« La Tunisie, j’y suis, j’y reste : c’est mon pays »

Entretien d'Anne Crémieux avec Paloma Negra

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Paloma Negra est un militant des droits LGBT, basé à Sousse, en Tunisie. Il a activement participé au Printemps arabe et se désole de l’absence de progrès pour la communauté LGBT. Il milite pour changer les mentalités mais aussi la législation, qui condamne l’homosexualité à une peine de prison. Il s’efforce de mettre en place des réseaux de luttes pour les droits des homosexuel/les et des femmes au sein d’associations pour la promotion des droits de l’homme.

Anne Crémieux Quelle est la loi actuelle en Tunisie concernant l’homosexualité ?
Paloma Negra :
Actuellement, l’article 230 du Code pénal tunisien condamne l’homosexualité à trois ans de prison ferme. Historiquement, cet article de loi date de la colonisation française. Auparavant, aucun texte officiel ne condamnait l’homosexualité. Le Code pénal français condamnait la sodomie entre hommes ou avec une femme, pour des raisons religieuses. Après le départ des Français, avec l’indépendance, le Code pénal a été traduit en arabe puis de nouveau traduit en français et c’est alors que le mot « sodomie » a été remplacé par « homosexualité ».
Le Code pénal tunisien ne condamne plus simplement l’acte de sodomie mais bien le comportement homosexuel, ce qui aboutit à ce que j’appelle le délit de faciès. On juge la manière de s’habiller, de marcher, de parler. Dans le passé, d’autres articles étaient invoqués, tel que l’atteinte à la pudeur ou le trouble à l’ordre public, mais actuellement les procès-verbaux indiquent « homosexualité », qualifiée d’un « positif » ou d’un « négatif ».
Tout le monde dit que la loi n’est pas appliquée, mais c’est absolument faux, nous faisons un gros travail de documentation et nous en avons les preuves concrètes. Ça ne date pas du départ de Benali. Ça a commencé en août 2008, avec une grande vague d’arrestations de dizaines de personnes de la communauté LGBT. Les interpellations ont eu lieu dans les cafés, les bars, les bains maures ou les bains turcs, tous les lieux que fréquentait la communauté. Des arrestations arbitraires qui pour la première fois invoquaient comme simple motif l’homosexualité. La précision de l’homosexualité active ou passive est importante car les passifs purgent les peines les plus lourdes tandis que l’actif en sort parfois indemne. Les actifs et les passifs ne sont pas égaux devant la loi, conformément à une certaine culture qui parfois, dans certaines régions, glorifie l’actif, l’homme viril qui se vante d’avoir été avec un homme.
Pour parler de cas concrets, en 2011 un de mes amis proches a été arrêté. Il était allé au commissariat porter plainte pour le vol d’un téléphone portable. La police a interpellé les deux suspects qui l’ont aussitôt accusé d’être un « pédé » qui n’avait que ce qu’il méritait. La police a finalement relâché les voleurs et incarcéré mon ami, accusé d’homosexualité, puis condamné à onze mois de prison ferme. En effet, l’article 230 condamne l’homosexualité à trois ans de prison ferme mais l’article 57 établit que la diffamation n’est pas recevable quand elle concerne la vie privée. C’est ainsi qu’il a été défendu, grâce à un avocat sympathisant de la cause, car nous connaissons des avocats et des juristes susceptibles de nous aider dans des cas pareils. La peine a donc été réduite à onze mois, puis en appel à six mois, dont il a purgé quatre mois avant d’être libéré pour bonne conduite.
Il ne faut donc pas écouter les gens qui disent que la loi n’est pas appliquée, que c’est une loi morte, nous pouvons attester de nombreux cas d’arrestations et de condamnation. Ce qui est vrai, c’est que la loi n’est pas appliquée systématiquement car cela dépend de l’humeur des policiers et des juges qui peuvent être homophobes, neutres ou gay-friendly et dans ce cas, ne pas appliquer la loi.
Est-ce qu’il arrive que des personnes qui ne sont pas homosexuelles se fassent accuser dans des conditions similaires ?
Oui, mais un médecin légiste effectue un « test de virginité », qui pour moi s’assimile à un viol, tout simplement : il examine si la personne est habituée à avoir des rapports anaux ou non.
Quelle est la situation légale pour les lesbiennes ?
La loi incrimine les lesbiennes comme les gays, mais nous n’avons pas connaissance de cas d’arrestation de lesbiennes. On a fait des recherches, il y a des agressions, mais pas d’accusation et pas d’arrestation. Dans la culture arabo-musulmane et tunisienne, la masculinité, même pour une femme, est valorisée. Même s’il peut y avoir de la haine pour les lesbiennes quand elles ont une apparence très masculine. Il y a des agressions verbales et physiques, mais ça reste de l’ordre du privé. Ces derniers temps ça devient de plus en plus flagrant mais au niveau de la loi, il n’y a pas de cas connu de nous.
Comment se manifeste l’homophobie dans la vie de tous les jours ?
L’homophobie, c’est notre pain quotidien. Il y a plusieurs niveaux : la rue, le lieu de travail, l’école, la faculté, la famille. L’homophobie se généralise aujourd’hui en Tunisie. Avant, peut-être par peur, il y avait moins d’agressions. Aujourd’hui, les attaques verbales sont plus fréquentes car il y a plus de liberté, on peut dire ce qu’on pense, et ça passe par des insultes, des injures, des regards, des moqueries. Et ça peut faire très mal. Puis c’est l’escalade, l’agression physique, une bousculade et un regard dénigrant, ou un passage à tabac.
Il y a dix jours, il s’est passé quelque chose de très grave. En boîte, un jeune a été drogué, deux cachets ont été glissés dans son verre, puis il a été pris de force alors qu’il était inconscient. Il a été frappé, tabassé, violé et mutilé. Il avait du sang partout, des déchirures anales et au niveau de la bouche, il est couvert de bleus. Il est dans un état terrible ; on lui assure un suivi psychologique. On l’a mis dans un endroit sûr, mais il est pétrifié. Il ne veut pas porter plainte. Dans un premier temps il faut l’entourer, qu’il se sente en sécurité, puis on verra ce qu’on pourra faire. On lui donne des conseils juridiques et on l’incitera à porter plainte, mais la décision lui revient. On assurera sa défense mais on ne peut pas l’obliger, on comprend que c’est très difficile vis-à-vis de la famille.
Et s’il porte plainte, ça ne risque pas de se retourner contre lui ?
C’est le risque. Au départ je voulais médiatiser l’affaire mais il a peur. D’expérience, on sait qu’on peut gagner. Un des problèmes, c’est que les agresseurs semblent être Libyens. Il sera difficile de les retrouver.
Cette affaire a eu un impact important au sein de la communauté : maintenant, tout le monde se dit « ça aurait pu être moi. » Cette peur se transforme en force, elle donne la volonté et le courage de se mobiliser et de se battre.
En quoi consiste le militantisme LGBT en Tunisie ?
Quand des gens sont menacés, on les cache, on les protège par tous les moyens, parfois on les change de lieu tous les trois ou quatre jours de peur d’être suivis.
Au départ, c’était très informel, sans projet de créer une quelconque association. On était des gens normaux désireux d’aider les gens. On a loué une grande maison pour accueillir les personnes rejetées par leurs familles et rapidement, on a créé une petite « caisse des urgences ».
On entend beaucoup dire qu’il n’y a pas de communauté homosexuelle en Tunisie, ce qui est absurde. On a voulu renforcer l’esprit communautaire en organisant des sorties de convivialité et à partir de 2008, nous avons mené des actions et un travail de diagnostic, de recueil d’informations et d’analyse, pour déterminer les besoins et les traduire en objectifs.
On a voulu créer un groupe LGBT tunisien, mais vu les circonstances actuelles, on a préféré créer une association pour la justice et les droits de l’homme. L’objectif global est de répandre les valeurs universelles des droits de l’homme. On milite pour l’égalité entre tous les citoyens, gays ou autres, et on documente la stigmatisation des minorités.
Est-ce que vous militez au niveau international ?
On travaille surtout au plan régional. La situation est similaire au Maroc, où le Code pénal condamne également l’homosexualité, ou en Algérie où s’ajoute la peur des islamistes, notamment dans l’Est. J’étais en mission en Algérie pour renforcer les capacités d’une association qui lutte contre le sida auprès des MSM (Men having Sex with Men) et dans l’Ouest, à Oran notamment, il y a une certaine liberté, mais dans l’Est c’est terrible, il y a beaucoup d’agressions, couvertes par la loi du silence.
Fin 2010, nous avons créé le groupe Khomsa, un réseau sur le grand Maghreb. C’est un mot et un symbole compris par les Tunisiens, les Algériens, les Marocains, les Libyens et les Mauritaniens. On voulait dire qu’on est ancré sur cette terre, qu’on ne vient pas d’ailleurs. Khomsa, c’est la main de Fatma, qu’on retrouve dans notre logo aux couleurs de l’arc-en-ciel. La main de Fatma n’a pas de signification religieuse directe, même si on l’associe à l’islam. Je respecte tout le monde mais j’ai beaucoup de réserves par rapport à toutes les religions.
Les musulmans tirent toutes les règles de vie de deux sources : le Coran et les hadiths, qui rapportent les paroles du prophète Mahomet, mais dont l’authenticité n’est pas toujours avérée, contrairement au Coran. C’est le cas du seul hadith qui parle d’homosexualité. Un hadith débute toujours par sa généalogie : untel a entendu d’untel qui a entendu d’untel qui a entendu de Mohammed. Or la chaîne du hadith qui condamnerait l’homosexualité est peu fiable car elle n’est pas vérifiable. Quant au texte coranique, il n’est pas explicite. Une seule sourate parle du peuple de Loth à Sodome et Gomorrhe, condamné pour un ensemble d’agissements contraire à la morale de l’époque. Pour moi, ce n’est pas la religion qui est en cause, mais la morale, faite de conventions arbitraires. Les textes sacrés condamnent très fortement la consommation d’alcool ou la sexualité hors mariage, mais ce n’est pas condamné par la loi séculaire. Dans le texte coranique, les villes de Sodome et Gomorrhe sont détruites car y sont pratiqués l’inceste, le viol de visiteurs, et l’attaque de passants pris par la force. Il ne s’agit aucunement de rapports homosexuels entre adultes consentants. Luthi est une insulte courante en arabe, en référence au peuple de Loth, mais le « peuple de Loth », ce n’est pas « les homosexuels ». Dans l’Islam, tout péché donne lieu à une sanction. Cependant pour l’homosexualité, aucun texte n’énonce de sanction. Mahomet a bien dû être consulté sur des cas de pratique homosexuelle, mais aucune réaction n’est rapportée.
Aujourd’hui la loi et les populations sont très dures, sept pays arabo-musulmans, dont l’Arabie Saoudite, l’Iran et le Soudan, condamnent à mort.
Le documentaire sur les homosexuels musulmans, Djihad, au nom de l’amour (Parvez Sharma, 2007), raconte comment deux jeunes garçons ont été pendus en Iran en 2005 sur la place publique. Mais tout n’est pas médiatisé et c’est dangereux d’en parler. Mohammed Talbi le fait dans son ouvrage Plaidoyer pour un Islam moderne. Olfa Youssef, une universitaire hors pair, a défendu l’homosexualité rien qu’en se basant sur le Coran et les hadiths. Elle a écrit Confusion d’une musulmane, Démunies de raison et de religion et Le Coran au risque de la psychanalyse, publiés en français chez Albin Michel.
Est-ce que les homosexuels fuient le Maghreb ?
Beaucoup d’amis du Maroc ou d’Algérie sont maintenant partis en Europe. Même les activistes fuient : une association a été créée en Belgique faute de pouvoir le faire sur place. Sur ma page Facebook où je publie beaucoup, je mets « Gay tunisien, et après ? La Tunisie j’y suis, j’y reste, c’est mon pays ».
Des centaines de personnes partent tous les jours, je les connais, je le sais. Un réseau s’est installé pour aider les gens à partir. Et ce n’est pas sans raison : on a recensé treize meurtres directement liés à l’homosexualité depuis le 14 janvier 2010. Bien sûr les autorités refusent catégoriquement ces accusations, de même que les familles. Il y a eu des descentes très musclées pour menacer toute personne qui évoquerait l’homophobie comme motif. Seuls deux cas de meurtre d’étrangers, un Italien et un Polonais, ont été reconnus par le ministère de l’Intérieur car ils ont été fortement médiatisés à l’international, contre le gré du gouvernement.
Y a-t-il un discours autour de l’homosexualité qui viendrait de l’étranger ?
Oui, en fait, ce n’est pas trop mal vu de coucher avec un étranger, c’est très banal. On entend beaucoup dire que l’homosexualité est un mal qui vient de l’étranger. Cela m’a poussé à faire des recherches historiques ; je prépare une présentation à ce sujet. On trouve dans les récits de voyage tunisiens et arabes anciens une autre vision de l’homosexualité, traité avec respect et une certaine estime. On trouve aussi des documents très négatifs, mais rarement agressifs.
On veut tout simplement montrer que ça existe depuis toujours. Dans l’espace culturel de la vieille ville arabe, les homosexuels avaient leur place, en public comme en privé. De la fin du XVIIIe siècle au début du XXe, la mixité hommes-femmes était très limitée. Lors des fêtes de mariage, les homosexuels jouaient les intermédiaires entre les deux espaces. Considérés « inoffensifs », les hommes les recevaient chez eux, à côté de leur femme qu’aucun autre homme ne devait voir. Il y avait aussi des groupes musicaux d’hommes gays qui comme les aveugles, étaient admis dans l’espace privé féminin. Donc ils avaient un statut, un rôle, certainement assigné car la stigmatisation et la discrimination n’étaient pas absentes, mais ils étaient tolérés, ils avaient leur place.
Certains poètes célèbres étaient homosexuels. Actuellement les gens me demandent souvent, sans animosité, pourquoi le nombre de gays est devenu si important. Je réponds que seule la visibilité a changé : avant, ils se cachaient. On estime qu’entre 10 et 15 % de la population mondiale est homosexuelle. Ça ne va pas bouger, ni menacer l’espèce humaine.
Quels sont vos alliés ?
On essaye de renforcer la communauté pour assurer l’avenir du mouvement. On travaille aussi par lobbying, y compris quand c’est possible avec des leaders religieux. On a des alliés sur le plan politique, mais on ne peut pas compter sur eux en ce moment car même parmi les progressistes, il y a des homophobes qui considèrent que la liberté s’arrête à l’homosexualité. On essaye de travailler avec des personnes influentes.
Que s’est-il passé pour les personnes LGBT pendant le printemps arabe ?
On était dans la rue et on a brandi le drapeau gay avant le départ de Benali, le 12 janvier, alors qu’il est parti le 14.
C’était un grand espoir pour nous, et un grand défi. Un des slogans majeurs du printemps arabe était Travail, liberté et dignité. On avait donc cet espoir de liberté et de dignité. Mais la sentence est tombée, comme dans les autres pays, où c’est plutôt pire : pas de liberté et de dignité pour nous, pas de printemps arabe pour les gays. On était dans la rue pour se battre contre la machine policière, dans les comités de quartiers pour défendre nos familles, nos maisons, puis on nous dit que nous ne sommes pas des citoyens à part entière. C’est ce qu’a dit le ministre des droits de l’homme, Samir Dilou, alors qu’un journaliste lui demandait son avis sur la création du magazine en ligne, Gayday Magazine : « Ils vivent comme des citoyens mais doivent respecter les lignes rouges fixées par notre religion, notre héritage et notre civilisation. »
On s’est mobilisé et notre réaction a eu un impact. La vidéo du ministre a fait le buzz sur Internet, suivi d’une campagne pour qu’il se rétracte, ce qu’il a fini par faire, mais par l’intermédiaire de son porte-parole qui s’est contenté de déclarer que le ministre défendrait les droits de tous les citoyens tunisiens. Le ministre a également parlé de maladie mentale et d’internement. Je lui ai envoyé une lettre ouverte, assez sarcastique, pour lui rappeler que l’OMS a retiré l’homosexualité des maladies mentales en 1990. Selon lui, nous profitons de la révolution pour faire valoir nos droits. Nous lui avons renvoyé un poème très beau qui dit « on aime notre pays comme nul autre » (http://gaydaymagazine.wordpress.com/2012/02/07/536/). Les gens ont peur de ce qu’ils ne connaissent pas. C’est pour ça que j’encourage les gens à faire leur coming out, au moins auprès de leurs amis. Dans les familles c’est plus difficile, mais c’est en connaissant des homosexuels qu’on devient moins homophobe.
Est-ce que vous faites des liens avec la cause des femmes ?
Absolument. C’est un volet très important de notre lutte pour les droits de l’homme. La Tunisie a beau être assez avancée en matière des droits des femmes, il y a de grandes injustices. Notre groupe compte beaucoup de femmes. Et nous avons participé à une grande action de sensibilisation en collèges et lycées contre la violence faite aux femmes. On essaye de faire pression sur les rédacteurs de la constitution pour donner plus de droits aux femmes. Le 17 mai, la journée mondiale contre l’homophobie a donné lieu à plusieurs actions. On a organisé une grande sortie baptisée Let’s occupy the public space. Il faut être là, visibles, même si on se fait agresser. Ceux qui insultent ou tuent les homos veulent créer la terreur, nous écarter de l’espace public et nous reléguer aux marges de la société. Il faut occuper le cœur de l’espace public.
Comme je suis passionné d’histoire et que je connais bien le passé de ma ville, Sousse, j’ai proposé une activité culturelle et citoyenne : une visite guidée de la vieille Medina. On était nombreux et on entendait les gens dire, « c’est la fête nationale des pédés aujourd’hui ou quoi ? » Pour moi, on a marqué des points : « On n’a pas peur, on est là, on existe ».
On a aussi fait des tags en anglais et en arabe sur les murs : Célébration de la journée mondiale contre l’homophobie – Gay and then, be proud of who you areBe together, be happy.
L’an dernier on avait fait une déclaration, une première dans le monde arabe, le Manifeste du 17 mai, et des tags par rapport à l’article 230 du Code pénal, en arabe, « l’article 230 jusqu’à quand ? » On a aussi tenu une réunion de l’association et organisé une séance débat du film américain Milk, de Gus Van Sant.
Toutes les semaines on fait une projection. La semaine dernière on a montré Bobby seul contre tous (Prayers for Bobby). On va montrer le documentaire We Were Here, auquel Aides France a participé. Cela parle de San Francisco dans les années quatre-vingt, lorsque le VIH a disséminé 50 % de la communauté. Mais ça ne sera pas ouvert à tous car on craint des réactions homophobes. Il y aura un débat et une mise au point par rapport à la situation et les défis actuels.
Que dire des films tunisiens qui évoquent l’homosexualité ?
Je suis très critique par rapport aux films tunisiens. Je les connais car je documente toute pièce de théâtre ou film qui évoque la question, même si c’est pour véhiculer des clichés. L’Homme de cendres, par exemple, est un film ancien que je trouve bourré de clichés, mais quand même important. Il y a aussi Baliseurs du désert ou Bedwin Hacker, qui n’a pas été vu par beaucoup de gens. Khochkhach (Fleur d’oubli) en 2007 de Selma Baccar est un des meilleurs, libéré de beaucoup de préjugés.
Est-ce que le mariage pour tous, tel qu’il vient d’être voté en France, est un objectif en Tunisie ?
Nous avons suivi l’actualité du mariage pour tous depuis la Tunisie. Pour nous, la France est le pays des droits de l’homme. On est des rêveurs, des poètes, on imagine que les Français sont très ouverts. 800 000 personnes dans la rue, c’est une honte. Liberté, Égalité, Fraternité, mais il ne faudrait pas donner des droits aux homos, ce ne serait pas des citoyens à part entière ? Alors il n’y a pas de liberté, pas d’égalité. Il y a eu une forte mobilisation, des gens sont partis de l’étranger, y compris de Tunisie, pour manifester avec les amis français. Nous sommes très contents que la loi soit passée, ça nous touche beaucoup, ça nous rassure. Car les gens ici disaient « regardez, même en France les homos n’ont pas le droit au mariage ». C’est quand même une victoire.
Peut-on espérer une loi similaire en Tunisie ?
Personnellement, je crois que c’est quelque chose auquel on arrivera dans dix ou vingt ans, ça prendra le temps que ça prendra. Mais pour l’instant, c’est un peu triste à dire, mais on se bat pour les droits les plus élémentaires, pour le droit à la vie et à l’existence.

///Article N° : 11996

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