Le nouvel album de Diénéba Seck pourrait s’approprier l’exigence inlassablement répétée dans les palais de justices : » La Vérité, rien que la Vérité « . Après six ans d’absence, la Malienne revient avec douze titres marqués du sceau du proverbe, de l’exhortation et de la morale conseillère.
C’est par le thème emblématique du mariage, cher aux Maliens, que Diénéba ouvre le CD.
» Nitékè Nela » ( » on me la fait pas à moi « ) traite des désordres dans le couple en mettant l’accent sur les vicissitudes de la polygamie : » Femmes, hommes, si nous ne veillons pas à l’équilibre du couple, nos progénitures ne s’épanouiront point
» La prose stigmatise la fragilité des mariages de nos jours comme une maladie grave à guérir au plus vite.
Comme pour offrir une consolation aux démunis, le second titre » Bolokolonia » ( » Les mains vides « ) rappelle à tous les vivants que riches et pauvres sont habités par une même âme : » La pauvreté est certainement insupportable mais tous les êtres sont égaux devant Dieu « . La suite sert à nouveau le sujet du mariage ( » Nata Furu « ) avant d’enchaîner sur » Tignè « , (La Vérité), titre éponyme de l’album. Le jeu de clavier à la Clayderman et le nappage de synthé donnent un goût d’eau de rose à cette pièce, sensé porter l’ensemble de l’uvre. » Foulbe » remonte le niveau avec son intro de guitare teinté andalou et ses accords de soukou (violon traditionnel) flottant au-dessus des percussions.
Avec » Sounana « , Diénéba donne au passage un coup de griffes aux hypocrites médisants avant de louer la grandeur du Mali et des Maliens ( » Anka Maliba « ), puis de formuler des vux de longévité à son auditoire dans » Sidian » ( » Longue vie « ). » N’envie point le fortuné, ne t’inquiète pas pour la fin, si Dieu te prête vie, tu jouiras de tous les plaisirs « .
» Santa » ( » Bien à acheter « ) quant à lui, se veut une ode à la lignée familiale que l’on doit préserver comme la prunelle des yeux. » J’ai été sur tous les marchés, impossible de trouver une famille à acheter
« . » Dothi i Fassola » ( » Renvoi à la Mère Patrie « ) salue les efforts des Maliens immigrés et leur rappelle la nécessité de préparer leur avenir en réinvestissant une partie de leurs gains au pays. » Voyez tous ces pays en feu autour de nous. Leur fracture doit nous édifier. Assurons l’avenir du pays avec le peu que nous gagnons à l’aventure. »
Diénéba Seck conclue par deux recommandations de bonne conduite » Yêrê Ladi » ( » Se donner soi-même des conseils « ) et » Oudiobila » ( » Ils ont raison « ).
Au total, une heure de rythme et de mélodies joyeuses et entraînantes, chargées de métaphores et gonflées de soleil.
Le Pays de l’Oncle Sam n’a pas fini de nous servir des joyaux musicaux d’expression noire, cachés dans ses terres du Sud. En 2004 déjà, Martin Scorcese s’était lancé dans une expédition de fouilles sur les traces du blues et avait exhumé de brillantes pièces consignées dans son long-métrage, From Mali to Mississipi. En 2005, c’est au tour du label américain Dixiford de concrétiser une opération de grande envergure en diffusant un double album consacré aux derniers survivants dépositaires du blues authentique. En dotant son label de la Fondation Music Maker, Tim Duffy se donne les moyens de rechercher, d’enregistrer et d’aider les derniers pionniers de ce genre qui a profondément influencé la musique des années 20 à nos jours. Un travail titanesque et unique qui vise à préserver ce qui reste du patrimoine culturel pouvant encore être sauvé en Amérique. De Guitar Gabriel à Samuel Turner Stevens (1925-1999) en passant par Sweet Betty, Mr Q ou Jack Owens (1904-1997), tous servent une musique épurée, scintillante et voluptueuse. Tantôt cristalline, tantôt onctueuse. Voix caverneuses, guitares texanes, harmonica, banjo et mandoline s’accouplent dans des orchestrations minimalistes et servent l’essentiel de la musique : celle qui parle simplement de l’âme de la terre et de ses hommes. Music Maker, c’est vingt-huit artistes qui offrent généreusement le fond de leur art à travers 38 titres totalisant 2h30mn de jouissance.
Au hasard de ces rencontres, le bassiste français Frédéric Dalléas fait la connaissance de Yéau Bobo Bah, musicien d’origine guinéenne, touche-à-tout de la panoplie des instruments de son pays. Il affiche une longue expérience acquise d’abord au pays natal avec les Merveilles de Guinée, puis tout au long de ses voyages, tournant avec diverses formations : l’Ensemble Instrumental du Sénégal à Dakar, le Ballet international de Côte-d’Ivoire, le Farafikan de feu Mohamed Cheikh Smith ou le Béta Foly de Lamine Baldé à Abidjan.
Très vite, la rencontre entre les deux artistes donne naissance à un projet commun. Le désir devient réalité avec la création de Yéau Téré Foulbé qui auto produit Paroles de Peuls en 2005.
L’uvre comporte six titres et une vidéo. Elle s’appuie sur les traditions peulhs de Yéau Baba Bah tout en intégrant des accents aux couleurs pop. Guitares électriques, basse, batterie, flûte peulh, djembé, synthé et balafon cohabitent et proposent un son amplifié à souhait. Ce type de formule est fréquent et exhale trop souvent un parfum d’exotisme L’approche standard de l’ensemble des compositions classe le CD au rayon de la variété. Il comporte des idées qui pourraient évoluer et afficher plus d’originalité.
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