Une caravane de sans-papiers partie d’Europe traversera la Méditerranée pour se rendre à Tunis, où se déroule le Forum social mondial du 26 au 30 mars. [1]
« Cette année, nous serons au Forum social ! » Anzoumane Sissoko, à la tête de la Coordination parisienne des sans-papiers (CSP75) est déterminé. À l’appel de la Coalition internationale des sans-papiers et migrants (CISPM) – dont la CSP75 fait partie – une vingtaine d’étrangers en situation irrégulière accompagnés d’autant de militants partiront de Berlin pour se rendre au Forum social mondial (FSM) à Tunis. Venus de France, d’Italie, d’Allemagne, de Belgique ou encore d’Espagne, les participants embarqueront à bord d’un bus direction Bruxelles, Paris, Valences, Milan puis Gênes. De là, ces compagnons de route prendront le ferry jusqu’à Tunis, où ils arriveront le 24 mars. « La plupart des thèmes dont il sera question au FSM traitent d’immigration. L’idée est donc de s’y rendre avec des sans-papiers et surtout de revenir avec eux », explique Anzoumane, figure emblématique du mouvement à Paris, régularisé en 2005.
Se fédérer
Déjà en 2011 des travailleurs en situation irrégulière avaient tenté de se rendre au FSM de Dakar en avion. Cette fois-ci, ils choisissent la voie maritime, plus facile à emprunter. Forte de son expérience de la marche européenne des sans-papiers organisée en 2012 [2], la CISPM est convaincue que cette tentative sera la bonne. « Dès 2011, nous avons décidé de travailler avec les coalitions de sans-papiers d’autres pays car même si les politiques migratoires de chaque pays sont élaborées à l’échelle nationale, chacun se réfère à la législation européenne et collabore avec les pays africains notamment », explique Anzoumane.
Un pari risqué
Face au risque d’arrestation, ce militant invétéré se veut confiant. « Nous avons prévenu l’ensemble des autorités concernées de notre passage des frontières : les ministères de l’Intérieur de chaque pays, Frontex [3], les préfets, etc. Le message est passé, nous n’avons pas besoin de leur accord », lancet- il, un brin défiant. Pour affirmer le bienfondé de leur démarche, chacun des sanspapiers voyagera muni de son passeport. Un risque supplémentaire qui pourrait faciliter leur renvoi dans leur pays d’origine en cas d’arrestation. « C’est une façon de montrer que nous ne sommes pas dangereux et surtout que nous avons une identité. Nous ne sommes pas seulement des hommes noirs », estime Anzoumane. Une fois arrivés à Tunis, les sans-papiers, regroupés, au sein du Forum des associations des luttes démocratiques de l’immigration (Faldi), organiseront leurs propres tables rondes. Transgresser les frontières pour revendiquer la liberté de circulation : le pari est risqué, le symbole fort.
[1] à suivre sur www.fsm2013.org
[2] à lire sur africultures.com : « la marche des sans -papiers transcende les frontières » par Mélanie Cournot
[3] Frontex est l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne, elle est en charge de la sécurité et des frontières extérieures de l’Union européenne.Les luttes des sans-papiers en quelques dates
1996 Occupation de l’église Saint-Bernard à Paris. / Mai 2010 Marche de Paris à Nice où se déroule le 25e sommet Afrique-France. / Février 2011 Une caravane d’anciens sanspapiers installés en France part de Bamako au Mali pour se rendre au FSM de Dakar. / Juin 2012 La marche européenne des sans-papiers et des migrants traverse neuf frontières pour s’achever devant le Parlement européen de Strasbourg.///Article N° : 12538