Cela faisait un moment que les adorateurs du « Daara J Family » pressentaient cette éclosion. Faada Freddy, guitariste, chanteur, rappeur polyglotte du groupe, est l’un des meilleurs talents vocaux du Sénégal. Avec son « Gospel Journey » sa voix Soul a enfin trouvé un parfait écrin.
Grand, le visage ouvert et serein, le chapeau de crooner dissimulant à peine de longues dreadlocks, Faada Freddy (Faada pour son grain de folie) fait partie de ces artistes accessibles à tous niveaux. Avec son groupe de rap mythique Daara J, il a arpenté le globe, perpétuellement en tournée, entre Las Vegas, Dakar et Paris où il enchaîne les concerts. Beau parcours pour cet enfant du quartier modeste des Allées du Centenaire, à Dakar, qui fabriquait ses guitares avec des boîtes de conserve. Le jeune Faada a trouvé avec la musique « une manière de sortir de sa timidité », dit-il. « Je suis un drogué de la musique. Ça coule dans mes veines. C’est pour moi une manière de respirer. La vie sans musique est une erreur. »
S’il joue bien de la guitare, sur scène, avec Daara J, l’instrument de prédilection de cet enfant du rap n’est autre que sa voix. Il fallait un projet novateur pour porter cette voix vers les limbes : le « Gospel Journey. » : « C’est une initiative qui dormait en moi. Je l’ai réveillée grâce au producteur : Malik N’Diaye. Il est venu me voir, avec mon complice du groupe, N’Dongo D, pour me demander de signer sur son label Think Zik ! (1) J’ai pu utiliser toutes mes folies emmagasinées dans les coulisses, avant les concerts, ou tout simplement les délires sur scène, que je ne pouvais pas exploiter, dans le cadre de Daara J. »
Mais Faada ne se contente pas de recycler des morceaux inédits. Il s’est fixé un ambitieux challenge : faire un album sans aucun instrument de musique. « J’ai toujours été persuadé que le meilleur instrument jamais créé est la voix de l’Homme. Je me sers de la technique du « body percussion » : la percussion du corps, les claquements de doigts : « snap » ; le beat boxing, le « voicing » avec des voix qui reprennent les parties de basse, piano
Côté vocal, Faada a su s’entourer : Imany, le chanteur sénégalais Wasis Diop et une Londonienne qui monte : Sherika Sherard. Comme il n’a pas froid aux yeux, Faada a placé la barre très haut : « Je pousse mon potentiel vocal le plus loin possible, à l’image des explorations de Bobby Mc Ferrin. » Ses mélopées pop soul, gospel, vont puiser aussi bien dans la musique noire américaine que dans son Afrique natale : « C’est comme si je prenais Aretha Franklin, Billie Holiday et que je les faisais chanter avec le groupe vocal d’Afrique du Sud : Ladysmith Black Mambazo. Quoi qu’il en soit je suis africain, je viens du Sénégal et j’ai des racines soul, negro spiritual
Qui dit negro spiritual dit spiritualité : « Dès qu’on parle de voix, de chant, on parle d’esprit. La musique est le reflet de l’âme en mélodie. J’essaie de faire ressentir les bonnes vibrations que peut procurer la musique au monde entier. »
Que le public sénégalais se rassure, si le message est universel l’enfant du pays n’oublie pas d’où il vient : « Le wolof est une très belle langue, poétique et philosophique. J’ai envie de faire découvrir ma langue natale à travers ma musique ». Sur un titre, il fait une reprise de Wasis Diop : « Let it go ». « Dans ce morceau on peut entendre la manière un peu griotte de chanter au Sénégal, avec en invité Yves, un chanteur qui a participé à l’Opéra du Sahel. C’est un titre qui en surprendra plus d’un ! » Faada a également un il attentif vers la jeunesse, mise à l’honneur sur plusieurs titres avec la chorale Clé de sol à Dakar : « J’ai remarqué qu’il y a énormément de talent, de groupes, de « choirs » qui font du Gospel. J’ai fait appel à des jeunes d’une moyenne d’âge de seize ans, pour m’accompagner sur « In time » et dans « Borom bi ». C’est une reprise de « Daara J », que j’ai poli à ma manière, une façon de rendre hommage à mon groupe et d’apporter ma propre touche. ». Une manière d’encourager la jeunesse et de se tourner vers l’avenir : « Je suis dans une dynamique pour pousser les jeunes à s’investir dans la musique. C’est pourquoi j’essaie d’apporter ma pierre en permettant à ces jeunes de chanter dans un album international. » Car le « Daara J », l’école de la vie en wolof, c’est aussi un peu une école de musique
1. Label qui a révélé les chanteuses Ayo Grace et Imany.En concert avec Imany et Sherika Sherard le 12 avril à la Bellevilloise, Paris///Article N° : 11443