Présenté au dernier Rencontres Théâtrales Internationales du Cameroun (RETIC, dont on trouvera un compte-rendu sur africultures.com), le spectacle de Faustin Linyekula, (cf entretien et note d’intention dans Africultures 42) oppose le paraître au vide de la réalité congolaise.
« C’est ça qui me semble beau, c’est ça que j’aimerais faire, un livre sur rien (…) et qui tiendrait par la force interne de son style… ». Si jamais Flaubert ne réalisa ce rêve, Faustin Linyekula, chorégraphe congolais (RDC) l’a fait. Un spectacle parti de rien, ne cherchant à aller nulle part et ne voulant arriver nulle part.
« Grandiose et tragique comme un éléphant blanc, spectaculaire et tragique comme la frime dans les rues de Kinshasa… ». Spectacularly Empty, est né avec le retour de Faustin dans son pays, un pays qui vient de traverser une grande période de troubles. C’est le choc. Tout est dévasté, triste, en ruine. Et sur cette misère, on se complait à poser un masque : le paraître. Paraître riche, paraître beau, paraître heureux, paraître, paraître, paraître. On ne vit que pour ça. Alors, avec ce qu’il fait de mieux, la danse, Faustin entreprend de montrer ce qu’est devenu son Zaïre redevenu Congo : spectaculaire et vide. Pari gagné !
Les rues de Kinshasa déménagent et viennent à nous. Nous sommes devant notre téléviseur et nous regardons un film. Des personnages déambulent de partout. Ils se pavanent, dansent, jouent, s’amusent. Mais par moment, sortant de leur univers ils viennent nous inviter à les suivre, histoire de nous montrer que si de notre fauteuil nous avons l’impression que « tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes », la réalité est autre…
Si nous ne les suivons pas, comment ferions-nous pour traverser l’écran qui nous sépare ? Car, se cachant dans un coin où notre regard indiscret ne pourra les atteindre, ils pleurent, souffrent et meurent de ce qu’est leur véritable univers : pitoyable !
Spectacularly Empty est ainsi une opposition entre la réalités du paraître (qui est spectaculaire) et celle du réel (qui est vide). Cette réalité du vide est également nôtre, aussi camerounaise que congolaise : plutôt en être fier que d’en avoir honte, puisque c’est celle que nous vivons tous !
Spectaculary Empty, ou spectaculaire et vide. Spectaculaire, certes, mais vide ? Pas tant que ça…
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