Formé par deux anciens du Staff Benda Bilili, le groupe Mbongwana Star renouvelle les sonorités congolaises, avec du punk, de l’afrobeat, du dub et de l’électro depuis Kinshasa. Un groupe porté par deux générations, dont l’énergie évoque la ville et son chaos, où l’invention est règle de vie.
La République démocratique du Congo à ses astronautes. Ils sont rue Kato, à Kinshasa, troisième plus grande ville d’Afrique. Un paysage cosmique, capitale du système D, où l’imagination se veut sans limites. L’album de Mbongwana Star devait se nommer From Kinshasa to the moon Le titre d’intro en garde le souvenir. Des mixages électro plantent un décor hypnotique, basse dub et guitares entourées de chants incantatoires. Deux voix sonnent familières, celles de Coco Ngambali et Theo Nsituvuidi, anciens du Staff Benda Bilili. Mbongwana, comme « changement » en lingala, est en effet né des cendres du fameux Staff. Pas de rumba à l’ancienne sur cet album, seuls les chants et quelques riffs soukouss ramènent à cette histoire. Une autre génération fait son apparition : Jean Claude Kamina Mulodi à guitare, Makana Kalambayi aux percussions et à la batterie, Matuzolele Rodrick au chant. Adepte des nouvelles technologies, à l’écoute des tendances rock et hip-hop, ces jeunes de Kinshasa insufflent un élan avant-gardiste au projet.
Le groupe, assurément, est entré dans ce répertoire baptisé « Afrofuturisme » ou encore « World 3.0 ». Intérêt pour une scène indie rock électro où les amplifications de fortune ouvrent grande les perspectives. Conditions couplées avec des techniques de production occidentale, générant un son saturé pour ambiances noctambules made in Europe. Telle est l’histoire de Konono n°1, de Kasaï Allstars, et enfin celle de Mbongwana Star, dessinée par Liam Farell. Ce producteur irlandais de trip-hop a enregistré l’opus à Kin, dans un studio bricolé, avec des sessions de rue, prises au générateur pour contourner les pannes d’électricité. Un titre comme Suzanna, aux basses très saturées, évoque ces conditions hostiles, dans lesquelles Farell a dû puiser son énergie post-punk. Ce « Docteur L » se retrouve à Kin comme à New-York, dans les années 1980, au milieu de « groupes punk, gay et new wave ». De là à conclure que le Mbongwana Star est à la pointe de la modernité congolaise, il n’y a qu’un pas que le temps seul confirmera. Ce qui est sûr, c’est que les scènes underground anglo-saxonnes et françaises sont aux anges à l’écoute de cet album.
From Kinshasa, de Mbongwana Star, World Circuit Records.///Article N° : 13060