En 2001, Africultures faisait paraître un numéro fondamental qui questionnait l’africanité des Enfants-Terribles des Indépendances, génération de penseurs en quête d’émancipation identitaire, refusant d’être enfermés dans l’enclos d’une identité univoque. Qu’en serait-il alors si cette hybridité redessinait nos géographies identitaires et nos cartographies culturelles ? Les années 1990 ont vu arriver un néologisme exprimant cet entre-deux, tout droit inspiré des Nubians ou encore des Zap Mama qui chantaient « Adventures in Afropéa » et s’affirmaient « afropéennes » quand on leur demandait leur origine. Une formule que l’on retrouve aujourd’hui chez Léonora Miano qui revendique elle aussi cette identité frontalière et utopique dans Habiter la frontière. Simple utopie, posture ou provocation, véritable engagement, l’afropéanisme peut-il s’apparenter à l’éclosion d’une culture nouvelle ?
À l’ère d’une société placée plus que jamais sous le signe de la mondialisation et d’un héritage historique qui met au jour nos rhizomes interculturels, de nombreux artistes se revendiquent d’une « afropéanité » – sans doute à penser dans les sillons du parcours des afro-américains. D’autres, œuvrent toujours au dépassement de ces catégories identitaires qui réduisent le champ de perception des êtres mais surtout des productions artistiques. Ce numéro de la revue interroge, comme il l’avait fait autrefois avec l’africanité, les origines et les enjeux de l’afropéanisme, ses impacts en tant que posture littéraire et politique mais aussi ses limites dans ce qui est à appréhender comme lien diasporique et tentative de se (re)connecter en se pensant visiblement, avant-tout, comme afro-descendants.