Dans un style alerte, voici le combat d’une femme aux prises avec son époux féodal. Au comédien Hyppolite Ouangrawa, qui avait déjà joué dans Un certain matin, son premier court métrage, la réalisatrice confie le rôle du menuisier Abel, dépeint comme un conservateur réfractaire au mouvement d’émancipation des femmes. Le personnage de Bintou est incarné par l’actrice Alimata Salouka Koné, aussi naturelle que convaincante dans sa composition de femme battue. Humiliée par son époux devant ses enfants et les voisins, elle ne se résigne point. Au refus de son époux d’inscrire sa fille à l’école au même titre que ses garçons, elle oppose une ferme résistance, déployant imagination et énergie pour asseoir un commerce de vente de mil germé pour la préparation de la traditionnelle bière – le tiapolo. L’humour suinte dans des dialogues incisifs qui dérident le spectateur. Le couple Abel-Bintou s’affronte sous le regard goguenard des voisins. La tension culmine au point que l’époux jaloux en arrive à détruire les jarres de sa femme qui ne s’avoue pas vaincue. Son ardeur au travail vient à bout des réticences du féodal Abel qui découvre la vérité en même temps qu’il évite d’être lynché. Ce portrait haut en couleurs ciselé par Fanta Regina Nacro est irrigué par un message clair adressé aux femmes. Celles-ci doivent s’entraider pour conquérir leur indépendance économique. Tel est l’objectif majeur de l’association Songtaaba – Entraide en langue mooré – dont Bintou est un membre actif.
Si le succès d’un film se mesure à l’accueil enthousiaste que le public lui réserve, l’auteur de Bintou ne peut qu’être rempli de joie, chaque projection ayant provoqué le délire des spectateurs du Fespaco, dont le jury lui a attribué le grand prix du court métrage. Cette réception favorable accrédite la justesse du regard que la réalisatrice jette sur sa société.
2001, 31 mn, 35 mm, produit dans le cadre de la série « Mama Africa » par Zimmedia, image : Nara Keo Kozal, musique : Yacouba Compaoré et Maï Lingani, avec Alima Salouka Kone et Hyppolite Ouangrawa. Distr. 01 53 26 37 54.///Article N° : 2073