Ba Power

De Bassékou Kouyaté et Ngoni Ba

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Bassekou Kouyaté, chantre de l’instrument ancestral des griots, le ngoni, signe un quatrième album avec sa formation Ngoni Ba. Ba Power est un ballet moderne de cordes impétueuses, de sons électriques et saturés, dans une tension où se frayent aussi des notes mélancoliques.

Prenez-place au royaume du n’goni, sous l’invitation de sa majesté Bassékou Kouyaté. Héritier d’une lignée de griots dont les lointains ancêtres accompagnaient leurs récits, à la cour royale mandingue du 12ème siècle, de ce luth à quatre cordes, Bassékou a consacré sa vie à maintenir les lettres de noblesse de ce joyau de la musique mandingue. Son père, Moustapha Kouyaté, joueur des plus renommés, sillonnait la contrée de Ségou avec sa femme Yagaré Damba, chanteuse. Une génération plus tard, le n’goni de Bassékou ne résonne pas sans la voix de sa femme, Amy Sacko, et le jeu vif de ses fils, Mamadou et Moctar. La famille, le groupe, leur son, se nomment Ngoni Ba. « Ba », comme la puissance d’un instrument qui aurait risqué sa peau à trop rester dans l’ombre de la guitare électrique.
Un soir de concert, peu avant sa mort, Ali Farka Touré lui souffle à l’oreille que c’est à son tour, désormais, de représenter le Mali. Tâche esquissée par le musicien depuis Segu Blue (2006) et la création de Ngoni Ba, accomplie sûrement à travers Jama Ko (2013) puis ce dernier album, Ba Power. Le quartet de ngonis (basse, ténor, alto et soprano) vibre ici dans une tension qui n’a rien à envier aux orchestres où batterie, clavier et guitares sonnent le rock. Le ngoni basse remplace la guitare basse pour accompagner la ligne mélodique d’autres ngonis, qui s’électrise et se distords depuis une pédale wa-wa. L’arbre généalogique de la guitare se dessine alors, à partir d’un esclave, qui, dans la cale d’un bateau sur l’Atlantique, au 16ème siècle, façonna un luth avec une calebasse, une pièce de bois et quelques fibres. Le banjo, le blues, le rock en sont les parents. Les collaborations sur cet album rappellent cette filiation, entre la batterie de Dave Smith et la trompette de Jon Hassell. Des noms passionnés d’une histoire musicale sur le cours du Niger et du Mississippi.
Moins nerveux que Jama Ko, dont les compositions avaient encore l’empreinte d’un enregistrement réalisé en plein coup d’Etat, Ba Power retient peut-être la mélancolie d’un album hommage à Yagaré Damba, mère de Bassékou, disparue pendant l’enregistrement. A l’image du sublime « Musow Fanga » où sur un rythme frénétique, comme une ode à la vie, une savoureuse nostalgie plane dans un ton mineur, à travers le timbre d’Amy Sacko et les notes de la trompette.

Ba Power, de Bassékou Kouyaté et Ngoni Ba, Glitterhouse Records.///Article N° : 13012

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