Depuis 20 ans, la Maison des Cultures du Monde s’efforce de faire découvrir les cultures des peuples du monde avec une prédilection pour les cultures les plus rares et les moins connues. Si la sixième édition du Festival de l’Imaginaire a mis l’accent, dans un contexte international bouleversé, sur les cultures menacées de l’Asie Centrale (tchétchène, ouïgours, afghane), la programmation a fait la part belle à l’Afrique.
Sur le fil conducteur de » Tradition et création « , la création africaine contemporaine était représentée à travers les arts plastiques. Qu’il s’agisse des sculptures de Mamady Seydi ou des photographies » L’écrit dans la rue « , les expositions présentées à la galerie Cargo ont montré la vitalité d’une expression africaine en prise avec le monde d’aujourd’hui.
Côté musique, le Festival de l’Imaginaire a misé sur le traditionnel, évitant ainsi l’écueil de la » world music « .
A travers la musique Ouldémé des monts Mandara du Nord Cameroun, le chant des gens du fleuve Niger interprété par Mamou Thiéro, ou encore le Candomblé de Bahia le public a pu découvrir ainsi de nouvelles dimensions des cultures africaines.
Pari tenu sans conteste en ce qui concerne l’émouvante musique des Ouldémé. On découvre ici la richesse d’une musique qui au gré des saisons et des cycles agraires s’appuie sur une diversité de flûtes et d’instruments exceptionnelle que l’on retrouve rarement en Afrique. Faites d’argile, d’écorce, de roseau ou de bambou, les flûtes se mêlent parfois à la voix des femmes qui surprennent par leur performance. Elles sont en effet capables de jouer de la flûte et de chanter en même temps dans une sorte de hoquet provoquant parfois la transe. Les mélodies, où les chanteurs se questionnent et se répondent, évoluent sur une échelle pentatonique et tonale précise. Binaire, et ternaire, avec une forte prédominance du ternaire issu des musiques traditionnelles de l’Afrique de l’ouest (Sénégal, Guinée
), la musique Ouldémé explore différents champs rythmiques prouvant (si tant qu’une démonstration soit nécessaire) que la musique traditionnelle africaine est aussi riche et » savante » que la musique classique occidentale.
Pari tenu également avec le chant du fleuve Mali servi par la magnifique voix de Mamou Thiéro. Le public est littéralement transporté dans l’univers des pêcheurs maliens avec ses rîtes et ses traditions.
Mission plus délicate en revanche, avec la présentation du Cadomblé du Brésil. Si ce rituel afro-brésilien, à l’image du Vaudou en Haïti, témoigne de la vitalité des rites africains et de la capacité d’adaptation de la culture africaine, la délocalisation d’un rite religieux sur une scène parisienne tombe à plat. Sorti de son contexte culturel, le Cadomblé semble perdre tout son sens. Seule la samba de roda clôture a semblé remuer le public, marquant ainsi les limites de l’ethnoscénologie.
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