« Je ne cèderai pas ma place ! » : Rosa Parks,  Récit d’une vie, symbole d’un féminisme bouleversant

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Dans cet article, Jean-Philippe Saby, doctorant, chercheur en littérature et civilisation africaine et latino-américaine revient sur le parcours de Rosa Parks.

Rosa Louise McCauley est née le 4 février 1913 à Tuskegee (Alabama) aux États-Unis, elle est l’aînée de deux enfants d’un charpentier. La petite enfant connaît dès son jeune âge les fortes réalités de l’existence humaine. Elle a des problèmes de santé, dont une angine chronique et vit dans une atmosphère dissonante avec les disputes incessantes de ses parents qui les conduiront au divorce. C’est donc avec son grand-père Sylvester et sa mère, une institutrice de campagne, qu’elle va recevoir une éducation chrétienne (Méthodiste) et apprendre à lire et à écrire à la maison jusqu’à ses onze ans. Elle poursuit son enfance à Montgomery où habite sa tante, dans une école privée (Industrial School for Girls) pour filles afro-américaine. École qui d’ailleurs sera ironiquement détruite par ses constructeurs (les blancs), par le groupe des Ku Klux Klan (KKK)1 du Nord.

Adolescente, Rosa fréquente le collège d’Alabama State Teachers College for Negroes (une école d’enseignants de l’État de l’Alabama pour les Noirs) et l’Alabama State University. Un cursus universitaire qu’elle ne pourra malheureusement poursuivre, devant s’occuper de ses grands-parents malades. Elle grandit dans un environnement où existent toujours les lois de ségrégation (lois Jim Crow)2 selon lesquelles blancs et noirs doivent vivre indépendamment (restaurants, églises, cimetières, écoles, activités, etc.). Chaque soir, dans la pénombre, son grand-père et elle, montent la garde contre les blancs pour possiblement échapper à leurs pourchasses. Adulte, Rosa travaille comme couturière et quelque peu comme ménagère des blancs.

Elle s’engage dans l’association nationale pour la promotion des gens de couleur (NAACP). Mouvement dans lequel, auprès de son mari Raymond Parks (mariés en 1932), elle occupe le poste de secrétaire et responsable des jeunes.3  A cette époque de nombreuses affaires illustrent les crimes impunis dont sont victimes des personnes noires.  On a le cas de Recy Taylor violée par sept hommes blancs qui restera sans aucune suite. Également l’assassinat d’Emmett Till en août 1955 qui restera aussi impuni.

En décembre 1943, Rosa fait un premier refus dans un bus, elle manque de céder sa place à un blanc. Persistant sur son insoumission, le chauffeur la contraint à descendre du bus. Mais, la jeune dame ne se résilie point. Un après-midi du jeudi premier décembre 1955, en partance pour ses activités quotidiennes dans Alabama, elle s’empresse de monter dans un bus de son quartier Montgomery. Toute fatiguée de ces lois inhumaines, égocentriques, égoïstes et raciales, elle refuse une seconde fois de céder sa place. Ce dernier acte portera un écho sans pareil. Le chauffeur intervient. Avec lui, tous les blancs présents au moment de la scène. La jeune dame refuse catégoriquement de se soumettre. Elle est jugée et inculpée de désordre public ainsi que de violation des lois locales. Il lui est imposé une amende de 15 dollars. Martin Luther King, pasteur encore peu connu, sitôt lance un appel à la solidarité, au soutien, au boycott et à des marches pacifiques pour manifester contre cette injustice.

À 42 ans, Rosa devient l’une des femmes les plus importantes et médiatisées de l’Amérique. Elle dirige le mouvement de lutte avec Martin Luther King qu’ils mèneront de bout en bout, soldé par la non-violence, vers la déségrégation de l’Amérique. Rosa était sans équivoque une magicienne, telle Nikki Giovanni l’avait qualifiée : «Rosa Parks was the best seamstress. The needle and thread flew though her like the gold spinning from Rumpelstiltskin’s loom».4   Rosa Parks a ainsi, par « son simple acte de protestation […] galvanisé la révolution des droits civiques de l’Amérique».

Références : 

1.Le Ku Klux Klan est un groupe, une organisation politique née au XIXe siècle aux États-Unis qui regroupe des personnes souhaitant que la race blanche prédomine sur les autres races et qui ont recours à des méthodes violentes.

2.Christophe, Carmarans, et André Larané. « Les lois Jim Crow (1876-1964) Jumelage ». Https://fr.calameo.com. Jumelage (blog), 18 février 2018. http://jumelage.org/francais/les-lois-jim-crow/.

  1. McGuire, Danielle L. At the Dark End of the Street: Black Women, Rape, and Resistance–A New History of the Civil Rights Movement from Rosa Parks to the Rise of Black Power. Knopf Doubleday Publishing Group, 2010.

4.Giovanni, Nikki. Rosa. Henry Holt and Company (BYR), 2005. Rosa est ici désignée comme un génie de la couture, image que Nikki utilise pour la bonifier dans son acte de révolution. L’acte et la parole, ici imagés par « The needle and thread », l’aiguille et le fil (notre traduction) nous permettent de voir qu’elle s’était investie dans la cause de son peuple.

 

 

 

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