Le retour du Soldat du flow

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Déjà remarqué pour un premier album La parole est une arme et le projet Waga 3000 avec Art Mélody, Joey le soldat a affiné son trait avec Burkin Ba, sorti en février dernier.

« Jusqu’à quand nos dirigeants vont-ils nous traire comme des vaches? » s’interrogeait Joey le Soldat dans le texte « Panan sidye », issu de son premier album La parole est une arme. Cette phrase donne le ton de l’univers de ce rappeur ouagalais à la plume rendue féroce par les désillusions d’une jeunesse laissée à la marge de « Ouaga 2000 », le quartier aisé de la capitale burkinabé. Son patronyme de soldat il l’a gagné au champ d’honneur de son grand-père tirailleur burkinabé et de son père combattant pour l’Indépendance du pays des hommes intègres. Étudiant en lettres modernes sans emploi, comme beaucoup de jeunes du pays, Joey s’est nourri des idéaux de Thomas Sankara et du journaliste, assassiné en 1998, Norbert Zongo. Avec Burkin Bâ il signe une œuvre plus mûre sur le fond et la forme. La pochette évoque agréablement l’esthétique des disques de Jazz du label Blue Note: « J’ai fait l’album dans des circonstances meilleures que le premier » explique le Soldat.« J’ai enregistré en France dans un bon studio. Les beatmakers Redrum, DJ Form, 76’os issus du label bordelais Tentacule records m’ont envoyé leurs instrus. J’écris en permanence. Je me suis adapté sur leur beats. » L’auditeur est interpellé par ce clash musical percutant entre des textes déclamés en mooré, la langue du plateau de Ouagadougou, et des plages instrumentales Electro très occidentales. C’est ce qui fait l’originalité de cet album singulier, mixé par le californien Dave Cooley, connu pour son travail avec le label Hip Hop Stones Throw.
Unité des rappeurs africains
L’album est aussi panafricain par le choix de ses invités. Sur « Tampoco » un titre pour dénoncer les mariages forcés en Afrique il y a un featuring avec une rappeuse de Guinée Conakry Anny Kassy: « Cela symbolise l’unité africaine de rappeurs de pays différents qui partagent le même combat. Le mariage forcé reste une triste réalité sur le continent. » Sur un autre titre pour le moins explicite « Révolution » Joey a convié Elom 20ce
, rappeur bien connu de la scène urbaine togolaise: « C’est un activiste. On s’est vus au Burkina où il avait rejoint un mouvement de pétition pour la libération de Mumia Abu Jamal ». Côté français le rappeur Fils du béton a posé son flow sur « Question d’honneur ».

L’enfant de Tanghin, un quartier chaud des faubourgs de la capitale, insiste sur les fondamentaux liés à la terre et à l’agriculture, avec un morceau, sans doute le plus marquant de l’album: « L’hivernage » « C’est une manière d’encourager les paysans de chez moi. Ces derniers temps les saisons ont été mauvaises. Il ne pleut pas. Dans ce titre j’invoque la pluie comme nos ancêtres pour que les récoltes soient bonnes. C’est une chanson d’espoir. Au cœur du soleil ardent on croit que la pluie peut quand même arriver! » Dans un autre titre « DMD », tourné dans une ferraille, il lance un cri de rage: C’est l’expression de la jeunesse du ghetto de tous les jeunes d’en bas dont on a coupé les ailes » Pour autant le Soldat ne désespère pas. S’il sait que la route est longue il entend bien persévérer: « Je compte continuer à sortir de meilleurs albums rap et un jour être assez autonome pour pousser d’autres talents, des petits frères à émerger. » D’ores et déjà, le Soldat de la rime est attendu sur les scènes françaises d’avril à fin juin, avec une date parisienne à l’occasion du festival Trois,6 neuf le 17 mai prochain.

Le site de l’artiste : http://joeylesoldat.bandcamp.com////Article N° : 12162

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© Tentacule records





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