En Afrique de l’Ouest, il est fréquent d’entendre que la danse est « une affaire de femme ». Des Djendjoba maliens aux Sabar sénégalais, les cercles qui se forment lors des événements festifs regroupent majoritairement des femmes. Dans le monde des danses scéniques « traditionnelles », les jeunes filles occupent, là aussi, une large place. Au Burkina Faso, les troupes spécialisées dans le kigba ou le salou demeurent exclusivement féminines tandis que certaines danses, autrefois réservées aux hommes, notamment le warba, sont devenues, lors de leur passage à la scène, des danses mixtes. A contrario, dans le champ de la création chorégraphique contemporaine, la tendance s’est inversée au cours des dernières années. La plupart des compagnies internationalement reconnues sont dirigées par des hommes, les stages de formations professionnels sont surtout investis par des élèves masculins tandis que les programmes des grands événements chargés de promouvoir cette nouvelle forme d’expression artistique proposent en large part des pièces où créateurs et interprètes sont des hommes. Lors du concours de la huitième édition des rencontres chorégraphiques de l’Afrique et de l’Océan indien, Danse l’Afrique Danse, qui s’est déroulée en novembre 2010 à Bamako, seules deux chorégraphes femmes (1) étaient présentes parmi les dix performances retenues dans la catégorie pièces collectives tandis qu’aucune artiste femme n’était représentée dans la catégorie solo (2). En octobre 2012 à Johannesbourg, les organisateurs de Danse l’Afrique Danse soulignent qu’ils ont été attentifs à ne pas reproduire ce déséquilibre, un souhait permis par un nombre plus important de propositions chorégraphiques portées par des chorégraphes femmes. Cependant, malgré cette attention déclarée, les « rapports hommes-femmes » ont été à nouveau loin d’être équilibrés sur scène (3). Sur les quarante-quatre pièces au programme de la Biennale (4), seules dix d’entre elles étaient signées ou cosignées par des chorégraphes femmes. Cette faible présence des femmes chorégraphes, regrettée par plusieurs observateurs lors de ces biennales (5), ne va pas de soi et interroge à plus d’un titre.
On connaît, en effet, le rôle majeur joué par des femmes chorégraphes dans le développement de la danse contemporaine sur le continent africain. Germaine Acogny, sénégalaise d’origine béninoise, ancienne directrice de l’école de danse MUDRA-Afrique, fondée à Dakar en 1977 par le président Léopold Sédar Senghor et le chorégraphe français Maurice Béjart, est aujourd’hui reconnue comme la créatrice d’une nouvelle danse africaine décidément urbaine et cosmopolite. Dans son sillage, la chorégraphe burkinabè Irène Tassembédo, ancienne élève de MUDRA-Afrique, a ouvert de nouveaux horizons pour les générations suivantes en créant, avec sa compagnie, un laboratoire pour des danses innovantes, loin des classifications stéréotypées. Ces deux pionnières de la génération des « débroussailleurs (6) » se sont ensuite engagées dans la création de lieux de formation en inaugurant leurs propres écoles de danse (7), espaces où elles purent mettre l’accent sur la formation des femmes comme des hommes.
Au cours des années 1990, moment où la danse contemporaine commence à « exploser » sur le continent africain (Amselle, 2005), on constate à nouveau le rôle important joué par les femmes chorégraphes. La compagnie ivoirienne Tché Tché aura laissé un grand vide sur les plateaux mais aussi dans les curs des artistes, professionnels et publics de la danse contemporaine après le départ prématuré de sa fondatrice Béatrice Kombé Gnapa qui entraîna la dissolution de la compagnie en 2007. À côté de cette compagnie féminine emblématique, d’autres femmes ont, elles aussi, fait leur entrée sur la scène internationale. Kettly Noël, chorégraphe d’origine haïtienne, directrice d’un centre de danse contemporaine à Bamako, et la Sud-Africaine Nelisiwe Xaba sont peut-être celles qui ont le plus radicalement défié les représentations exotisantes attachées aux corps noirs, tout comme les stéréotypes liés à la femme danseuse. Plus discrètement, Fatou Cissé, fille du chorégraphe dakarois Ousmane Noël Cissé et membre fondatrice de la Cie 1er Temps, a elle aussi fait son entrée sur les scènes internationales de façon convaincante. D’autres se sont engagées dans la création de festivals et d’espaces d’échanges en mettant en uvre des actions propices à la présence féminine sur les plateaux. Nous pouvons relever les initiatives fortes portées par Gacirah Diagne, chorégraphe et présidente de l’association Kaay Fecc à Dakar, qui a introduit en juin 2011, lors de la sixième édition du festival Kaay Fecc un « Focus femme » pour répondre à la situation actuelle au Sénégal où, selon les mots de Gacirah, « les femmes ne s’imposent pas ». Ce constat semble d’autant plus étonnant et regrettable que des initiatives chorégraphiques féminines y existent, comme l’illustrait la pièce d’ouverture du festival, composée à partir des solos de trois danseuses : Gnagna Gueye, Rachelle Chenet et Fatou Samb. Reste à noter que ces initiatives, au Sénégal comme ailleurs, se manifestent surtout dans le domaine des solos (8).
Fatou Cissé, interprète puis créatrice de plusieurs pièces solos rejoint le constat de la présidente de Kaay Fecc affirmant qu’en règle générale « les femmes se mettent derrière ». En même temps, elle s’engage dans une réflexion sur les conditions des femmes au Sénégal et les raisons profondes de leurs réticences à lever la voix et à s’imposer devant un public. Déjà dans son premier solo, « Xalaat » (la pensée en wolof) crée en 2005, elle défiait à travers ses gestes la peur empêchant à la femme d’exprimer ses pensées et son être intérieur sous le regard des autres (9). En 2011, elle explore, de nouveau, ce sujet tout en l’emmenant à un niveau plus général dans un solo intitulé « Regarde-moi encore ». Dans cette pièce où la langue des signes constitue une source d’inspiration importante, elle tente d’épeler les gestes « muets » de la femme face au monde. Cette pièce souligne bien que ce n’est pas uniquement par manque de formation que les danseuses ne s’imposent pas dans le monde professionnel de la danse contemporaine en Afrique. Pour pouvoir s’affirmer sur scène, il faut avoir le courage de se présenter à un public sans être sûr d’avoir en retour la reconnaissance du sérieux et de la valeur du travail accomplis en qualité de danseuse (10). Il faut aussi que les chorégraphes du continent fassent preuve d’une curiosité et d’une volonté de se mettre à l’écoute de ce que les femmes auraient à dire si elles osaient
On discerne ce courage couplé à une envie de partager et de découvrir ensemble de nouveaux espaces créatifs derrière le projet Engagement Féminin, conçu et mis en uvre par les chorégraphes burkinabè Auguste Ouédraogo et Bienvenue Bazié. Ici, un cadre de formation en danse contemporaine où l’accent est mis sur l’écriture chorégraphique est proposé aux danseuses d’Afrique de l’Ouest. Cet espace fut conçu par les deux chorégraphes pour apporter le savoir-faire nécessaire pour devenir soi-même créateur, auteur de sa propre danse et pas uniquement danseur-interprète. Pour transmettre ce savoir-créer, ils ne se contentent pas d’un enseignement technique. Engagement féminin est en effet conçu pour apporter la confiance nécessaire à celles qui veulent faire de la danse leur métier.
La description de ce projet, le sens qu’il revêt pour les différents acteurs qui y prennent part et les défis particuliers qu’ils ont eus à affronter nous semble particulièrement intéressant pour interroger non seulement les dynamiques actuelles de la danse contemporaine en Afrique de l’Ouest, mais plus précisément ses conditions d’existence en tant que pratique artistique établie et reconnue à l’échelle locale (11).
Le projet Engagement féminin a germé dans l’esprit d’Auguste Ouédraogo et de Bienvenue Bazié en 2006. À l’époque, les deux chorégraphes burkinabè, malgré leur jeune âge, ont déjà multiplié les expériences et les collaborations artistiques. Après avoir fait, ensemble, leurs premiers pas de danse dans la troupe ouagalaise Les Bourgeons du Burkina et connu leurs premières tournées nationales à l’adolescence, ils ont ensuite investi les différentes formations en danse contemporaine proposées à Ouagadougou, poursuivi ces apprentissages en Europe tout en s’engageant dans un travail de création au sein de la Compagnie Tâ. Certaines pièces, comme Bûudu, seront remarquées par les professionnels et les premières tournées internationales débuteront en 2003. Parallèlement à ces démarches créatives communes, chacun poursuivra son itinéraire. Bienvenue Bazié interprétera notamment le solo Welcome to Bienvenue créé par le chorégraphe français Xavier Lot tandis qu’Auguste Ouedraogo collaborera avec Robert Seyfried sur la pièce Transpace et créera un duo avec la chorégraphe marocaine Hind Benali.
Les projets artistiques foisonnent, les partenariats internationaux se multiplient et pourtant, les deux chorégraphes ressentent le besoin de donner un sens renouvelé à leurs actions. Si le désir d’expérimentation artistique est toujours présent, la volonté de « passer à autre chose », de « faire les choses autrement » s’impose. La compagnie change alors de nom et devient Art’ Dév’/Compagnie Auguste-Bienvenue. Dans le sillage de leurs aînés, en particulier Salia Sanou et Seydou Boro, qui concomitamment à leur reconnaissance internationale ont initié des projets majeurs pour le développement de l’art chorégraphique au Burkina, Auguste et Bienvenue décident de s’impliquer en proposant des actions permettant de pallier les obstacles qui empêchent à la danse de jouer son rôle dans le changement social. « Faire bouger les choses » à l’échelle locale devient un leitmotiv. En 2006, ils conçoivent Traces, une pièce créée à partir des propositions de trois plasticiens français. Avec ce spectacle, les deux chorégraphes souhaitent sortir la danse contemporaine des murs des centres culturels français de Ouagadougou et Bobo-Dioulasso afin de toucher un public différent. Ils tourneront dans différentes villes du pays, danseront sur des terrains de baskets, des stades de football, des centres culturels de quartiers. Chaque représentation sera aussi l’occasion de travailler avec des jeunes danseurs des villes traversées et d’engager des échanges autour des nouvelles esthétiques chorégraphiques proposées.
Ce désir d’ouvrir la danse contemporaine à de nouveaux acteurs se poursuivra avec la création du projet Engagement féminin. Fruit de nombreux moments d’échanges et de réflexions, le projet porté par Auguste et Bienvenue a des contours bien définis. Cependant, lorsque l’on est jeune et que le projet que l’on porte est ambitieux, les réticences des institutionnels sont nombreuses. « Est-ce qu’ils ont la maturité ? », « Est-ce qu’ils ont cette capacité à faire bouger les choses pour arriver à faire ça ? », tels sont les principales interrogations qui se posèrent parmi les professionnels auxquels les deux chorégraphes adressèrent des demandes de partenariat. Malgré ces réticences, souvent voilées, sur le projet, Auguste et Bienvenue se lancent, engagent les fonds de la compagnie Art’ Dév et en juillet 2008 proposent une première formation d’une semaine destinée uniquement aux danseuses de Ouagadougou. Des affiches sont collées sur les arbres des grandes avenues de la capitale et dans les différents lieux culturels de la ville. Cette première expérience, conçue comme un galop d’essai par les deux chorégraphes, remporte un franc succès parmi les danseuses ouagalaises.
Six mois plus tard, en janvier 2009, est officiellement lancée la première étape du projet Engagement féminin. La formation a lieu au Centre de Développement Chorégraphique – La Termitière de Ouagadougou et regroupe des danseuses originaires de Ouagadougou, de Bobo-Dioulasso, du Ghana et du Mali. (12) Un financement est accordé par le Centre culturel français (CCF) de Bobo-Dioulasso permettant la prise en charge des frais de transports et d’hébergement des stagiaires originaires de cette ville. Le CCF de Ouagadougou ainsi que le Centre de Développement Chorégraphique – La Termitière soutiennent le projet. La création de l’association Wa Tid Saou, à Bordeaux, ville où est installé Auguste, permet d’engager de nouveaux partenariats. Cependant, entre le budget prévu et les subventions obtenues l’écart est important. La première formation, et les trois autres éditions qui suivront auront lieu malgré tout. La mise en uvre de ce projet ambitieux résulte, in fine, d’une prise de risque audacieuse et d’un engagement qui n’attend pas le soutien institutionnel ni la reconnaissance de la valeur artistique du projet mais les provoque.
Le 11 juillet 2011, Bienvenue Bazié et François Bouda, administrateur de la Compagnie Art’ Dév, accueillent les stagiaires du projet Engagement féminin dans la grande salle en plein air de l’Atelier Théâtre Burkinabè (ATB), vaste centre culturel situé à Gounghin et créé par Prosper Kompaoré, figure incontournable du monde des arts au Burkina Faso. Cette année, seize danseuses ont été retenues : sept sont originaires de Bobo-Dioulasso, trois de Ouagadougou, quatre viennent d’Accra (Ghana), une de Lomé (Togo) et une de Niamey (Niger). Aminata Sanou, Mariam Palé et Salimata Wologem, toutes trois bobolaises, participent depuis 2009 au projet. Avec Sena Abigail Atsugah du Ghana, elles sont interprètes de « Dans un s’y mettre », pièce chorégraphiée par Auguste et Bienvenue, présentée à Ouagadougou en décembre 2010 lors des Rencontreschorégraphiques Dialogues de Corps et dont la tournée en France est prévue aux cours des mois suivants (13).
Parmi les autres stagiaires, plusieurs ont vu cette pièce et ont été profondément touchées. Certaines viennent découvrir le projet avec l’espoir d’être « retenues » pour une éventuelle production. Si toutes ont plusieurs années d’expériences dans divers arts de spectacle, les niveaux de formation en danse de chacune sont hétérogènes. Certaines sont initialement comédiennes, d’autres spécialistes des danses dites « modernes », tandis que les stagiaires ghanéennes étudient la danse à l’Université. L’univers de la formation est connu de toutes ; cependant la moitié d’entre elles n’ont jamais participé à un stage si long. Si cette hétérogénéité constitue une contrainte importante pour les formateurs, elle témoigne aussi du sens donné à ce programme de formation par Auguste et Bienvenue. Ainsi explique ce dernier :
Ici, l’intérêt du cadre, ce n’est pas d’avancer avec celles qui peuvent avancer mais c’est de faire bouger tout le monde, de faire avancer tout le monde. Ça veut dire que si mon niveau est très bas, à la fin, on sent que j’ai fait un pas en avant
Et je me dis « les choses ont changé en moi, je suis venu ici, je repars avec quelque chose ». À la fin du stage, l’important est de se rendre compte qu’elles repartent toutes avec un sac bien rempli.
L’enjeu n’est pas ici d’apprendre à « bien » danser mais plutôt chercher à « déclencher des choses » dans le corps et l’esprit des stagiaires, ouvrir de nouvelles « façons de voir », donner des outils permettant de s’affirmer en tant que créatrices plutôt que de transmettre des chorégraphies clef en main. Ce cadre singulier, où l’attention des formateurs se pose sur chacune des danseuses et non uniquement sur celles qui seraient les plus performantes, constitue l’une des lignes de force du projet. Konouba Traoré, qui participe pour la première fois à une formation longue en danse contemporaine, le fera remarquer lors des échanges qui viendront clôturer cette troisième édition.
Il y a un truc qui m’a beaucoup marqué. Au Burkina ici, c’est Auguste et Bienvenue qui ont pensé à leurs surs. Ils se sont dit « il faut former nos surs pour qu’elles puissent devenir quelqu’un un jour, dans ce qu’elles ont choisi de faire ». Moi je connais quelques chorégraphes ici, eux, [
] ils trientles gens pour travailler ! Ils ne peuvent pas prendre des débutants. Mais Engagement Féminin n’a pas trié les gens !
Ce souci d’équité sinon d’égalité et de respect vis-à-vis des propositions chorégraphiques de chacune des participantes permet de faire de l’espace de formation un lieu où l’on ose s’exprimer, où l’on acquiert confiance en soi et où l’on développe de nouvelles ambitions. Ainsi explique Kadi Kouyaté, jeune chanteuse et comédienne originaire de Bobo-Dioulasso qui est « entrée » dans la danse il y a peu de temps :
Moi, je ne croyais pas que je pouvais faire certains mouvements. Je ne m’attendais pas à ça. Je croyais que j’allais vraiment souffrir, parce qu’on n’a pas l’habitude de faire certains mouvements, oser. Mais ici, on ose tout, surtout pendant les improvisations. Il y a des mouvements qu’on n’avait jamais faits [
]. Avec les techniques qu’ils nous donnent, on apprend vite les pas. Et on apprend aussi à se connaître, à connaître son corps, à maîtriser la scène, les directions. C’est un très grand avantage pour nous, les filles. Surtout pour nous qui rentrons dans la danse maintenant. Ça va nous aider à croire en nous.
Une des façons de les encourager à croire en elles-mêmes est de contourner les relations hiérarchiques liées à l’âge, la compétence ou la réputation et mettre en avant la richesse des expériences et les potentiels artistiques divers de chacune. Dans ce contexte, on essaye de transformer les rapports d’autorité entre maîtres et élèves ou entre aîné(e)s et cadet(e)s en relations de confiance pour inviter chacune à s’exprimer sur le plateau, donner ses impressions sur les modalités de transmission ou encore évoquer ses difficultés.
Du 11 juillet au 2 août 2011, quatre danseurs chorégraphes assureront successivement le rôle de « formateur » durant cette troisième édition du programme Engagement Féminin. Bienvenue Bazié et Auguste Ouédraogo seront les premiers. Ousséni Sako, danseur interprète au sein de la compagnie Salia nïSeydou mais aussi chorégraphe (14), ayant l’habitude d’enseigner, notamment en France, poursuivra le travail. Lacina Coulibaly, danseur chorégraphe au sein de la compagnie Faso Danse Théâtre et professeur de danse dans plusieurs universités américaines (15), viendra conclure le programme. Amis de longue date, les quatre artistes ont collaboré sur différents projets avant de s’investir dans des cheminements artistiques personnels. Ils restent cependant liés par une forte complicité et par des réflexions communes sur la danse et plus spécifiquement sur les savoirs à acquérir pour accéder au statut de danseur professionnel. C’est cette palette de savoir, qui dépasse largement le domaine des compétences techniques stricto sensu, que chacun, à sa manière, s’attachera à transmettre aux seize danseuses.
Le premier apprentissage relève d’un « savoir être » professionnel. Il se décline sous différentes formes : l’endurance, la rigueur, la régularité et le sérieux. Concrètement Engagement féminin, c’est en effet de longues journées de travail structurées où l’échauffement et l’apprentissage de chorégraphie alternent avec de longs moments d’improvisations en solo ou en groupe, un travail de recherche personnel ou collectif et des temps consacrés aux échanges verbaux. Hormis le dimanche, chaque jour est entièrement dédié au travail du corps mais aussi à la réflexion sur l’acte de création. Les stagiaires doivent être concentrées, actives et engagées tout au long des six heures de formation quotidiennes. Tandis que la plupart des stages de formation en danse proposés aux danseurs burkinabè excèdent rarement quinze jours (16), cette configuration longue, souligne Bienvenue, vise à une professionnalisation qui va au-delà de la discipline :
Apprendre à travailler, à prendre du temps pour faire les choses. Ce n’est pas seulement la durée en nombre de jours mais aussi la durée en heures de travail. Plus tu prends d’heures, plus tu as le temps d’expérimenter les choses, plus le corps a le temps de prendre les choses, de les enregistrer et de les amener ailleurs.
La durée de la formation ainsi que son caractère intensif constituent un point fort de la formation. Comme l’explique Lacina Coulibaly aux stagiaires :
Il faut aussi apprendre à dépasser la fatigue. Pouvoir travailler 5 heures, 6 heures et aller à 7 heures ou à 8 heures, c’est un autre niveau. Vous amenez le corps à se surpasser. Et en danse c’est déjà un acquis.
Apprendre à être endurante, à surpasser la fatigue ou la douleur est dans le cadre de la formation couplée à l’apprentissage de la rigueur et de la concentration. Arriver à l’heure le matin et commencer à s’échauffer, apprendre à être assis et regarder attentivement les autres danser, apprendre à écouter les consignes et remarques des formateurs même si on n’est pas directement adressé constituent la base d’un « savoir être » danseur professionnel à acquérir. Avoir le temps et l’espace pour cette acquisition n’est pas évident – il faut aussi développer un « savoir s’organiser » par rapport aux exigences de l’environnement social et familial, souvent hostile à l’idée que l’on puisse choisir la danse comme métier. La réalisation de ce choix requiert une détermination très forte. Travailler à plein-temps dans un domaine qui n’est pas reconnu comme « un métier comme tous les autres » ni par l’état burkinabè, ni par la majorité de la population, demande alors une endurance physique, mais aussi sociale et morale.
Le second axe de compétences transmises durant Engagement féminin est d’ordre technique. Il concerne l’apprentissage de nouvelles techniques du corps, inconnues de certaines stagiaires. Les mouvements au sol, les tours, les portées ainsi que le travail autour des appuis figurent parmi les savoir-danser transmis. À travers l’apprentissage de phrases chorégraphiques proposées par chacun des formateurs, les stagiaires sont progressivement amenées à incorporer ces mouvements nouveaux et à les réaliser avec le plus de précision et de conscience. Ainsi, ce sont d’autres manières d’utiliser son corps qui se dessinent pour certaines apprenties. Elles sont encouragées à « oser » et faire « ce que l’on n’a pas l’habitude de faire ». Cet apprentissage est complété par la transmission d’autres savoirs comme « l’écoute » ou « la présence », savoirs essentiels pour transmettre des émotions au public.
Cependant, malgré l’importance de l’acquisition de ces savoir-faire techniques, Auguste et Bienvenue, tout comme Ousséni et Lacina, mirent l’accent durant cette formation sur l’importance de la ré-interprétation personnelle des mouvements transmis et in fine sur l’acquisition d’une créativité individuelle. Ainsi, durant de longues heures, les stagiaires furent amenés à déconstruire les chorégraphies apprises, à les faire évoluer dans le temps et dans l’espace, en solo ou en groupe. Ce travail débuta dès la première semaine de la formation lorsque Bienvenue demanda aux apprenties de faire un usage personnel de la « matière » d’une phrase chorégraphique qu’il venait de leur transmettre. Placées en cercle sur l’espace scénique, les danseuses venaient tour à tour au centre du cercle pour proposer une interprétation personnelle de la chorégraphie. Sans rester hermétiques aux mouvements des autres stagiaires, elles se mirent à l’écoute des autres propositions chorégraphiques afin d' »être seul mais avec tout le monde » pour reprendre les mots de Bienvenue. Durant la deuxième semaine, ce travail sera poursuivi avec Ousseni Sako qui proposera aux danseuses de construire collectivement une chorégraphie à partir des différents mouvements précédemment transmis. Tandis que Bienvenue avait proposé une matière chorégraphique avec des mouvements de coudes et d’épaules prononcés dans un style « cassé-cassé », selon l’expression de Sena Abigail, Ousséni mis l’accent sur des mouvements ondulatoires centrés sur la colonne vertébrale.
Durant la deuxième semaine, les participantes, scindées en deux groupes, ont élaboré ensemble une chorégraphie d’une dizaine de minutes. Au-delà du travail de composition personnelle, c’est le processus de création collective que les stagiaires avaient ici à appréhender. Ce travail collectif fut perçu comme particulièrement difficile mais important, car : « si tu danses en groupe tu dois te brancher ; quand on est branché sur scène c’est quand les gens peuvent sentir ce qu’on est en train de faire ; si tu ne te branches pas, les gens ne sentent rien (17) ». Cette relation avec les autres sur scène, soulignée par Sena Abigail, n’est pas toujours facile à créer. Ainsi explique Kadi Kouyaté, suite à cette expérience :
Ça a chauffé ! On se fâche, on se calme, on se fâche, on se calme ! Si c’est un travail de groupe, ce n’est pas toi seul qui dois décider. Même si tu es fâché, tu vas te retenir. Même si on ne va pas prendre le mouvement que tu as proposé, tu vas suivre. Un mouvement qu’on a pris qui n’est pas de toi, tu peux le suivre aussi. Après, vous pouvez discuter de ça avec les chorégraphes. Moi je trouve que le travail de groupe c’est vraiment difficile surtout avec les filles. Mais, on arrive quand même à se supporter, à surmonter ça.
Parvenir à surmonter sa colère, ses rancunes et chercher à faire avancer le travail de groupe plutôt que sa propre élaboration chorégraphique constituent, aux dires des participantes, un ensemble de savoirs particulièrement complexe à acquérir surtout dans un contexte social où le respect envers l’autre est articulé non seulement aux hiérarchies entre hommes et femmes mais aussi à la séniorité et au pouvoir de décision défini comme appartenant à l’aîné. Dans ce contexte les négociations entre femmes peuvent être plus difficiles car moins déterminées par une obligation à un consentement ou à un silence respectueux. Dès lors, savoir renégocier le respect et trouver un consensus sans avoir une position prédéterminée dans le groupe est une compétence qui, une fois acquise, déborde largement le cadre de la création chorégraphique. Apprendre à connaître l’autre et anticiper ses réactions, savoir contrôler son corps et ses paroles, constituent un stock de connaissance essentiel dans de nombreuses situations. Salimata Wologem, aura réussi à l’acquérir au cours de sa participation aux différentes formations d’Engagement Féminin. Ainsi, Salimata qui, selon ses propres mots, avait auparavant « un gros cur » et se fâchait facilement connaît désormais :
La patience et la confiance. Maintenant si quelqu’un est fâché, je vais rentrer et je me calme. Tout ça c’est grâce à Engagement Féminin. Ce n’est pas la danse seulement. C’est beaucoup de choses.
Durant la dernière semaine de formation, Lacina poursuivra ce travail de création à la fois en solo et en groupe en amenant les stagiaires à affiner leur proposition en leur soumettant des directions de travail précises et nuancées, surtout au niveau du tempo et de la musicalité. Il explique par ces mots les acquis de ce travail basés sur l’improvisation :
Maintenant, quand tu leur demandes de faire un solo, chacune fait ses recherches, tu vois que tu n’as pas beaucoup de choses à dire. Alors qu’avant, elles attendaient qu’on dise « fais ça, fais ça, fais ça ». Maintenant, tu as seulement à dire « est-ce qu’ici, tu peux ralentir un peu, tu peux doubler, tu peux aller plus vite ». On n’a peu de choses à dire, avant il fallait leur montrer comment il faut faire mais maintenant, elles savent quoi faire.
Apprendre à explorer, à proposer des mouvements et au final « savoir créer » une chorégraphie personnelle constitue l’une des ambitions principales des formateurs. Ce « savoir créer » est aujourd’hui un savoir indispensable au danseur désireux d’entamer une carrière. En effet souligne Bienvenue,
Aujourd’hui, l’interprète doit aussi être un créateur. Il n’exécute plus. Avant, on arrivait et le chorégraphe te disait « fait ça, fait ça ». Mais aujourd’hui c’est différent. Aujourd’hui, les chorégraphes qui sont comme ça, sont peu nombreux.
Dès lors, ce qu’ Engagement Féminin propose c’est l’acquisition de ce « savoir oser » indispensable à la mise en uvre du « savoir-créer ». L’important pour Auguste Ouédraogo et Bienvenue Bazié mais aussi pour Ousséni Sako et Lacina Coulibaly était de faire naître ce désir d’exploration personnelle chez les participantes mais aussi de leur fournir des outils permettant de faire grandir ses recherches chorégraphiques et enfin les réaliser dans le cadre de leurs propres compagnies ou projets. Le 2 août 2011, tandis que la troisième édition d’Engagement Féminin touchait à sa fin, Lacina Coulibaly prit la parole ému pour exprimer sa joie d’avoir participé à cette formation et pour inciter toutes les participantes à avancer, poursuivre leur engagement dans la danse afin de « ne pas s’arrêter au cours du chemin ».
Une semaine avant la clôture de la troisième édition d’Engagement Féminin une discussion publique avait été organisée autour d’un film documentaire sur la trajectoire exceptionnelle de la « Danseuse d’Ébène (19) » Irène Tassembedo. Cette dernière, qui s’est imposée dans le champ artistique en faisant valoir son esprit créatif et dans le même temps ingénieusement entrepreneurial, avait questionné la démarche du projet dirigé par Auguste et Bienvenue en remarquant qu’avec une équipe d’enseignants composée exclusivement d’hommes, les organisateurs avaient plutôt fait « un pas en arrière » plutôt qu’avancer sur la voie de rapports égaux où tout au moins équitables entre hommes et femmes. Cette critique ne fut pas contestée par les initiateurs du projet, qui ont simplement tenu à souligner qu’il « fallait bien que quelqu’un commence ».
Au-delà de l’anecdote, l’interrogation sur l’évolution des relations de genre dans le domaine de la danse contemporaine en Afrique de l’Ouest et le rôle joué par Engagement Féminin sur ces dynamiques dépasse largement le cadre des acteurs immédiatement impliqués dans le projet à l’échelle locale. La question est, en effet, imbriquée à des relations de pouvoir à d’autres échelles, notamment les forces économiques et institutionnelles qui soutiennent et structurent le champ de la danse contemporaine au Burkina Faso et dans la région. En effet, si le « manque de femmes » avait été souligné à Bamako lors de l’édition 2010 de Danse l’Afrique Danse, les acteurs impliqués de longue date dans cette biennale n’ont pas dû être étonnés. Déjà à Tunis en 2008, la faible représentation des femmes chorégraphes avait été évoquée et des conclusions auraient pu être tirées. Auguste et Bienvenue qui, en 2008, posaient les jalons du projet Engagement Féminin à Ouagadougou, avaient dans le même temps pensé à l’intégration du projet dans le cadre de cette biennale prestigieuse. Leur volonté était, d’une part, d’organiser une formation de deux semaines à Bamako, avec des danseuses maliennes, et de restituer le travail réalisé durant ce stage dans le cadre du festival. D’autre part, ils souhaitaient y présenter la pièce élaborée par les stagiaires d’ Engagement Féminin de Ouagadougou. Bien que ce projet, adressé aux organisateurs responsables du festival à Bamako, ne fût pas rejeté, il ne fut finalement pas réalisé par « manque de moyens » de la part de la biennale.
De cet épisode, on peut conclure que la force du projet Engagement Féminin consiste avant tout dans l’endurance des initiateurs qui sont parvenus à créer un espace à la marge des plateaux de rencontres établis par les grandes organisations et agences de coopération opérant à l’échelle internationale. Entre 2011 et 2012, le projet a considérablement diversifié sa géographie des échanges artistiques mais aussi celle des sources de financement. Après avoir réalisé une tournée en France avec Dans un s’y mettre, la première pièce issue directement du projet, les danseuses d’Engagement Féminin se sont rendues aux États-Unis pour faire une représentation à Yale. Dans la continuité de cette tournée outre-Atltantique, le support majeur de l’édition 2012 du projet est venu du continent américain. Avec le soutien de New York Arts Foundation la Compagnie, Auguste-Bienvenue a pu faire venir des États-Unis Nora Chipaumire et Cynthia Oliver, deux chorégraphes de renommée internationale qui questionnent dans leurs créations les stéréotypes attachées à la culture « noire » et africaine. En outre, via une coopération artistique avec la compagnie Kemi Contemporary Dance Projects au Canada une troisième chorégraphe, Jennifer Dallas, accompagné par son assistante Joanie Audet, a traversé l’océan pour venir partager son enseignement pendant cette quatrième édition d’ Engagement Féminin, qui s’est déroulée à Ouagadougou du 2 au 28 juillet. Enfin, une quatrième artiste, Claudia Damasio, originaire du Brésil mais résidant en France, a fait le chemin de Paris à Ouagadougou pour compléter l’équipe d’enseignantes, cette fois-ci composée exclusivement de femmes.
Il convient enfin de souligner que cette quatrième édition ne fut pas uniquement dictée par les lois d’une économie culturelle désormais globalisée. Hormis l’implication de nouveaux partenaires financiers, il a aussi fallu un engagement fort de la part des artistes impliqués. En effet, la curiosité et l’envie de découvrir le monde de la danse contemporaine au féminin au Burkina Faso ont motivé la venue des quatre chorégraphes formatrices à Ouagadougou. Pour Nora Chipaumire, qui est mariée à un danseur-chorégraphe burkinabè, il ne s’agit pas de son premier séjour au Burkina Faso. Elle connaît bien la scène locale ce qui lui permet d’apporter de nombreux conseils aux stagiaires. Les trois semaines que ces dernières passent avec Nora laissent une forte impression car elle n’enseigne pas seulement les danses de sa région d’origine mais s’attache à transmettre le sens et le pouvoir que ces danses peuvent acquérir pour les femmes dans le cadre de la lutte pour la reconnaissance de leurs droits. Mariam Traoré, danseuse avec une longue expérience dans les genres « traditionnels » et « modernes », a été marqué par l’esprit combatif de Nora :
Nora, elle est spéciale, très forte et elle travaille comme un homme ! Elle nous a conseillé de toujours nous battre. Il faut faire ce que tu veux vraiment faire et il faut le faire à fond !
Cynthia Oliver, qui en marge de sa carrière artistique occupe un poste de professeur associé en danse à l’université d’Illinois a, quant à elle, provoqué d’intenses discussions sur les différentes pratiques de danses qui se côtoient à l’échelle locale. Pendant son cours elle a ainsi engagé une longue discussion sur les significations que chacune des participantes attribue aux genres dits « traditionnels » et « contemporains ». Ces échanges, enrichissants en termes de recherche identitaire, furent aussi appréciés dans leurs aspects pratiques et presque littéraux, comme l’explique Sena : « Nora, Cynthia et les autres nous ont montrés comment utiliser le traditionnel pour créer du contemporain. »
Les trajectoires et motivations des femmes participant au projet Engagement Féminin sont très diverses et on ne sait où cette expérience les mènera. Néanmoins, pour toutes les stagiaires, l’important est de continuer dans la voie professionnelle choisie. Pour Sena ce n’est même plus une question de choix : « Je suis allée trop loin pour retourner en arrière ». Auguste et Bienvenue sont eux aussi décidés à ne pas s’arrêter en chemin. Les prochaines éditions sont déjà envisagées et la formule évoluera certainement vers d’avantage de moments de création en combinant le stage avec des espaces de résidences. Dans cette perspective, la diversification des ressources économiques sera poursuivie afin de permettre aux chorégraphes d’accéder à plus de « marge de manuvre ». Cette ouverture vers de nouveaux espaces se déclinera aussi du côté des publics nouveaux que les chorégraphes espèrent toucher.
Lors de la dixième édition des Rencontres chorégraphiquesDialogues deCorps qui a eu lieu du 4 au 22 décembre 2012 à Ouagadougou et à Bobo Dioulasso, le projet Engagement Féminin était présent avec deux pièces très différentes, mais toutes deux issues de cette formation. Chambre Noire, tout d’abord, pièce créée en collaboration avec Valérie Rivière directrice de la Cie Paulles Oiseaux et interprétée par Salimata Kobré, Sena Abigail et Salimata Wologem. Cette pièce met en scène trois femmes dans un espace abstrait et isolé. Ici ce sont des états émotionnels, en particulier l’ennui et l’attente qui donne corps aux images chorégraphiques. La deuxième pièce intitulée Zouhan (20), conçue par Bienvenue Bazié assisté par Auguste Ouédraogo et interprétée par la danseuse-chanteuse Mariam Palé et le conteur Kientenga P. Gerard. À l’opposé de l’univers intimiste de Chambre Noire, Zouhan est conçu comme un spectacle familial et participatif. Inspiré de témoignages recueillis auprès de griots originaires de l’Ouest du Burkina, la pièce est ancrée dans le contexte local. Le spectacle ne s’adresse pas seulement aux adultes, mais aussi aux enfants et pourra être joué en extérieur, hors du monde clos des salles de théâtre.
Pour que les germes du projet Engagement Féminin grandissent, il faudra que les chorégraphes s’appuient non seulement sur la création mais aussi sur une démarche de transmission plurielle, pour rejoindre les efforts réalisés par d’autres acteurs qui s’investissent pour la reconnaissance du statut de danseur professionnel à l’échelle nationale. Citant l’exemple d’Irène Tassembédo, la création d’une école de danse à soi représente pour beaucoup de danseuses ayant suivi le projet une voie professionnelle dans laquelle elles souhaiteraient s’engager. Cette voie vise à aller au-delà du domaine artistique stricto sensu pour toucher d’autres domaines de la vie sociale et culturelle. Transmettre à des publics divers, des danseurs professionnels mais aussi des enfants des quartiers, des adultes amateurs, des touristes occidentaux, et ouvrir l’univers de la danse contemporaine sur d’autres horizons, telle est en définitive l’ambition de plusieurs des participantes de ce programme. Cette vision exprime un désir d’intégrer la danse contemporaine, souvent conçue comme une forme artistique occidentale importée ou imposée en Afrique pour des raisons plutôt politiques qu’artistiques, à des stratégies multiples dans l’espoir de trouver sa place, de réussir et in fine construire un projet de vie dans l’univers cosmopolite des villes africaines contemporaines. Ce désir, nourri par Engagement Féminin, renvoie à ces paroles de Comfort, danseuse ghanéenne participant en 2011 au programme : « qui n’a pas dansé, n’a pas vécu » (who has not danced has not lived !).
1. Il s’agissait des deux chorégraphes malgaches Julie Iarisoa (Cie Anjorombala) et Harimalala Angela Rakotoarisoa (Cie Soranihafa).
2. La journaliste Séverine Kodjo-Grandvaux évoque à ce titre « un manque de femme » et le « regret » du jury face à cette faible participation des artistes féminines. Cf : « À Bamako, la biennale de la danse récompense l’audace », Jeunes Afrique, 4 novembre 2010 [ici]
3. Sophie Renaud, directrice du département échanges et coopérations artistiques de l’Institut français (ex-CulturesFrance) déclare à ce propos « Nous avons été attentifs à cela [la représentation des femmes]. Parmi les quelque 250 candidatures reçues, il y avait plus de propositions féminines que lors des précédentes éditions. Elles étaient aussi plus nombreuses à avoir intégré des compagnies » in Jeunes Afrique, 15 octobre 2012 [ici]
4. Lors de cette neuvième édition, la forme du concours a été abandonnée pour laisser la place à une programmation conçue comme « un état des lieux de la danse en Afrique aujourd’hui » (Agnès Izrine in Danse l’Afrique Danse ! 9th edition-Programme).
5. La journaliste Séverine Kodjo-Grandvaux qui évoquait en 2010, « un manque de femmes », remarque en 2012 qu’elles étaient « davantage représentées » mais regrette néanmoins que « toutes les artistes femmes n’étaient pas à la hauteur de l’événement ». (S.Kodjo-Grandvaux, « Une biennale au féminin » in Jeunes Afrique, 15 octobre 2012 [ici]
6. Sanou Salia (2008), Afrique, danse contemporaine, Paris, Cercle d’art/Centre national de la Danse.
7. Germaine Acogny inaugura L’École des Sables à Toubab Dialaw en 1998. L’École de danse internationale Irène Tassembédo (EDIT) ouvrit ses portes en octobre 2009 à Ouagadougou.
8. À ce titre, la pièce Afro-Dites/Kaddu Jigeen, conçue par Germaine Acogny en collaboration avec son fils Patrick fait figure d’exception en mettant en scène huit danseuses qui expriment les paradoxes et contradictions de la vie quotidienne des jeunes femmes sénégalaises.
9. Cf : « Je travaille sur la pesanteur, l’hypocrisie sociale que je ressens », Entretien d’Ayoko Mensah avec Fatou Cissé, Dakar-Juin 2005, Africultures n°64 [article 3938]
10. Si d’une manière générale, le métier de danseur peine à être reconnu comme une profession à part entière sur le continent, le statut de danseuse est encore plus problématique. Dans un contexte où la danseuse est fréquemment assimilée à une prostituée, choisir la danse comme métier va de pair avec un risque d’exclusion sociale.
11. Nous tenons à remercier chaleureusement Bienvenue Bazié et Auguste Ouédraogo pour leur accueil bienveillant durant les éditions 2011 et 2012 d’Engagement Féminin. En acceptant notre présence durant l’intégralité de la formation, ils nous ont permis d’appréhender de l’intérieur la complexité de cette formation et des enjeux qu’elle sous-tend. Nos remerciements vont aussi aux danseuses d’Engagement Féminin qui ont accepté de partager avec nous leurs questionnements sur le métier, leurs difficultés et leurs espoirs mais aussi l’intimité de leurs trajectoires individuelles.
12. Cf. [ici]
13. Salamata Kobré, jeune danseuse ouagalaise est, elle aussi, interprète dans la pièce. Sa participation au programme de formation Je danse donc je suis proposé par le Centre de développement chorégraphique de Ouagadougou l’empêchera de participer à cette troisième édition.
14. Ousséni Sako a notamment crée en 2004 un solo, très remarqué, intitulé Sindi, shut up.
15. Lacina Coulibaly est notamment professeur invité en danse africaine (traditionnelle et contemporaine) à Yale University. Il enseigne également à Brown University et mène différents projets de création avec des étudiants de Cornell et de Gainesville University (Etats-Unis).
16. Les stages de formations professionnelles proposées par le CDC-La Termitière sont généralement d’une durée de quinze jours tout comme les formations proposées dans le cadre des Rencontres chorégraphiques Dialogues de corps. La formation Je danse donc je suis proposée elle aussi par le CDC, en partenariat avec le centre de formation bamakois, L’Espace Donko Seko, dirigé par Kettly Noël, fait exception à cette règle. L’apprentissage s’y déroule, en effet, sur trois années complètes. Notons, en outre, que les formations proposées par l’École des Sables de Toubab Dialaw (Sénégal) se déroulent sur plusieurs mois..
17. « If you are performing in group you have to connect; so when you connect on stage that’s when people get to feel what we are doing ; if you don’t connect, people don’t feel » (Sena Abigail, 1.8.2011).
18. Où vers ? est le titre d’une pièce de la compagnie congolaise Baninga créée en 2011 et présentée notamment lors du festival Danse l’Afrique Danse 2012 à Johannesburg. Dans Où vers ?, le chorégraphe Delavallet Bidiefono interroge la condition des femmes d’Afrique et révèle une figure féminine qui sait « être centrale sans être dominatrice » (Cf : note d’intention du spectacle in Danse l’Afrique Danse ! 9th edition-Programme ».)
19. Un documentaire du même titre a été réalisé par Seydou Boro en 2002.
20. Zouhan signifie la parole en lyélé, l’etnie de Bienvenue Bazié.///Article N° : 11290