Mali K7 : les pirates ont la peau dure

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L’édifiante histoire de Mali K7 et des artistes maliens face aux pirates ou comment forcer les pouvoirs publics à appliquer la loi sur la propriété intellectuelle.

A l’origine, la SARL Oubien Productions qui crée le premier studio d’enregistrement multipistes au Mali : 16 pistes analogiques à l’époque. Un an après, naît la première unité de duplication de cassettes artisanale et légale. En 1992, un rapprochement s’opère avec le groupe EMI et la société devient EMI-Mali K7 SA au capital de 12 500 000 FCFA.
Le groupe EMI est majoritaire à 80 % mais lorsqu’en 1994, il se désengage de l’Afrique (de Côte d’Ivoire, du Nigeria etc), il lâche également Mali K7. Heureusement, en 1995, Ali Farka Touré rachète la participation d’EMI et la société devient Mali K7 SA Ali Farka Touré Associé.
Il faut alors deux mois aux pirates pour agir après la mise d’une cassette sur le marché. Un pirate très actif est un certain Kaluani, basé au Libéria. Il déménage en Sierra Leone à cause de la guerre, si bien que la guerre ayant également atteint la Sierra Leone, la piraterie diminue à tel point que de la mi-97 à la mi-98, elle est presque inexistante. Mais à l’automne 98, elle revient doucement : les importateurs de cassettes voyagent et ont découvert une usine pirate à Bangkok et une autre à Dubaï : MGS, représentée par un Indo-pakistanais surnommé Rony. La piraterie redémarre de plus belle : les arrivages ne sont pas réguliers mais importants, par containers.
A l’été 99, les importations s’accélèrent et Mali K7 voit ses ventes diminuer d’autant. Sa production mensuelle passe de 50 000 cassettes en 1997 à 8 000 en décembre 99. Des cassettes qui se vendent normalement de 20 000 à 30 000 exemplaires ne dépassent pas les 4000, comme ce fut le cas d’artistes pourtant très prisés au Mali : Amadou et Mariam, Nahawa Doumbia, Kandia Kouyaté, Djénéba Seck. Le délai de piraterie est passé à moins de 10 jours…
Novembre 99 : un nouveau directeur est nommé au bureau des droits d’auteur. Le 20 décembre, la douane saisit un container de 190 000 cassettes pirates. Le 27 décembre, Mali K7 ferme volontairement ses portes, en raison de la piraterie. Le 2 février 2000 au matin, les artistes organisent une marche sur la primature et sont reçus par le premier ministre. Dans l’après-midi, le ministère de la Culture et le bureau des droits d’auteur font brûler 60 000 cassettes pirates.
Le 11 février, le ministère de la Culture organise un toguna (une rencontre) sur la spoliation des droits des artistes qui formule des recommandations faites par les artistes et les producteurs. Le 14 février, Mali K7 rouvre ses portes : le travail reprend dans un contexte où la piraterie a diminué. Les cassettes les plus piratées commencent à se revendre mais durant cette période en principe faste où les ventes atteignent 60 000 cassettes par mois, ce chiffre n’est atteint que sur le premier trimestre 2000.
Mali K7 est encore dans l’incertitude face à l’avenir. Aucune procédure judiciaire n’a été entreprise contre les pirates. Quant aux recommandations du toguna, elles sont peu suivies, pour ne pas dire oubliées…

Contact : [email protected]///Article N° : 1424

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