Et si on revenait au pays ? Les films foisonnent sur les difficultés du départ, les duretés de la route, les galères à surmonter une fois arrivés dans l’Eldorado européen, mais peu s’intéressent à ceux qui ont pris le chemin du retour. Film en sortie France le 10 novembre 2021.
C’est sur des documents sur les dangers des traversées que début le film de la Camerounaise Mary-Noël Niba, chargée des relations publiques à l’Ambassade du Cameroun à Paris : naufrages, morts sur les plages, sauvetages dramatiques en pleine mer. Son film est clairement un plaidoyer pour le retour. Il groupe ainsi les témoignages de Stéphane, Léo et Cheikh qui regrettent d’avoir quitté le Cameroun ou le Sénégal, n’ayant pas trouvé mieux ailleurs, et ont choisi de revenir. Et même le jeune rappeur Guy Roméo Amougou, parti du Cameroun pour y rencontrer à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) son idole, le rappeur Mac Tyer, est encouragé à rentrer, lui qui a mis trois ans pour parvenir à Marseille via le Maroc et Melilla, et reste traumatisé de ce qu’il a dû vivre. « Est-ce que c’est un rêve réel ? » demande Mac Tyer alors que Guy Roméo aurait voulu faire une carrière semblable à la sienne.
La difficulté n’est pas seulement économique mais aussi affective : reprendre le chemin du Continent implique d’en repenser la positivité, l’espoir de pouvoir y faire sa vie et s’y réadapter, se débarrasser de l’illusion de l’Eldorado. Il s’agira aussi de rentrer affronter la honte de l’échec, voir les dettes prises par la famille pour le voyage, et se retrouver stigmatisé. Le film se fait dès lors appel au courage.
Du courage, il en a fallu à Aïssatou Gaye, qui fut envoyée comme travailleuse dans les champs espagnols par le gouvernement sénégalais dans le cadre d’un accord bipartite, et s’est retrouvée exploitée sans pouvoir économiser quoi que ce soit. Pour tous, l’exil s’est révélé être un piège dont il est difficile de se défaire. Il manque cependant l’exploration réelle des conditions qui les ont fait partir, si bien qu’ils ressortent comme taxés d’aveuglement, comme s’ils n’avaient agi que mus par une grande naïveté. A cela s’ajoute une forme documentaire volontariste au discours préétabli. On ne saurait cependant que lui donner raison : « Le combat pour l’Afrique, c’est en Afrique qu’il faut le mener », commente Mary-Noël Niba. Et vu que beaucoup ont pu profiter de formations qui seraient utiles sur place : « il faut un mouvement qui incite au retour, mais ce mouvement ne doit venir que de nous-mêmes » – ce qui pose la question des structures et activités d’accueil et de réinsertion.