Après le succès mondial de Handmade, son premier album cousu main, la chanteuse d’ascendance amazighe et touarègue revient avec Homeland, entre racines africaines et échappées latines, chansons d’amour et universalisme. Portrait.
Bien qu’autoproduit, Handmade, son premier album, délicat et nonchalant, publié début 2010 par le mythique label Blue Note, lui a valu le Prix Constantin, puis une Victoire de la musique, des rencontres avec Tinariwen, Najat Aatabou, et des collaborations avec la fine fleur de la nouvelle génération du jazz US (Robert Glasper, José James) ou avec l’icône rock allemande Nina Hagen. Une trajectoire remarquable pour Hindi Zahra, chanteuse d’ascendance amazighe et touarègue, originaire de Khouribga au Maroc, installée à Paris depuis l’adolescence, qui, avec Homeland, signe un retour réussi. Un disque moins intimiste, plus ample, conservant le charme poétique et mélancolique de ses débuts.
Après une tournée épuisante de quelque 400 concerts en 2 ans et demi, la chanteuse est partie se ressourcer à Marrakech, où elle a jeté les premières bases de son nouvel album avec le percussionniste Rhani Krija. Avant de se frotter aux rythmes brésiliens de Ze Luis Nascimento, de partir à Cordoue à la rencontre de musiciens gitans, dont le guitariste Juan Fernandez, ainsi qu’à Cuba, en Egypte et en Jordanie. Sur Homeland, elle chante en anglais, en français, et toujours en Tamazight et Darija. Et sur sa platine, entre ses « classiques », Miriam Makeba, Marvin Gaye, Nina Simone et Cesaria Evora, on retrouve Yasmine Hamdane, Buika, Mehdi Nassouli, des musiques du Nigeria et du Ghana, entre autres influences…
Citoyenne du monde, Zahra ? « Disons que le nomadisme ne m’est pas étranger. Ma vision des frontières est assez floue. Quand on voyage souvent, on se rend compte que l’humanité reste la même un peu partout », confie celle qui, enfant, a suivi son père, militaire, au fil de ses affectations, avant de se construire dans le très cosmopolite Paris du 18ème. Paris où elle donna son premier concert lors d’une fête de la musique à 17 ans. Elle, qui fréquente le monde de la musique depuis toute petite. Dans sa famille, on retrouve des membres du groupe de chanson amazighe Oudaden.
« I feel like a soldier / So close to the moon ». Homeland s’ouvre sur To the Forces, un blues hanté par ses origines touarègues et par la guitare du Nigérien Bombino. Un hommage au peuple des montagnes qu’elle a côtoyé dans le Sud marocain lors de sa composition. « La poésie amazighe fait référence aux éléments. C’est une écriture qui me plaît parce qu’elle est métaphorique. Je voulais amener ces éléments après avoir passé beaucoup de temps dans la nature pendant ces deux ans, avec des mots, mais aussi des ambiances, des textures. Sur cet album j’ai voulu exprimer des choses musicalement, et pas uniquement avec la voix. Il y a des morceaux plus dépouillés où la voix ressort, mais sur To the Forces, The Blues, je voulais qu’elle soit traitée comme un instrument parmi d’autres. »
Au delà, les titres de l’album dévoilent une personnalité cosmopolite, vagabonde, libérée. Any Story, le premier single, évoque « la quête de soi, le destin, ce que nous amène la vie et ce qu’on en fait ». La chanteuse se risque à une chanson d’amour en français aux accents flamenco (Un jour), esquisse un couplet bossa sur Can we dance, évoque « les enfances difficiles et comment on peut se construire à partir de ça », sur Broken ones. Elle parle « d’universalisme » quand elle évoque les titres La Luna ou Cabo Verde. L’anglais reste prépondérant sur le disque, à l’image de son titre, Homeland : « Il n’y a pas de surprise. A part les musiques berbères que je chantais toute petite, j’ai grandi avec la musique anglaise et américaine. C’est dans cette langue que j’ai commencé à écrire et à improviser ».
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