Yenna-d umyar (Le Sage a dit) 

De Ait Menguellet

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Sortie le 5 Avril 2005
Yenna-d umyar (Le Sage a dit), le nouvel album de Abdenbi Lounis Aît-Menguellet affirme et confirme son verbe  » fouetteur  » de conscience. L’artiste s’inspire des traditions millénaires des montagnes du Djurdjura en Algérie, s’approprie le  » chaâbi  » populaire, use du  » mezmoum  » méditerranéen d’origine grec, vivifie le blues kabyle, et propose une succession de sept titres qui promènent l’auditeur de la Kabylie en Orient en passant par l’Andalousie. Des ballades, des mélodies, du parler-chanté soutenus par une orchestration intégrant des accents ibériques, celtique ou irlandais. Une musique et des mots ciselés pour véhiculer la pensée et la vision consciente de Aït Menguellet.
Sa parole relève la déliquescence des valeurs de notre monde perturbé et les cicatrices de nos âmes ruinées (Dis nous, vieux sage…). Elle décrit la traîtrise et comment l’homme peut être un loup pour l’homme (A Dda Yidir). Elle peint la fatalité de la condition humaine, dénonce l’ingratitude de la politique ou murmure la solitude du poète incompris (Yerna yimen wass).
Idole de toute la Kabylie et symbole vivant, toute l’œuvre de Lounis Aït Menguellet depuis plus de trente ans est un condensé de questionnement de ses concitoyens et des pouvoirs publics algériens. Son choix artistique éclaire les traditions musicales occultées par l’Algérie des indépendances et défend singulièrement et avec âpreté la culture amazigh (bérbére).
Sa prose est un chapelet poétique construit d’images fortes et de métaphores qui traduisent le contexte socio-politique de son pays. Ses textes s’écrivent avec des mots précis, pointus, incisifs et inquisiteurs. Ils sont une lecture pertinente du malaise social, particulièrement chez les jeunes, du déficit de communication entre parents et enfants ou entre garçons et filles.
La teneur politique de ses écrits et son immense popularité le mettent dans le collimateur du régime algérien. À cause d’une arme de collection qu’il possède, l’autorité l’accuse de détention illégale d’arme et le condamne à trois ans d’emprisonnement en 1985. Comme un seul homme, la jeunesse kabyle se dresse contre l’arbitraire et sa révolte fait libérer l’artiste après quelques mois d’arrestation. En Algérie comme en France, son charisme traverse les générations et fait de lui un mentor qui inspire de jeunes artistes comme Mustapha et Hakim Amokrane de Zebda qui ont repris quelques-unes de ses compositions.
C’est un homme humble, un poète militant qui préfère se définir avec humour comme un chanteur  » provisoire  » qui nous propose dans ce nouvel album, sa lecture des dérives du pouvoir, de la condition de son peuple et de l’état du monde.

Yenna-d umyar (Le Sage a dit) , de Ait Menguellet (Suave)///Article N° : 3788

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