Congo, un médecin pour sauver les femmes, d’Angèle Diabang

La résilience des femmes

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Vous n’avez que jusqu’à la fin novembre 2014 pour voir [en suivant ce lien] l’excellent documentaire d’Angèle Diabang sur le docteur Denis Mukwege et son hôpital pour femmes victimes de violences sexuelles dans l’Est du Congo, là où des enfants soldats immatures sont lancés sur des femmes qui pourraient être leurs mères, le viol étant pour les rebelles du Kivu une arme de guerre en détruisant le tissu social, car tous y perdent leur identité : les femmes, mais aussi leurs maris et leurs enfants.

Voici que ce documentaire d’une jeune réalisatrice sénégalaise est programmé en début de soirée sur France 5, une chaîne française de bonne diffusion. C’est assez rare pour devoir être signalé. Mais c’est d’autant plus important que ce film est d’une extrême intelligence sur un sujet difficile. Angèle Diabang aurait pu en rester à un portrait flatteur du célèbre chirurgien-gynécologue qui « répare » les femmes, et revient triomphalement au pays qu’il avait dû quitter en 2012 après trois tentatives d’assassinat. Au contraire, au diapason de l’humilité de son personnage, ce que dit Denis Mukwege face à la caméra n’est qu’un rémanent point de départ pour d’autres paroles, celles des psychologues et autres soignant(e)s, celles des femmes violées, également au centre de l’image, dans toute la force de leur visage découvert, elles qui tiennent à témoigner à la face du monde de l’horreur qu’elles ont vécues, dans le fol espoir que cela serve à la conjurer. Toujours, le cadre les place en beauté et dignité ; toujours, une juste distance est respectée.
Les hommes, dit Mukwege, « transforment le ventre des femmes en champ de bataille ». De poignants récits lui donnent trop malheureusement raison, non seulement des viols mais du rejet que vivent ensuite les femmes dans leurs familles. « Mes larmes coulent toutes seules » : on apprend que des femmes reviennent, violées une nouvelle fois, et que dire à l’enfant issu du viol ? Comment l’aimer ?
Attentive aux ambiances, aux détails, aux émotions et surtout à la vitalité des femmes et comment elles animent l’endroit, Angèle leur rend la première place, à l’image de l’objectif de cet hôpital : leur redonner espoir, les alphabétiser, les aider à refaire leur vie avec un métier (dans les centres Dorcas).
Des hommes réparent ce que d’autres hommes ont fait : des chirurgiens se forment et tentent de déjouer les méfaits issus de la « complicité coupable » des puissances occidentales, alors même que « sans justice, il n’y a pas de paix ». Par son action comme par son franc-parler, le Dr. Mukwege dérange aussi bien les Rebelles que les Gouvernants, mais il prend le risque d’agir car « ce sont ces femmes qui feront le changement », par leur résilience et leur vitalité, et « qu’il faut se battre à leurs côtés ».

///Article N° : 12560

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