Lola est jolie, 25 ans, postière à New York et passionnée de danse. Son meilleur ami, Youssef (Achmed Akkabi), est égyptien et lui montre les cassettes de son idole, la légendaire danseuse Ismahane (Carmen Lebbos). Tombée amoureuse d’un autre Egyptien, le beau Zack (Assad Bouab), elle fait le voyage du Caire pour le retrouver. Mais ça ne marche pas mieux qu’à New York, et la voilà à devoir gagner sa vie, ce qu’elle fait dans les cabarets en dansant avec le succès exotique de ses cheveux blonds. Elle retrouve Ismahane qui vit recluse et arrive à la convaincre de la prendre comme élève
Musique, danse et scénario à rebondissements : Nabil Ayouch fait un film populaire, entraînant et flamboyant dans les scènes de danse dont certaines (le mariage) évoquent Bollywood. Lola développe une telle énergie pour arriver à ses fins qu’elle finit toujours pas l’obtenir, ce qui fait le titre du film et du show qu’elle ramènera à New York de son expérience égyptienne. Elle arrivera ainsi à convaincre la ténébreuse Ismahane de sortir de sa prison intérieure. Elle est par contre moins heureuse en amour où le volontarisme est moins payant que dans la maîtrise de la danse orientale. On notera d’ailleurs que Nabil Ayouch, qui a choisi la jeune Laura Ramsey parmi 300 candidates, a finalement pris la seule à ne pas être danseuse. Elle dut travailler intensivement la danse du ventre durant six mois à Casablanca avant le tournage.
Le pari de Nabil Ayouch est bien sûr d’amener ainsi une jeune Américaine à se passionner pour la culture arabe, à l’encontre des peurs actuelles mais sur la base du cliché occidental de la sensualité. En enrichit-il le contenu ou même le critique-t-il ? La vision de Lola reste bien caricaturale, sans réel rapport avec les jeunes Egyptiens et la vie sociale du pays, mais elle est foncièrement positive et surtout ouverte à une rencontre déjà concrétisée à New York avec Youssef. Lorsque le Caire défile en sens inverse quand elle va reprendre son avion, ce n’est plus la même ville qu’elle regarde. C’est elle qui aura ouvert Ismahane à la vie : en reprenant ainsi le vieux schéma hollywoodien de l’Américain(e) qui aide l’Africain à franchir un pas, Ayouch triture en fait le spectateur occidental là où le bât blesse car le personnage de Lola reste foncièrement extérieur à ce monde. Elle le manipule par la force érotique de son altérité mais ne se départit jamais de sa confondante naïveté. Elle comprendra en fait vite que sa vie est ailleurs et qu’il faut laisser les gens vivre à leur façon. Un vrai programme politique.
A la première mondiale du film au festival de Dubaï, des voix n’appréciaient guère cette donneuse de leçon américaine et l’ouverture ainsi manifestée par le réalisateur marocain à qui l’on conseillait de plutôt consacrer ses films aux problèmes du monde arabe. Réflexe grégaire qui ne percevait pas le potentiel explosif d’un film de facture grand public qui propose ainsi de comprendre l’Autre et d’y aller voir sur place. Ce n’est pas révolutionnaire, c’est simplement une voix du Sud qui met les points sur les « i ». Et en profite pour rappeler qu’en tout pays des gens opèrent les ponts entre les cultures, que l’ « ennemi Amérique » n’échappe pas à la règle et que la caricature n’est pas le meilleur moyen de répondre au préjugé.
Dérangeant, Whatever Lola wants l’est sans doute moins que Le Chaos de Chahine mais s’il puise dans la même facture épique, ludique et romance du cinéma égyptien, il a bien sa manière à lui de bousculer les clichés au Nord comme au Sud.
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