberto surgit du silence dessentiments intimes et des inquiétudes troublantes pour rayonner dans les langueurs d’une moma ou dans les motifs enjoués d’une coladera. « ldentidade » suit le fil de cette pensée à travers une série de tableaux cohérents et nous raconte une histoire de réveil des consciences et de paix qu’on aurait pu également appeler « Résistance ». Devant la menace d’une mono-culture destructrice et envahissante, le barde de Mindelo indique à ses compatriotes les valeurs d’une identité égarée dans les brouillards de la mémoire.Fasciné par le mystère de la création, il tourne le regard vers les deux figures emblématiques quesont la Terre nourricière et la Femme génitrice, ici réunies dans l’image de la mère féconde, ~ nouvelle Marie symbolisant le futur de l’humanité.Cantique au pays natal et à la fois hommage à la femme capverdienne, cet album témoigne aussid’une quête de bonheur où le destin de l’individu se réconcilie avec le sort d’une humanité finalement libre de perpétuer en paix le miracle de la vie. Avec un langage tantôt hermétique, tantôt extraverti, toujours éclairé par un lyrisme exacerbé par les expressions imagées du créole, Jorge Humberto rend à la musique traditionnelle des îles du Cap-Vert une intensité philosophique et une inspiration littéraire qui ne sont pas sans rappeler les fastes de la « Claridade ».

Chansons :

(1) « Novo Olharlt (ItNouveau regard ») Il faut affronter le temps qui vient avec un nouveau regard. Même si les gens ont perdu confiance en l’avenir, ils doivent trouver la force de se mettre à la recherche d’un monde meilleur. »Malgré les souffrances à endurer sur le chemin, l’aurore du nouveau jour viendra et la mer ne me pleurera plus, ni la sodade me tuera ». Prologue de l’ouvrage, cette chanson pleine de métaphores est un appel à l’humanité et aux Capverdiens en particulier, pour qu’ils préparent l’avenir avec les certitudes héritées de leur passé.
(2) « Ondas de Canal » (ItLes ondes du canal ») « Sant’ Anton, vallée de ma terre, donne-moi encore des enfants comme Cordas do sol »… Avec ses montagnes verdoyantes et ses plantations de canne à sucre, l’île de Sant’ Anton est le grenier de la plus célèbre île, Sao Vicente, laquelle est séparée par un petit bras de mer, la « Mar de Canal « . Riche aussi d’une culture musicale aux influences disparates, dont les racines sont aujourd’hui mises en valeurs par des formations comme Cordas do sol, Sant’ Anton symbolise la terre nourricière. La proximité et les échanges entre ces deux îles, ont engendré au fil du temps, une population d’une même famille. « En deux minutes,je pars,je reviens, saute, saute cette vallée ». Par les images poétiques de cette « vallée de la vie », avec les pulsations fébriles du rythme de la San Jon en toile de fond, Jorge Humberto précise l’urgence d’un nouveau regard beaucoup plus profond sur la terre créatrice.
(3) ItPidrinha de Soncente » (« Le petit caillou de Sao Vicente ») A travers l’ode tendre à l’île natale de Sao Vicente, comparée à « une minuscule pierre de cristal qui roule de rocher en rocher dans les petites vallées sans eau ». Parce que toute notre eau douce va à la mer ». Le musicien approfondi le thème de la terre comme pilier de l’identité insulaire capverdienne à laquelle il faut revenir « Lèvetoi, petite pierre de Sêio Vicente! Partout où tu apparais dans le monde, tu chercheras toujours ton image. Tu es le phare qui fait briller la lumière de notre pays sur la terre entière ».
(4) « llha’Nha Cêu » (L’île, mon ciel ») Par un fulgurant tournant de la pensée, l’esprit visionnaire de l’auteur-compositeur établit l’allégorie analogique de la Terre et de la Femme comme horizon de l’humanité. La femme capverdienne surgit des mélodies nostalgiques de la morna telle la nouvelle Marie auréolée par la grâce de la création »Ma terre, mon paradis que Dieu m’a donné / ma poésie, mon enchantement, je t’offre tout ô nouvelle Marie ».
(5) « Cêbafame » (ItCouve-moilt) Sur un rythme de mazurka, l’artiste s’adresse à la Terre nourricière et à la Femme génitrice. « Reines de mon inspiration »… Elles l’orientent, lui indiquent le chemin dans sa quête de bonheur. Perdu dans le mal d’amour, il leurs demande un petit signe pour pouvoir les rencontrer et se faire couvrir d’amour. La veine spirituelle se nuance, ou si l’on veut se complète, dans l’émergence de la figure féminine que tout homme convoite pour affronter en couple les difficultés de l’existence.
(6) « Na Miléne d’Oje » (« Dans le millénium ») Entre ironie et rigueur subtiles, cette chanson est une mise en garde à la société capverdienne pour qu’elle soit plus sincère. Sorte de reproche adressé d’une manière délicate mais ferme et plein de sous-entendus, cette coladera lente sert également à rappeler les malheurs de l’humanité des millénaires passés, où en étions nous? « Tu n’avais pas compris que ma vie était ainsi, mais figures-toi que c’est bien sur cette planète que je vivais ». Un texte à saisir à plusieurs degrés, qui préfigure peut être de l’avènement de ce millénuim qui ne laissera plus les hommes dans la souffrance.
(7) « Flôr de Rotcha Nu » (« Fleur des rochers nus ») Lyrique, pétri de romantisme et prenant les tons de la joute amoureuse, « F!ôr de rotcha nu » développe les thèmes de l’ironie et de la mise en garde du texte précédent. Le musicien invite sa compagne idéale, dont le profil capverdien est ici accentué, à lui prêter une attention majeure, et ne plus se perdre dans les lendemains de surenchères. « La propagande qui envahie le coeur des gens s ».Puis, il se perd dans les soupirs passionnés « Lafleur de ton parfum a besoin d’un jardinier et tu pourras rêver dans mon jardin ».
(8) « Tema Boné » (« La blague ») Le contenu du texte s’inscrit ici d’une façon plus explicite dans la critique sociale avec des références évidentes au quotidien capverdien. L’auteur invite ses compatriotes à être plus sérieux. avec le temps utile. Agacé par la superficialité ambiante qui pousse les gens à blaguer tout le temps, sinon à nous détourner de nos objectifs. TI lance son avertissement « On ne peut pas dire n’importe quoi, le mensonge n’a jamais aidé les enfants à grandir « .
(9) « Tai Blues » (« Alors, j’ai le blues… « ) « … Si tu savais l’amour que j’ai pour toi dans mon pays.. Tu es ma mesure pour moi, ni blanche, ni noire ». Jorge Humberto revient ici à son sujet de prédilection. Son lyrisme luxuriant s’impose dans un chant de louanges à la femme capverdienne. Cet être à la beauté resplendissante, créature qui se confond, dans les mots imagés du texte, avec la terre natale et à la fois avec la femme plus en général « blues qui existe dans mon pays », (10) « Lindinha » (« Beauté ») Après autant d’idéalisations et de rêves, le moment de la rencontre est arrivé. La femme capverdienne est là, à côté du troubadour qui en contempl e abasourdi la beauté. Irrigué par la bonne humeur ( »Le jour où je t’ai rencontré, j’aurais dû faire une conférence de presse avec mes compatriotes / une grande assemblée créole pour parler de ton charme devant la foule’1, le texte laisse néanmoins le suspens du départ imprévu de la belle, ce qui ne décourage pas pour autant son soupirant.
(11) « Força de Natureza » (« Force de la nature »)  » Si tu trouves en moi un pèlerin, Si ta vie n’a pas de destin, Reviens croiser mon chemin « ,.. Ainsi, tellement fasciné par la grâce de la jolie capverdi€jnne et également surpris par sa disparition impromptue, l’artiste adresse une complainte à son violon pour qu’il sache que l’éloignement de l’objet de sa passion pourrait lui être fatal.
(12) « Justo e racional » (« Juste et rationnel »)  » J’ai besoin que tu m’apportes la paix, Tu n’es pas ma propagande, Tu es toute ma référence… » L’élan de l’amoureux s’apaise dans la réflexion et brosse le portrait plus classique de son quérécheu. « Juste et rationel », il est le confident privilégié qu’il n’aurait jamais cru pouvoir rencontrer.  » L’orsque tu reviendras, n’oublies pas ma guitare et confies lui un peu de ma vie « .
(13) « Majumpintor » (« Encore un peintre ») Débordante de lyrisme, « Majumpintor » est consacrée à l’amour de la « Morabeza »de son peuple. Le musicien se fait peintre pour « dessiner la mélodie des mots » de la « caboverdianidade » avec les vieilles cordes d’un violon fatigué. Dans un style animé par une langueur touchante, Jorge Humberto livre, à l’expressionnisme vif de la poésie et de la musique, les images de la relation d’un nouveau poète à son peuple.  » Seule la morna aussi sait que c’est toi et moi ».
(14) « Resultôd » (« Résultat ») Si l’on pouvait résumer avec une chanson l’aspect intimiste véhiculé par les traditions musicales du Cap- Vert, on devrait choisir « ResultOd ». Epilogue poignant de la trame musicale et de la pensée de l’auteur, cette dernière chanson traite de l’amour de la terre, du métissage représenté à travers la femme capverdienne, et le blues qui en découle. Cet amour est aussi le résultat concret d’une démarche existentielle qui ne saura pas se limiter au lyrisme, ni à la spéculation philosophique. La musique seule est appelée à en témoigner…
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