» Nous n’avons pas réagi, ou si peu, trop préoccupés à faire des films, trop loin. » Les images terribles des corps enterrés au bulldozer hantent la télévision diagonale déjà vue dans Asientos. La même interrogation de mémoire. Comment filmer la traite négrière ? Comment filmer le génocide ? » Un homme qui crie n’est pas un ours qui danse « , écrivait Césaire. Woukoache choisit de filmer la vie. Sans contourner la douleur. A commencer par celle de ces jeunes qui demandent pourquoi personne n’a su lire les signes annonciateurs du génocide. Les questions s’alignent. Comment reconstruire la fraternité brisée ? Comment rêver d’un Rwanda nouveau ? Et toujours, la caméra qui suit les traces, sur les murs, les plafonds, les statues des églises. La caméra qui ose passer les portes qui s’ouvrent sur les amas de corps momifiés. » Se taire serait faire comme si jamais cela n’avait eu lieu. Impossible ! » Parler ? Woukoache le fait en choisissant la colère de Boris Diop. Car au fond, à quoi bon la mémoire pour se lamenter ? De quoi se souvenir qui nous permette d’agir ? » Il y a des ruptures à oser « . Ce jeune acteur qui rêve de refaire du cinéma, ces trois filles si lucides dont la réserve cache mal leur formidable envie de vivre et d’aimer, ce sont eux qui donnent le programme du renouveau : tout simplement oser réinventer l’avenir. C’est alors que les chansons et les danses peuvent resurgir des profondeurs de l’horreur et célébrer la renaissance de l’Afrique.
126 mn, prod. : Issa Serge Coelo, image : Bonaventure Tatoukam, son : Issa Traoré Sr, montage : Hervé Brindel.///Article N° : 1473