« Le coeur ne ment pas » : la chanson finale pourrait résumer le travail d’Anta Germaine Gaye, cette femme qui « sculpte sur le verre » avec une abstraction qui évite toute superficialité. Et cela pourrait aussi être la description du regard que porte Ousmane William Mbaye sur elle et ses créations. Le film respire de cette empathie et cela ne vient pas en un jour : c’est d’une fréquentation étalée sur quatre ans que se nourrit cet hommage et cette ode. Car cette femme a quelque chose à nous apprendre. Sa progression vers le dépouillement et l’ascèse ne va pas sans un équilibre de vie qui puise aussi bien dans le respect de sa religion que dans une écoute de ses enfants, mais aussi dans la poésie et l’enseignement. C’est ainsi qu’elle a pu renouveler l’art traditionnel du sous-verre, sur les traces de Serin Ndiaye.
Anta se raconte peu à peu, par la parole certes, mais aussi et surtout par sa façon de vivre et de créer. Il fallait des accents de jazz pour restaurer ce qui l’anime, et un montage serré pour témoigner de cette vitalité. Le film n’est ainsi pas seulement beau par son sujet mais aussi et surtout par sa maîtrise, la justesse de son rythme, la pertinence de ses cadres qui savent mettre en valeur la beauté joyeuse et rayonnante du visage d’Anta mais aussi représenter l’équilibre de son quotidien. C’est une mémoire essentielle qui s’inscrit alors à l’écran, à la disposition des générations présentes et à venir : celle d’une artiste qui marque son temps mais aussi et surtout celle d’une femme dont la recherche sereine ouvre une porte sur l’invisible.
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