Pour Afriscope/Africultures, Les Indivisibles décryptent une phrase d’actualité trahissant le racisme qui peut se glisser dans les propos des personnages publics.
« LES ROMS ONT VOCATION A REVENIR EN BULGARIE OU EN ROUMANIE »
– MANUEL VALLS, L’INVITE DU JOUR – FRANCE INTER, 24 SEPTEMBRE 2013
Quand on connaît l’accueil que leur fait la Bulgarie ou la Roumanie, il y a de quoi se poser des questions. Partant de ce principe, on aurait tous vocation à retourner de là où l’on vient ! Et ce n’est pas, dans les propos de Manuel Valls, ministre de l’Intérieur une question de nationalité semble-t-il ! Attention aux Bretons qui sont à Paris ! Rectifions un point. Même s’ils ont, pour la plupart, la nationalité bulgare ou roumaine, le terme Rom ou Rrom fait référence à un groupe ethnique, et non à une nationalité. Les Roms qui ont la nationalité française devront donc ? Manuel, j’ai besoin d’aide ! Il faut tout même saluer l’attention qu’accorde notre ministre à cette population, ne constituant que 0,03% de la population totale. Offrir à autant de personnes l’opportunité d’avoir conscience de leur existence et de les détester en même temps, c’est faire d’une pierre deux coups. Beaucoup de maires y voient là une belle opportunité de campagne à l’approche des municipales, quelle que soit leur couleur politique. Plus de 10 000 évacuations ont eu lieu au premier semestre 2013 selon Amnesty International (2). M. Valls, en tant que ministre de l’Intérieur n’est sans doute pas étranger à ce nouveau record. Il est bien là le problème : les mots, aussi violents soient-ils, sont accompagnés de faits. Cette violence est communiquée aux forces de l’ordre qui intègrent les propos discriminatoires de leur supérieur hiérarchique dans leurs actions. Cette violence, également partagée dans la presse, crée un cercle vicieux dans l’opinion publique. Ceux qui avaient déjà une image négative des Roms (qu’ils associent systématiquement aux gens du voyage) se sentent confortés dans cette idée. Les autres, les « sans opinions », se laissent happer par la politique commune de haine. Le procédé n’est pas nouveau. On tente d’unir un peuple en créant un ennemi commun et en prétendant agir pour le bien commun : diviser pour mieux régner (mais faire croire qu’on unit). C’est eux contre nous. « Ces populations qui ont des modes de vie extrêmement différents des nôtres et qui sont évidemment en confrontation » ajoute Valls dans le même entretien. Stigmatisation et peur : on reconnaît là des outils que l’on attribue souvent à l’extrême droite. Il est impératif dans ces conditions de s’informer et de lutter contre ces préjugés qui nous sont savamment inculqués.
1. http://new.humanite.fr/tribunes/manuel-souviens-t-en-550018, consulté le 12 octobre 2013.
2. Selon le rapport « Condamnés à l’errance. Les expulsions forcées des Roms en France » de Amnesty International, Publié le 25 septembre 2013 http://www.amnesty.fr/sites/default/files/Rapport_Expulsions_forc%C3%A9es_de_roms_en_France_260913.pdf///Article N° : 11859