Cinéma/TV

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De Frank Cole

Obsédé par la mort d’un être proche, Frank Cole va chercher la vie là où l’on pense à tort qu’elle est le moins présente : le Sahara. Il le traversera seul d’Ouest en Est durant 11 mois en 1989-90, manquant sans arrêt d’y perdre la sienne mais trouvant la force de tourner les images qu’il désire ! Pourquoi sommes-nous fascinés par ces fous qui se confrontent ainsi à l’extrême ? Leur capacité à se dépasser, à aller jusqu’au bout quitte à risquer de tout perdre, nous apprend sans doute à le faire un peu plus dans les banalités de nos…

De Rachid Bouchareb

L'Afrique débarque à Harlem

Sur le boulevard Malcolm X, c’est Dakar en Amérique !

Entretien d'Olivier Barlet avec Rachid Bouchareb

Réalisateur de "Little Sénégal"

Vous avez constaté dans votre enquête préalable au film un profond racisme et une violence dans les mots entre les communautés africaine et africaine-américaine. Quelles en sont à votre avis les causes ? Je ne peux parler que de mes rencontres. Dans l’échange, les Africains-américains ne se sont pas situés comme Africains. Ce sont d’abord des Américains. Rien ne fait référence à l’Afrique, ni sur leurs murs ni dans leur discours. « L’Afrique, c’est là où on tue des Américains » : la phrase de mon film, je l’ai entendue. Je parle là de la population afro-américaine du bas de l’échelle, celle…

Entretien de Christine Sitchet avec Manthia Diawara

Originaire du Mali, cinéaste et professeur de littérature comparée et de cinéma, Manthia Diawara, dirige le département d’Etudes africaines et l’Institut des Affaires afro-américaines de la New York University. Il a fondé les Editions Black Renaissance/Renaissance Noire et vient de publier « En quête d’Afrique » aux Editions Présence Africaine.

Lussas (07), 19-25 août 2001

Lussas est un phénomène vivifiant ! Est-ce par sa ruralité ? Le sérieux dans la préparation tient des valeurs paysannes : un catalogue passionnant de bout en bout, des débats souvent de haut niveau, une programmation exigeante et rayonnante d’intelligence… Le tout dans une ambiance décontractée loin de toute pédanterie parisianiste mais où la réflexion intellectuelle ne fait pas peur. Une réjouissante respiration dans la litanie infantile de l’audiovisuel estival. Au point de se demander si les petites capacités d’accueil des quatre salles improvisées dans ce petit village en croisée de chemins ne vont pas trouver rapidement une limite insurmontable,…

Aujourd’hui en France, on se demande sans cesse si vivre ensemble est possible. Pénétrée des métissages de son Histoire coloniale, la France ne cesse d’en avoir peur, donc peur d’elle-même. Cette peur de perdre une mythique intégrité, le cinéma l’aborde le plus souvent dans ce qu’il sait le mieux faire au plus profond des salles obscures : l’intime. C’est ainsi que les films où le rapport avec la colonie est abordé mettent très souvent en scène des relations amoureuses. La mixité culturelle y est pourtant une aventure à hauts risques.

De Yamina Benguigui

« Ici tous les moutons sont français ! » Cette réflexion au moment de l’Aït de ce père algérien qui fait venir sa famille grâce à la loi de 1974 autorisant le regroupement familial résume le beau film de Yamina Benguigui : Zouina, sa femme, devra vivre malgré elle la séparation d’avec sa mère, le déracinement, l’exil, le déchirement de la perte de ses repères dans un monde provincial hostile où l’enfermement de la femme maghrébine devient une véritable prison. Mais la radio, une voisine aussi, par leur liberté de ton, lui ouvre les portes de l’affirmation de soi. Ayant appris qu’une…

De David Gordon Green

Le réalisateur a 26 ans, il est blanc et texan. Le tournage de ce premier long métrage a duré 19 jours, avec des morceaux de pellicule récupérée, sur un script de 60 pages. Autant dire que l’impro est de mise, et c’est sans doute pourquoi ce pari un peu fou est tenu : évoquer de façon seulement suggestive et parfaitement irréelle l’imaginaire d’adolescents essentiellement noirs de Caroline du Sud. L’intention est clairement de brouiller les pistes de la représentation : un scénario volontairement improbable et louvoyant, un héros qui ne peut l’être (par malformité congénitale d’une fontanelle qui ne veut…

De Youssef Chahine

« Jouer la comédie n’est pas un jeu, il faut prendre le public au sérieux », fait dire Chahine à un de ses personnages. C’est le programme et le paradoxe de son 37ème film : magistralement ficelée, l’intrigue fait entrer un séducteur arriviste dans le milieu du showbiz et du cinéma. C’est dans la farce que la machination sera déjouée, c’est en farceur que Chahine mène la danse, dans la grande tradition du film musical égyptien pour un appel à la vigilance face aux calculs des vendeurs d’émotion et de vérités. Préférant mettre aussitôt le spectateur dans la confidence, jouant donc le…

D'Abas Kiarostami

Cela commence par un fax qui sort de l’appareil sous nos yeux. C’est le programme « Actions des femmes ougandaises pour sauver des orphelins ». Pas bête : un cinéaste mondialement célèbre pourrait efficacement y contribuer par un film. Et c’est réussi : il est présenté hors compétition à Cannes ! Il cite les chiffres car les chiffres sont éloquents : sur 22 millions d’Ougandais, 2 sont morts du sida, 2 sont séropositifs et 2 million d’enfants sont orphelins en 2002. Et d’entrée, la recherche de la bonne distance. Arrivée à l’aéroport, plan sur les valises, plan sur le chauffeur. Et une…

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Entretien d'Heike Hurst et Olivier Barlet avec Abbas Kiarostami à propos de son film ABC Africa

Festival de Cannes 2001

Quel but avez-vous poursuivi avec ce film ? Faire en sorte que les gens participent à l’aide à ce pays et aux enfants. Lorsqu’une spectatrice de Caroline du Nord m’a demandé après une projection comme elle pouvait aider, j’ai senti que je remplissais mon rôle : attirer l’attention sur la question des orphelins du sida en Ouganda. J’espère aussi que le Pape aura l’occasion de le voir et de réfléchir à ce qui se passe dans ce pays avec l’opposition de l’Eglise à la contraception ! L’affiche du film et son titre reprennent l’enfant qui est adopté par un couple…

De Mahmoud Ben Mahmoud

Il y a dans les Siestes grenadines un terrible constat : celui d’une société qui ne cesse de se cacher son vrai visage. Ben Mahmoud ne pouvait le dresser qu’en se centrant sur un personnage partagé : une fille de mère française, de père tunisien, parlant arabe mais venant de Dakar et passionnée de danse africaine. Elle a la vitalité et la naïveté nécessaire pour faire bouger les convenances et révéler les hypochrisies, à commencer par les préjugés racistes et les corruptions manipulatrices. Son personnage a du corps, et ce n’est pas la moindre qualité de ce film attachant : elle nous touche…

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Entretien d'Olivier Barlet avec Mahmoud Ben Mahmoud à propos de Siestes Grenadines

Pourquoi ce titre ? « Kwaïl Ar-roummân » que j’ai traduit par « Les Siestes grenadine » est une expression tunisienne, en fait tunisoise, puisque j’ai observé en dehors de Tunis que les gens la décodaient moins bien. Elle désigne cette période de l’année qui ressemble un peu à ce qu’on appelle en français « l’été indien ». Les chaleurs, parfois exceptionnelles, qui marquent le début de l’automne en Tunisie ont cette particularité de faire mûrir la grenade et le coing. C’est une époque de torpeur et de lascivité, où l’on n’a pas envie de recommencer à travailler, de rentrer à l’école, et qui dans l’imaginaire…

De Chad Chenouga

Film délibérément autobiographique, 17 rue Bleue est l’histoire d’une dérive. Celle d’Adda, la mère de Chad adolescent, revisitée à l’âge adulte par Chad cinéaste. Le drame s’installe quand meurt le riche entrepreneur français par ailleurs marié qui l’entretenait, elle et ses deux fils Chad et Samir, et les avait installés dans un appartement de la rue Bleue. En procès avec sa femme légitime pour hériter de ses biens puis simplement conserver l’appartement, cette mère d’origine algérienne voit s’écrouler sa sécurité et perd peu à peu son équilibre mental, l’appartement devenant à la fois exutoire, asile et tombeau. Impuissante à hériter…

De Yasmine Kassari

Plutôt que de faire un constat dramatisant sur le vécu des Marocains immigrés clandestins en Espagne (15 000 passent le détroit chaque année, tandis que 14 000 ratent le passage et 1000 meurent noyés), la réalisatrice capte leurs états d’âme, donne la parole aux sans-voix. Et leur laisse le temps. C’est ainsi, dans la simplicité avec laquelle ils racontent leur itinéraire guidé par leur ressenti, qu’elle trouve le ton juste d’un film exigeant que les quelques images d’archive de la police espagnole sur les drames des noyades ne viennent que conclure, sans insistance aucune, juste quelques images, sans manipuler l’émotion…

D'André Téchiné

Sarah est juive, Saïd est arabe, Serge est français. Sarah conduit un scooter, Saïd se déplace à vélo, Serge est chauffeur routier. Ce tiercé du déplacement n’est pas neutre, tant Loin est, comme son titre l’indique, un film nomade. Chacun bouge vers l’autre, chacun bouge en lui-même, implose même tant il ne sait quelle direction prendre. C’est cet entre-deux que saisit Loin avec une impressionnante maîtrise, ce désir qui habite chacun et qu’il ne peut limiter. Serge aime Sarah, Saïd veut passer le détroit pour l’Europe, Sarah hésite à rester à Tanger. Toutes leurs déchirures sont les nôtres et pourtant,…

De Merzak Allouache

Cela commence par un générique endiablé sur une opéra de Rameau. En quelques ellipses, l’action est posée : Yasmine, sans nouvelles de son compagnon Rachid, tous deux d’immigration algérienne de longue date en France, quitte Paris pour aller le retrouver en Algérie. « En quelques jours, j’ai l’impression d’avoir vécu les trois quarts de ma vie », lui dira-t-elle après avoir passé par toutes les galères en plein maquis islamiste. La réalité algérienne crève l’écran, non comme un reportage ou les images de l’horreur de la télé mais comme un constat, celui d’une folie généralisée. Incarnée dans le compagnon que soigne Rachid,…

150 films, 250 invités, 150 professionnels et 200 journalistes, le festival du film francophone de Namur reste au début octobre un rendez-vous obligé. L’Afrique s’y est taillée cette année la part du lion dans le palmarès.

Au cinéma, face à l’exigence d’authenticité qui fonderait l’africanité, la question de la réalité reste centrale. A la lumière de quelques films récents, les nouvelles stratégies adoptées par les cinéastes pour refuser l’étiquetage sans se renier.

Faute de place au bouclage, nous ne publiions que des extraits d’une correspondance d’Iba Ndiaye Diadji à Dakar dans la revue papier : l’interdiction du film Karmen, du Sénégalais Joseph Gaï Ramaka. On peut en lire ici l’intégralité.

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