Comme deux éphémères pris au piège d’un coin de lumière éblouissant, aveuglés par cet amour incestueux qui les attire l’un vers l’autre, les deux personnages s’emmurent peu à peu dans cette attraction des corps et des âmes qui les brûle de l’intérieur et leur interdit tout épanouissement. Partage de souvenirs d’enfance, fausse régénérescence donnée par la remémoration de ce qui a été et n’est plus, ce diamant d’amour qui éblouit le spectateur finit en tombeau, sépulture immaculée où demeurent deux gisants, tels Héloïse et Abélard des temps révolus. Amour fermé comme un cocon stérile dont les larves ne se métamorphoseront jamais en papillon, et qui porte en lui son propre anéantissement. Nicole Dogué y déploie sa voix roque et chaude tandis que Christophe Ratandra offre sa présence lascive, sensuelle et charnelle. Une réussite de sobriété et de force, un cri aigu de lumière aveuglante qui incise l’âme au scalpel pour faire surgir de la gangue théâtrale une pierre précieuse incandescente de douleur. On ne pouvait rêver une plus belle interprétation de l’univers durassien.
Théâtre de La Chapelle du Verbe Incarné
Texte de Marguerite Duras
Production : Théâtre du Centaure
Mise en scène de Marja-Leena Junker
Construction décors : Inga Soll
Régie technique : Xavier Nybelen///Article N° : 9703