On leur rase la tête et on leur coupe le prépuce : les jeunes circoncis devront passer trois mois dans le djoudjou, la case des circoncis, avant de retrouver leur mère. Mais ils ne seront plus les mêmes : ils auront appris à être homme. Systématiquement frappés et soumis à l’épreuve, ils auront appris l’endurance mais surtout ce qu’est le mal pour pouvoir affronter le monde et lui apporter plus d’humanisme. Comme à son habitude, Malick Sy, ancien journaliste, avance par investigation : il cherche à percer le mystère d’une initiation qui se donne comme secrète alors même que ses préceptes sont ceux de toute éducation. Le rituel ne l’intéresse qu’en ce qu’il révèle des rapports sociaux et du rapport au monde. On lui signifie clairement qu’il se met ainsi en danger : la relation au Kankouran est si forte qu’elle en est corporelle et vitale. Un gendarme racontera les cas où ceux qui voulaient trop savoir ont été trucidés. C’est cette contradiction d’une volonté de transmission qui paradoxalement ne veut pas livrer son secret qui fait tout l’intérêt de ce documentaire très frappant. Tout se passe comme si expliciter l’initiation revenait à la rendre inefficace en lui enlevant sa part de mystère. Comme si dire la chose empêchait d’y croire, donc renier une partie de soi, de son ancrage culturel, de son intégrité sécurisante. Témoignage sur une pratique de marquage communautaire particulièrement intégrante, la circoncision n’étant que la première étape de l’apprentissage d’une obéissance absolue aux normes du groupe, Kankoura dévoile un bastion menacé par la mondialisation : le masque ne pourra protéger contre les mauvais esprits que si le mythe structurant est maintenu. L’enjeu étant bien sûr que cela soit sans entraver l’émancipation de l’individu
52′, 2001, prod. Sysiphe (+32 2 201 05 30, [email protected]).///Article N° : 2441