Cinéma/TV

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Entretien de Fayçal Chehat avec Rachida Krim

Les cinéastes femmes algériennes ou d’origine algérienne ne sont pas légion. Assia Djebar fut une pionnière, aujourd’hui il y a Yamina Benguigui ou Rachida Krim. Notre choix s’est porté sur cette dernière. Plasticienne de formation, Rachida entre, en 1992, avec une grande détermination, dans l’univers cinématographique. Le résultat est prometteur. Elle commence par écrire et réaliser un court métrage intitulé El Fatha. Puis, après quatre ans de préparation, elle plonge dans la grande aventure. Sous les pieds des femmes…, son premier long métrage, lui ressemble. Il est émotion et passion. Traitant de thèmes aussi délicats que la guerre d’Algérie et…

Entretien de Catherine Ruelle avec Christophe Ruggia

Retour sur le Gone du Chaâba, livre d’Azouz Begag et film de Philippe Ruggia (critique dans notre précédent numéro) : comment un cinéaste s’approprie un écrit pour le conformer à ce qu’il désire communiquer.

De Gurinder Chadha

D’Angleterre nous vient ce vrai bijou de 1993, tourné par une femme de culture indienne née au Kenya, qui a rencontré un grand succès Outre-Manche. Des femmes se font une sortie au bord de la mer, l’occasion d’aller au bout d’elles-mêmes. Le film emmêle avec rythme ces destins divers et de cette salade sort une grande humanité et une fine analyse des relations au sein des communautés immigrées mais aussi entre elles, au vu des préjugés qui frappent la jeune fille éprise (et enceinte) d’un jeune Noir. Chaque scène est profondément ancrée dans la société anglaise et pourtant tout aussi…

Ouagadougou 1997

Comment en êtes-vous venu à jouer un rôle moteur dans la Fédération panafricaine des cinéastes ? J’habitais à Londres et avais fait un documentaire. Dans un symposium sur le Tiers monde à Vienne je découvris qu’il existait des réalisateurs africains ! J’ai compris que nous avions les mêmes problèmes et c’est ainsi que j’ai commencé à m’impliquer dans le cinéma africain et dans le démarrage de la Fepaci. Les pays francophones faisaient des films avec les fonds français alors que les anglophones ne disposant pas de fonds restaient à la traîne. Et cela est maintenant différent ? Des initiatives viennent équilibrer les choses…

De Mohamed Chouick

C’est bien sur l’arche de Noé que l’Algérien Mohamed Chouick nous emmène, mais les vagues sont de sable et l’arche est la nef d’un fou : L’Arche du désert est une splendide et terrible métaphore d’une brûlante actualité qui dépasse même le drame algérien pour évoquer toutes les tragédies qui s’abattent sur les pays pauvres de la planète. Elle n’est malheureusement pas l’arche de Noé : les hommes de cet oasis en plein désert ne connaissent plus le pardon des vieux mythes. Comme tant de cinéastes africains, Mohamed Chouick, qui a écrit scénario et dialogues, puise dans sa culture du verbe et…

D'Azzedine Meddour

En Kabylie, au début du siècle, un village entier doit fuir l’oppression française. Une femme, Baya, refuse l’affront d’une coutume : un seigneur féodal, meurtrier de son mari, lui offre une bourse de Louis d’or, la ddiya, le prix du sang versé. Sa communauté paysanne voudrait que l’argent serve à payer l’impôt de guerre pour récupérer ses terres. Baya incarne ainsi l’obstination infatigable d’une certaine forme d’honneur. Au-delà de ce qu’on appelle la permanence berbère, cette capacité à résister en restant fidèle à ses traditions, sa langue et son système de pensée, l’intransigeance de Baya a valeur d’exemple pour tout un…

Paris, décembre 1997

Entre Djendel et Baya, n’est-ce pas l’opposition du réalisme et de l’instinct ? Djendel est un samouraï qui fait partie de la caste des Djouad, la caste guerrière. A force de faire la guerre, il est fatigué des hommes et reviens à cette matrice qu’est la caverne. Il voit Baya agir et c’est finalement elle qui le ramène à l’amour et au combat. Baya n’est pas instinctive mais pure : fille d’un saint populaire, élevée dans le respect des valeurs. Plongée dans le chaos, elle cherche à retrouver ces valeurs. Ce sont ces êtres qui maintiennent l’équilibre du monde. Ils rappellent qu’on…

De Moussa Sene Absa

Ils avancent d’un pas vif dans les ruelles de Dakar, non loin de la mer, groupe d’hommes en boubous bleus, la main sur l’oreille pour s’entendre chanter. Leur choeur a la beauté d’une affirmation, leur polyphonie a le souffle d’une Afrique qui s’unit pour résister. C’est le cri du réalisateur sénégalais baye fall Moussa Sene Absa :  » Tableau Ferraille, il est temps de t’éveiller !  » Dans ce quartier de Dakar où il est né, se joue une histoire universelle : l’ascension fulgurante et la chute amère d’un homme politique sincère se heurtant aux intérêts et aux pouvoirs. Scénario éculé repris d’une multitude de…

Ouagadougou, février 1997

Tu préfères nettement tourner en extérieurs… La vie est plus forte que l’invention ou la parodie de la vie : je préfère donc les décors naturels. A Tableau Ferraille, le métal est travaillé par le soleil, la poussière, la pluie, la main de l’homme. L’art n’est pas prétentieux, comme dans les musées d’art moderne ! Dans le décor naturel, tu sens la vie des gens et l’aura des choses. Je ne construirai jamais un décor en Afrique. Dam est-il un héros ? Mohamed Ali dit :  » la vie est comme un combat de boxe : une fraction de seconde d’inattention et tu es KO ! « . Une…

De Thierry Michel

Cela a commencé avec l’homme Lumumba, espoir de liberté, de démocratie et de bonheur. Mais l’indépendance a mal tourné et le lion Tschombé est venu réinstaurer la discipline. Puis vint le léopard Mobutu qui parle comme l’homme mais, en bon félin, impose sa dictature. Arrivé en fin de règne, le léopard laisse la place au serpent : les services de sécurité et tous les profiteurs. Le serpent est sans finesse : il serre l’homme jusqu’à ce qu’il se révolte, rêvant à nouveau de justice et de liberté. C’est ce cycle du serpent que documente ce film : les terribles jeux de pouvoir et…

De Christophe Ruggia

Nous sommes dans les années soixante. Une vingtaine de famille venues d’El Ouricia, en Algérie, se retrouve dans un bidonville de la région lyonnaise (le Chaâba). Fuyant la guerre ou la pauvreté, arrivées pour servir comme main d’œuvre sur les chantiers de construction (la France a alors besoin de bras), ces familles vivent dans une misère innommable, partagent leurs taudis avec les rats et se sentent moins que rien, malgré leurs espoirs et leurs fantasmes. C’est là pourtant que naîtront leurs enfants : cette première génération des gosses français issus de l’immigration algérienne. Et c’est là que vit le petit Omar,…

Au-delà du ressentiment, le cinéma de la nouvelle Afrique du Sud explore les voies complexes d’une reconstruction de soi. Cela passe par une introspection source d’avenir. Extirper l’apartheid de soi, comme les Africains des Indépendances ont dû décoloniser l’espace et la pensée : telle semble être la direction obligée de tout langage artistique en Afrique du Sud aujourd’hui. Une différence de taille, cependant, avec la situation post-coloniale : les Blancs sont encore là, dans cette nation arc-en-ciel que cherche à définir la classe politique réunie, soucieuse d’éviter la violence par le dialogue. On ne gomme pas d’un coup de crayon les ignominies…

Entretien d'Olivier Barlet avec Youssef El Ftouh

Puisque nous parlons d’images, comment trouvez-vous celle que nous avons choisie pour la première couverture d’Africultures ? Les images comportent des évidences invisibles, des non-dit qu’il s’agit de pointer. Sur cette photo on voit un enfant. Le continent africain est souvent représenté à travers les enfants, une façon de signifier qu’il s’agit d’un continent mineur. On entend souvent dire des Africains que ce sont de grands enfants. Et puis les enfants sont encore éducables, on pourra en faire des hommes civilisés. L’enfant est en tenue de sport. Un Noir est soit musicien-danseur soit sportif. Il porte un Tee-shirt rayé. Lisez L’étoffe…

De Rachida Krim

Cela commence par des regards, des miroirs, des silences. On pense à Melville : la retenue des corps, le cadrage large sur des pièces presque vides, la pesanteur des mots pour aller à l’essentiel. Parce que ce film nous dit que l’on a pas écouté les femmes. Et que la tragédie algérienne d’aujourd’hui puise sa source dans cet oubli de l’Histoire, dans cet intégrisme des hommes qui ont figé la révolution dans un retour à la tradition. Une scène éclaire le film : Amin récite le Coran et avoue à Aya qu’il ne sait pas lire l’arabe. Aya est cette femme qui,…

De Pol Cruchten

Le film est censé raconter une problématique d’immigré africain en Europe. Dju, un jeune cap-verdien, accepte de quitter la chaleur ensoleillée de sa terre natale pour retrouver les traces de son père, José Touré, sous le froid hivernal du Luxembourg. Celui-ci, ancien ouvrier immigré, a disparu sans explications, n’envoie plus d’argent à sa femme restée au pays et ne donne plus signe de vie. Dju apprend, dès son arrivée, les subtilités du contrôle d’immigration. On l’emmène au commissariat, où il fait, heureusement, la connaissance d’un bon samaritain blanc, l’inspecteur Plettshette (formidablement interprété par Philippe Leotard), qui va l’aider à sortir…

Entretien d'Olivier Barlet avec Safi Faye

Cannes, mai 1997

Longtemps considérée comme  » la  » femme du cinéma africain, la Sénégalaise Safi Faye s’explique sur son premier long métrage de fiction, Mossane, tourné en 1990, sélectionné au festival de Cannes par Un certain regard en 1996 et par Cannes junior en 1997, et qui sort enfin en France… en 1998 !

Entretien d'Olivier Barlet avec Anne-Laure Folly

Paris, octobre 1997

Entretien avec la Togolaise Anne-Laure Folly, réalisatrice de Femmes du Niger, de Femmes les yeux ouverts et de Les Oubliées – des documentaires prenant les femmes comme sujet.

De Safi Faye

Vu superficiellement, Mossane est une histoire de mariage forcé de plus. Vieux schéma ? Cinéma calebasse ? Plat réchauffé ? Certainement pas : ce film a la modernité de l’éternité. Non celle d’une Afrique prétendue immémoriale, mais celle de la lutte de la vie. Mossane tisse une fine analyse d’un sujet qui ne peut perdre en acuité : le destin adolescent. La jeune Mossane est belle, trop belle sans doute, au point que les enfants délaissent aussitôt le foot pour l’aider :  » Dès qu’ils la voient, ils la suivent et le match est foutu !  » Belle au point que les jeunes étudiants en rêvent avec humour :  » Ferme…

De Yamina Benguigui

Le film Structuré en trois parties de 52 mn (les pères, les mères, les enfants), il est une pure merveille : enfin une parole d’immigrés sur les écrans de la télévision, enfin une parole sensible permettant de saisir autant l’historique que l’humain. Le propos est centré sur la question du retour, ambiguïté partagée par les immigrés comme par les autorités françaises, et par la révolution qu’a apporté l’instauration du regroupement familial : les enfants étant davantage d’ici que de là-bas, les immigrés se fixent finalement dans le pays d’accueil. Ce film a le grand mérite d’aller voir à notre porte ce que…

Paris, septembre 1997

Votre film tourne beaucoup autour de la question du regroupement familial. Quel en était en définitive le pourquoi ? Personne n’est clair sur ce sujet. A partir de mai 68, un mouvement est apparu pour défendre les droits des immigrés, insistant sur leur éloignement de leur famille, mais c’était un mouvement d’intellectuels sans que les immigrés en fassent partie. L’aspect économique a joué : un immigré qui gagne 1000 F en renvoie 800 chez lui. Sous Giscard, on eut ainsi l’idée de mettre un terme à cette fuite de devises. La crise économique de 1976 et l’arrêt de l’immigration imposait aussi de…

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