Voilà une idée saugrenue : chercher en Mauritanie un arbre qui pousse dans le jardin de sa petite villa belge. Mais voilà une idée géniale : l’évidente métaphysique de la question ne peut entraîner que des réponses du même ordre. Poser une question absurde est le chemin de la poésie, à condition de prendre les risques du voyage. Vandeweerd les prend : il part à l’aventure de sa quête décalée, advienne que pourra. Pour qui accepte de rentrer dans le temps de son récit, fait d’écoute, d’attention aux êtres et à la nature, ce partage filmé est d’or. Car c’est une pensée autre qu’il cherche à découvrir, pour se ressourcer lui-même dans sa compréhension de soi et du monde. Il ne la vampirise pas, il l’écoute.
Le média cinéma prend là tout son sens : la simple aventure est trop individuelle et personnelle pour être partagée sans un vrai travail sur l’image. Elle aurait été prétentieuse et agaçante. Vandeweerd fait le voyage seul, puis revient avec une équipe de cinq personnes pour filmer de façon très précise ce qu’il a repéré. La construction poétique qui en résulte est un condensé d’impressions, de rencontres, de formes. Ce travail d’écriture permet le dépouillement, une certaine pureté, une grâce captée dans les éléments (l’eau, le bois, le sable
) et embellie par les personnes. Point n’est besoin de faire parler les vieux soufis de leur recherche intérieure : leur dénuement parle de lui-même.
Faut-il aller en Afrique pour cette quête de la relation intime entre l’homme, la nature et le monde invisible ? Non, sans doute, mais pourquoi pas, si l’on respecte ceux que l’on mobilise ? Une caméra fixe qui ne se rapproche pas systématiquement des visages confirme cette démarche. Chacun a une clef à donner pour retrouver l’arbre. Racines lointaine invite à méditer.
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