A 17 ans, Fatma a été violée par un cousin. Elle est en reste cassée mais n’en parle à personne. Poursuivant ses études, elle rêve d’être libre et rencontre Aziz. Elle l’aime, ils se marient et elle est prête à tout pour conserver cette union, sauf à perpétuer l’hypocrisie ambiante sur la virginité… Fatma est à la limite de la fiction tant sa volonté est de témoigner de la condition de la femme tunisienne. Un regard d’homme qui se donne les moyens de respecter son sujet. Epurant au maximum tant l’image que le traitement, Khaled Ghorbal permet à ses personnages, Fatma mais aussi les autres femmes qu’elle côtoie, une intériorité qui en dit long. Ce sont cette simplicité et cette sincérité qui touchent. Les dialogues sont réduits au minimum, laissant aux regards, aux silences, aux visages le soin d’exprimer le ressenti. Ils n’en prennent alors que davantage de force elliptique :
» Dis-moi que tu m’aimes, sinon…, dit Fatma à Aziz qui vient la voir en douce dans sa chambre d’institutrice d’un petit village.
– Tu me tues ?
– Non, encore mieux : je vais ameuter tout le village ! »
Si le film se permet plans fixes et lenteur, c’est que la liberté intérieure est un travail sur soi et demande du temps. Lorsque Fatma dévoile à son mari ce qu’elle sait pouvoir remettre en cause leur union, c’est là aussi le résultat du travail du temps, de la détermination. Elle peut alors défaire ses cheveux en quittant le domicile familial, car la parole est affaire de liberté.
Sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes, 2001, 124 mn, distr. MK2, avec Awatef Jendoubi (Fatma), Nabila Guider (Samira), Bagdadi Aoum (Aziz), Amel Safta (Radhia). Sortie France le 27 février 2002.///Article N° : 2095