Auguy

De Munga Tunga Djo

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Le jeune cinéaste de RDC aborde avec un regard original la problématique de l’immigration et ses effets pervers dans le microcosme africain de Bruxelles, au rythme d’une rumba tropicale. Il trouve le ton juste pour relater les démêlés d’un adolescent africain confronté à l’ire du principal de son collège pour cause de cessation de paiement de ses frais de scolarité. Une situation que le jeune lycéen vit comme un cauchemar. Sa sœur aînée, une immigrée sans emploi, tente de joindre les deux bouts en monnayant en catimini ses charmes. Malgré ce don de soi pour venir en aide à son petit frère, elle demeure insolvable. Le principal de l’établissement, un curé de noir vêtu, reste sourd à sa requête. Excédé par les remontrances du curé dont la réponse tombe comme le couperet d’une guillotine, le jeune africain étreint par l’angoisse de se voir dans la rue l’apostrophe en psalmodiant le Notre Père, en vain. Entre les réprimandes de son principal, un curé au cœur froid en ce temps hivernal où se déroule le drame et sa sœur qu’il surprend pendant ses ébats avec un immigré africain adulte, le petit collégien ne sait plus à quel Dieu s’en remettre.
Dans les années 80, des Congolais expédiaient leurs enfants seuls en Europe pour poursuivre des études scolaires. Des problèmes survenaient dès qu’ils cessaient d’honorer les frais de scolarité. Le héros de cette dramatique, un enfant de douze ans, appartient à cette génération devenue des immigrés, des sans papiers, à leur corps défendant. Avec une économie de dialogues, jouant sur les silences et les ambiances, le réalisateur congolais élabore une histoire poignante par sa charge émotionnelle, ses références à une religion révélée qui abjure la solidarité, bien que celle-ci soit une de ses vertus cardinales. Nous recevons cette histoire comme une réflexion sur la naissance de la violence dans l’univers des immigrés d’Europe, dont la Belgique constitue un des exemples édifiants. En raison de ses diverses qualités à la fois plastique et morale, ce film s’est adjugé, en mars 2000, au Festival du cinéma africain de Milan, le prix ENI du court métrage, le jury arguant qu’il le récompense pour la critique de l’hypocrisie et de l’ambiguïté morale, héritage d’une époque coloniale.

///Article N° : 2516

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