Les Rencontres internationales du film court 2004 (Yaoundé Tout-court)

Le court métrage a du cran

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La participation d’une trentaine de films prouve s’il le fallait encore l’engouement des jeunes réalisateurs à réveiller le cinéma camerounais.

Le faible effectif populaire et l’absence des autorités en charge de la Culture aux Rencontres internationales du film court (RIFC) encore appelées  » Yaoundé tout-court  » n’ont en rien entamé le bon déroulement et le succès de la deuxième édition de l’évènement. Non seulement la passion et le dynamisme de la jeune équipe qui l’organise y ont été pour beaucoup, mais aussi le nombre des films a augmenté, ainsi que celui des réalisateurs, dont la participation aux stages-ateliers a témoigné du besoin de formation aux métiers du cinéma et de l’audiovisuel.
Ambiance et désintérêt
300 Fcfa ! C’est le montant du billet qui donnait accès à la salle de spectacle ou de projection du Centre culturel français François Villon de Yaoundé. Cet aspect, apparemment anodin, est venu porter un coup à l’événement, lui faisant perdre le vif succès populaire qu’il avait connu dès la première édition en 2003. Beaucoup de cinéphiles n’étant pas préparé à cette nouvelle option n’ont pas honoré le rendez-vous de la deuxième édition des Rencontres internationales du film court. (Rifc), encore appelées  » Yaoundé tout court « . Ceux qui ont voulu jouer les récalcitrants se sont vus brutalement renvoyés par deux vigiles bien musclés.
Désormais, la billetterie est ouverte aux spectateurs pour tout événement ou spectacle diffusé au CCF de Yaoundé : une exigence du nouveau directeur Yves Bourguignon qui veut amener le public à soutenir et à participer au développement de l’art en payant un ticket comptant.
Comme à l’accoutumée, on a remarqué l’absence des cadres du ministère en charge de la Culture, alors même que les jeunes Camerounais veulent insuffler un nouveau souffle à leur cinématographie qui a perdu ses lettres de noblesse d’antan. Pourquoi afficher tant de désintérêt pour cette importante vitrine ? Pourtant, nombre de jeunes cinéastes ont des choses à relater et malgré les difficultés financières et de diffusion rencontrées dans l’exercice de ce métier, ils ne déchantent aucunement. Ce n’est ni l’envie de produire des films ni la volonté de les présenter au public qui manque. Ils sont tous animés par le même objectif, celui de sauver notre cinéma, et convaincus qu’il peut renaître.
Les films
Par rapport à la première édition, le nombre d’œuvres a nettement augmenté : une trentaine ont été projetées au cours du festival. Cependant, même dans la sélection en compétition officielle, certains sujets ou thèmes racontés en 52 minutes auraient pu l’être en 26 minutes avec plus de cohérence et de précision. Certains réalisateurs ont envoyé au festival des copies de films détériorées, parfois sans son, où l’image était plus ou moins nette. Une attitude que le jury a qualifié de manque de professionnalisme. Quatorze films étaient en compétition. Deux œuvres de Narcisse Mbarga : Karyne Solo, un documentaire de 26 minutes qui relate la carrière musicale de la jeune soliste Karyne Mbarga, et Loving You, qui parle de l’absurdité de la vie à partir de l’amour innocent de deux adolescents, Linda et Sam. Bamdiram Bamba, réalisateur originaire du Septentrion a amené deux films dont l’un, Guedal Hougnare, dépeint les cercles machiavéliques du pouvoir à travers l’histoire d’un prince sanguinaire qui renverse le roi son père avant d’être assassiné et l’autre, Findinééki, raconte l’échec des enfants issus d’une famille dont le père est un irresponsable. Une fiction, et un documentaire sont sortis des écuries de Bassek ba Kobhio, Terre africaine. La première, L’honneur des femmes de Paul Kobhio, 17 minutes, met en relief, la vengeance d’une femme déçue. Le deuxième, Les Footballeuses, de Honoré Noumabeu dure 26 minutes et traite des discriminations du football féminin dans un pays où ce sport est roi. Hope et Le Cercle vicieux de Serge Alain Noa, sont des fictions de 52 et 26 minutes qui parlent des ravages du sida au sein d’une famille et de l’irresponsabilité parentale. Lorenzo Mbiahou, auteur de deux films en compétition est venu avec des fictions de 06 et 52 minutes dont, Le temps d’un léger, orienté sur le sexe, Espoirs et rêves et bien d’autres œuvres de 03 à 31 minutes telles Djomo la promise de Jacques Noumi, Randonnée à Mora, l’Etudiant de Jean-Marc Siangue et bien d’autres.
Si le festival a présenté une trentaine de films, la qualité technique crée encore des inquiétudes et demeure un véritable souci pour la professionnalisation du 7ème art au Cameroun. On relève encore pour beaucoup d’images des problèmes de cadrage. Les échelles de plan, les mouvements de caméra et les angles de prises de vue sont souvent à l’emporte-pièce. Et même dans la direction des acteurs, on a l’impression que c’est du théâtre filmé.  » Tout le monde veut devenir réalisateur au Cameroun, réagit Pauline Darline Etet, scénariste, alors même qu’on manque d’outils requis comme la formation. Et ça porte un coup à ces films «  Face à ces difficultés d’ordre professionnel, le comité d’organisation de Yaoundé Tout-court a ouvert un volet formation dès la première édition, sous la forme d’un stage-atelier destiné aux jeunes cinéastes et aux cinéphiles, pour leur permettre de recevoir des outils nécessaires à l’écriture des scénarii avant de se lancer dans la réalisation.
Professionnalisation et structuration
Yaoundé Tout-court met ainsi l’accent sur la formation en essayant d’assurer un suivi aux stagiaires. C’est ainsi que ceux qui ont pris part l’année dernière à l’initiation à l’écriture du court métrage ont continué et sont passés à la deuxième phase de leur apprentissage. Une vingtaine de participants ont pris part aux deux stages-ateliers portant sur l’initiation à l’écriture du scénario et sur le perfectionnement à l’écriture d’un scénario.
Le premier stage, intitulé Initiation à l’écriture du court-métrage, visait à bien synthétiser une idée, à écrire son histoire de manière chronologique et à la mettre en forme. La méthode choisie par Pauline Etet qui l’encadrait était d’inciter chaque stagiaire à écrire un scénario à partir d’une histoire de son choix. Elle fut impressionnée par la volonté déployée.
Le deuxième stage portait sur le perfectionnement à l’écriture d’un scénario et a permis à une dizaine de scénaristes et de réalisateurs amateurs de peaufiner la qualité de l’écriture de leur scénarii. Ils sont partis sur la base d’un scénario déjà rédigé, qu’ils devaient réécrire eux- même, le découper jusqu’à la préparation filmique en vue de faire un tournage. Film que Bernard Nagmo, scénariste et encadreur de cet atelier, a décidé de concrétiser.
Ici, 99% de courts métrages sont produits par le réalisateur. En général, les comédiens qui jouent dans les courts-métrages sont des copains qui viennent  » donner un coup de main  » et ne sont même pas payés à la fin du tournage. Le court métrage n’est pas encore rentable ; ceux qui s’y investissent ne trouvent pas leur compte pour le moment. Dans un contexte, le besoin d’un regroupement des corps de métier devient indispensable : à quand une structure regroupant tous les cinéastes du Cameroun ?

Palmarès Yaoundé tout court 2004
Grand Prix Yaoundé tout court : L’honneur des femmes, de Paul Kobhio
Prix spécial du jury et de la presse : Les Footballeuses, d’Honoré Noumabeu
Prix de la meilleure interprétation féminine : Toni Bath dans L’honneur des femmes
Prix de la meilleure interprétation masculine : Tony Noums dans Loving you///Article N° : 3604

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Les images de l'article
Loving you, de Narcisse Mbarga
Honoré Noumabeu © O.B.
Narcisse Mbarga et son actrice Marie-Astrid Boula Mba © O.B.
Les vidéastes camerounais rassemblés au festival Ecrans noirs en juin 2004 à Yaoundé © O.B.





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