La programmation du festival d’Avignon 2014 a fait la part belle au théâtre guadeloupéen. Lors de l’Université d’été des Théâtres d’Outre-Mer en Avignon, les 20 et 22 juillet dernier, intitulée » Poétiques de marronnage : de nouveaux territoires de création « , Stéphanie Bérard a mis en évidence comment ces spectacles contemporains entrent en résonance avec l’histoire du théâtre antillais des cinquante dernières années, comment les créateurs actuels s’inscrivent dans une filiation avec leurs prédécesseurs, mais aussi comment ils innovent et se dissocient du passé pour trouver leur place dans le paysage théâtral contemporain international.
La recherche en Études Théâtrales caribéennes commence à se développer ces dernières années au croisement des études post-coloniales, des études francophones et des études dramaturgiques et scéniques. Ce domaine suscite un intérêt notable de la part des jeunes chercheurs comme en atteste le nombre croissant de thèses consacrées aux théâtres guadeloupéen et martiniquais. Pour preuve aussi, les ouvrages toujours plus nombreux qui paraissent sur les dramaturgies francophones caribéennes et africaines(1).
Malgré cette effervescence scientifique, le théâtre caribéen reste aujourd’hui encore peu connu du grand public. C’est d’autant plus regrettable que ce théâtre abondant, riche et inventif, nous renseigne non seulement sur la société caribéenne mais aussi sur la société française qui lui est étroitement liée.
Situé au confluent de plusieurs cultures (créole, africaine, européenne), il est le miroir du monde actuel dans son métissage et sa pluralité et nous donne à voir la rencontre des cultures, des imaginaires et des arts.
Il est aussi porteur d’une ouverture à l’Autre dans l’exploration d’héritages culturels et artistiques multiples, ce dont témoigne la programmation du festival d’Avignon 2014 qui fait la part belle au théâtre guadeloupéen.
Une dizaine de pièces écrites, mises en scène, jouées ou produites par des artistes guadeloupéens étaient présentes cette année au festival grâce au soutien du Conseil Régional de la Guadeloupe.
Tout en parcourant cette programmation 2014, nous dessinerons les mouvances, les tendances, les orientations esthétiques, artistiques et culturelles des écritures dramatiques et scéniques guadeloupéennes contemporaines en lien avec ce qui les a précédé. Plutôt que de retracer l’histoire du théâtre guadeloupéen depuis l’époque coloniale jusqu’à aujourd’hui, nous souhaitons mettre en évidence comment ces spectacles contemporains entrent en résonance avec l’histoire du théâtre antillais des cinquante dernières années, comment les créateurs actuels s’inscrivent dans une filiation avec leurs prédécesseurs mais aussi comment ils innovent, se dissocient du passé pour trouver leur place dans le paysage théâtral contemporain international.
L’une des caractéristiques des dramaturgies antillaises est l’intérêt indéniable porté à l’histoire, la grande et la petite, celle des figures tutélaires, des pères fondateurs (Toussaint Louverture, Dessalines, Ignace, Delgrès, Solitude), tout comme celle de petites gens, des oubliés de l’histoire. Les dramaturges caribéens n’ont de cesse – depuis Aimé Césaire avec dans son sillage Édouard Glissant et Vincent Placoly – de revisiter une histoire falsifiée, obscurcie, raturée, écrite par d’autres et qu’ils ont par conséquent à cur de réécrire et de se réapproprier, celle des résistances, des révoltes et des révolutions.
On pourrait citer les pièces qui ont marqué l’histoire du théâtre caribéen comme La Tragédie du roi Christophe (1963) de Césaire, Monsieur Toussaint de Glissant (1986), ou Dessalines ou La passion de l’indépendance de Placoly (1983), et s’étonner que les dramaturges martiniquais soient en apparence plus prolifiques en la matière que leurs voisins guadeloupéens. Il semble que ce soit les personnages moins connus, moins célébrés, qui ont davantage suscité l’intérêt des dramaturges en Guadeloupe.
Le théâtre politique engagé indépendantiste guadeloupéen des années 60 et 70, souvent créolophone, trouve ainsi ses représentants chez Robert Dieupart, Alex Nabis ou Arthur Lerus et le théâtre du Cyclone avec des pièces comme Nuit blanche (1975) ou Féryé Mawon (1987) qui dénoncent le pouvoir oppresseur de la France, les inégalités sociales et invitent le peuple à se réveiller voire à se révolter.
Les dramaturgies contemporaines guadeloupéennes sont moins chargées politiquement, moins militantes que celles des générations passées mais elles n’en montrent pas moins un intérêt renouvelé pour l’histoire caribéenne, celle des siècles passés mais aussi celle d’aujourd’hui.
On remonte ainsi avec Duel d’ombres d’Alain Foix(2) à la veille de la Révolution française, lors du duel qui vit s’affronter le Chevalier Saint George, célèbre escrimeur et musicien guadeloupéen, et le chevalier d’Éon, homme travesti en femme. Le duo théâtral des comédiens est tout aussi jouissif que le duel historique car la fougue et le panache de Vincent Byrd Le Sage n’ont d’égal que le talent de Philippe Roy qui interprète une coquette intelligente et charmante.
C’est ce qui se cache derrière les apparences dans l’intimité d’une âme blessée qui intéresse Alain Foix, fin psychologue et poète, révélateur des secrets d’alcôve. Le dramaturge choisit en effet de faire se rencontrer les deux adversaires dans un salon à la veille du duel pour faire connaissance : tout en conversant, ils imaginent une mascarade susceptible de déjouer les paris et le piège social dans lequel chacun des deux personnages est enfermé. L’art de la séduction se combine à l’art du paraître à travers tout un jeu de masques et de travestissement qui traduit bien l’esprit libertin et baroque de l’époque dont rendent compte les dialogues versifiés, les musiques et les danses inspirées de l’escrime.
Le métissage artistique est caractéristique des dramaturgies contemporaines, comme le prouvent d’autres spectacles présents cette année au festival, notamment Noir de boue et d’obus chorégraphié par Chantal Loïal et sa compagnie Difé Kako(3) qui mettent en mouvement, en sons et en images l’histoire des tirailleurs sénégalais.
Quatre danseurs – trois femmes et un homme – se racontent et se rencontrent autour de traditions musicales et chorégraphiques de leur pays respectif : le sabar (rituel sénégalais) côtoie ainsi le gwoka et le bèlè, deux autres rituels de tambour respectivement guadeloupéen et martiniquais.
Dans le partage d’un héritage commun, musical, chanté, dansé, ces quatre soldats recouvrent une humanité confisquée et une fraternité qui les aide à endurer l’épreuve de la guerre et de la mort. La marche militaire rigide et disciplinée réactive la mémoire corporelle et culturelle pour permettre à ces hommes engagés dans un combat qu’ils n’ont pas choisi et coupés de leur patrie, de se libérer par la danse, de se retrouver, soi-même et avec l’autre.
Les corps sont tantôt brutalement projetés au sol, tantôt statufiés ou condamnés aux mêmes gestes mécaniques répétés ; sans cesse, ils tombent, se relèvent, pour mieux s’entrechoquer ou au contraire se soutenir et s’élancer à nouveau.
Les jeux d’ombres et les projections vidéos d’images de guerre, tout comme le montage sonore construit autour d’archives (extraits de dialogues de films documentaires ou fictionnels, de lettres de guerre) nous plonge dans la vie quotidienne de ces soldats dont les chants traditionnels africains et caribéens nous ramènent à la terre qu’ils ont dû quitter mais qu’ils portent en eux.
Noir de boue et d’obus est un hommage rendu à tous ces soldats venus des Antilles, de l’Afrique noire, du Maghreb, de Madagascar qui ont lutté pour la libération de la France sans être reconnu et remercié pour leur courage et leur sacrifice. C’est aussi et surtout une célébration de la fraternité et du lien fort à l’Afrique mère à travers le tambour, instrument hautement symbolique dans la culture caribéenne, ce lien primordial à « l’Afrique collée à la chair du nègre comme une carapace » pour citer le romancier haïtien Jacques Stephen Alexis dans Compère général Soleil.
Le théâtre guadeloupéen est ainsi en prise directe avec l’histoire et la société européenne contemporaine, avec l’actualité, celle de la commémoration du centenaire de la Première Guerre Mondiale comme celle de la coupe du monde de football.
Le temps suspendu de Thuram de Véronique Kanor, pièce mise en scène par Alain Timár(4), s’inspire de la figure mythique de Lilian Thuram pour interroger les » mythologies actuelles de Guadeloupe « , titre du projet de la scène nationale L’Artchipel de Guadeloupe qui a pour objectif d’interroger les mythes antillais pour voir comment ils participent à l’élaboration d’une identité caribéenne.
Le sport, et le foot plus particulièrement, est indubitablement l’un de ces mythes modernes que l’écrivaine guadeloupéenne scrute avec humour dans une pièce poétique et philosophique qui met en scène un cinquantenaire assis devant son poste de télévision et qui traverse une crise existentielle en regardant la victoire de Thuram, homme fait Dieu pendant la coupe du monde de football de 1998.
A partir d’un phénomène de société planétaire, l’auteur pose ainsi des questions sociales et identitaires antillaises en explorant aussi les effets du média télévisuel.
Cette dernière pièce s’inscrit davantage dans une veine sociale que dans une veine historique en mettant en scène ceux qui sont restés en marge de l’histoire et à qui le théâtre donne une voix. Ce théâtre permet au spectateur de se voir, de s’interroger sur la société antillaise sur des modes tantôt comiques, tantôt dramatiques.
Domino, comédie mise en scène par Laurent Tanguy(5), aborde par exemple la question de la rencontre des sexes, des races et des cultures à travers le couple d’un métropolitain et d’une Antillaise : lui aime le soleil, le rock et la tranquillité alors qu’elle préfère l’ombre, le zouk et invite sa mère tous les week-ends.
La famille et notamment les tensions familiales, déclarées, avouées ou sous-jacente, non dites, sont au cur des préoccupations dramaturgiques guadeloupéennes contemporaines : le théâtre antillais n’a en effet de cesse d’explorer les dysfonctionnements sociaux et familiaux, comme en atteste la pièce de Frantz Succab, Un archipel de solitudes, mise en scène par José Jernidier(6).
Trois frères qui ne se sont pas revus depuis la mort de leur mère cinq ans auparavant se donnent rendez-vous dans la maison familiale. Tous trois ont des trajectoires divergentes : tandis que Pat et Tik sont restés au pays, le cadet Dolor est parti de l’autre côté, c’est-à-dire en métropole. Ils vont remonter dans le passé et aller fouiller les vieilles blessures, les vieilles rancunes, brisant le silence et révélant le secret qui les sépare.
Le titre très poétique choisi par Succab pour sa pièce est une métaphore de l’éparpillement, de l’individualisme que peut générer l’insularité et l’exil ; c’est aussi une invitation à recréer le lien, la solidarité malgré tout entre les membres d’une même famille, d’une même île.
En miroir de ce trio masculin qui fait se confronter trois frères, on trouve un duo féminin qui met face à face deux amies dans La faute à la vie de Maryse Condé(7), pièce également mise en scène par José Jernidier, collaborateur de longue date de l’écrivaine guadeloupéenne mise doublement à l’honneur cette année au festival.
On retrouve des problématiques similaires à la pièce de Succab avec la remémoration du passé, les règlements de compte, les blessures d’orgueil : la colère mais aussi la tendresse unissent ces deux femmes, surs et rivales dont l’amitié et la complicité se voient menacées par le souvenir d’un homme qu’elles ont toutes deux aimé sans jamais se l’avouer l’une à l’autre.
Maryse Condé est une figure importante de la littérature guadeloupéenne et qui plus est de la littérature féminine noire, car c’est l’une des premières auteures antillaises à avoir été reconnue internationalement, notamment par le monde universitaire américain où elle a enseigné la littérature caribéenne pendant des années dans de prestigieuses universités.
Plus connue pour ses romans que pour ses pièces, Condé est pourtant l’auteur d’une dizaine de pièces qui abordent des questions sociales, familiales, et interrogent les rapports de pouvoir entre hommes et femmes ainsi qu’entre classes sociales et raciales.
Condé a passé une partie de sa vie en Afrique de l’Ouest comme en atteste son autobiographie adaptée pour la scène par Eva Doumbia, metteuse en scène et comédienne franco-ivoirienne : La vie sans fard(8) nous donne à voir, à travers un montage d’extraits, la rentrée dans la vie de femme, de mère et d’écrivaine de Maryse Condé au moment des indépendances africaines.
Le théâtre féminin est très présent aujourd’hui sur les scènes guadeloupéennes offrant la possibilité d’explorer la place que la femme antillaise occupe dans la société notamment dans son rapport au couple et à la maternité.
Des générations de dramaturges antillaises se succèdent ainsi aux côtés de Maryse Condé (on peut citer Ina Césaire, Gerty Dambury, Michèle Montantin et aujourd’hui Gaël Octavia, Pascale Anin), pour offrir une perspective féminine et féministe qui touche profondément à l’intime comme le confirme la pièce de Magalie Solignat et de Charlotte Boimare Touche moi(9) qui nous fait pénétrer dans la psyché de Rosa Moi, professeur de piano en prise à des angoisses.
Complexée, humiliée par une mère asphyxiante, elle règle ses comptes dans un monologue éclaté qui répercute des voix multiples. Au milieu d’une piste de cirque éclairée d’un néon bleu, Rosa, jouée par deux comédiennes vêtues de petites robes vichy et qui ne sont autres que les auteures de la pièce, dialoguent avec de nombreux personnages croisés sur sa route, dans un jeu vertigineux de miroir et de dédoublement.
Il est une autre orientation du théâtre guadeloupéen contemporain manifeste dans la programmation 2014 du festival d’Avignon, celle d’un théâtre hybride qui entremêle des poétiques scéniques et des esthétiques plurielles. Ce théâtre revendique un héritage culturel ancestral où l’oralité, la musique de tambour, la danse, les rituels séculaires et religieux (carnaval, vaudou, léwòz) font la part belle au corps et à la gestuelle.
L’épreuve de Virgilan de Gilbert Laumord(10) explore les traditions orales, musicales et chorégraphiques créoles guadeloupéennes et haïtiennes tandis que les accents de jazz se mêlent aux accents mélodiques caribéens. Le rara haïtien(11) fusionne avec le léwòz guadeloupéen (rituel de tambour) à travers la joute verbale et physique de deux représentants de l’oralité créole et des croyances magico-religieuses : Majò Jòn et Mofwaz le Mofwazé nous font voyager d’une île à l’autre de la Caraïbe dans les méandres de ses cours d’eaux, de ses volcans, et de ses contes et légendes.
Ils se métamorphosent, échangent leur rôle en échangeant leur chapeau tout en nous racontant les épreuves endurées par Virjilan, maître des tambours et garant de la tradition, qui se présente pour succéder à Vyé Madanm-la, alias la Soufrière, déesse du feu.
Le comédien guadeloupéen Gilbert Laumord jouait aussi cette année dans Ô vous frères humains, texte d’Albert Cohen adapté et mis en scène par Alain Timár(12) qui sonde l’humaine condition, interroge l’intolérance et l’ostracisme.
Sur scène, trois acteurs de tailles, de couleurs de peau et d’origines différentes, trois âges de la vie et trois regards portés sur un même événement, celui d’un traumatisme vécu par Cohen à l’âge de 10 ans.
Insulté, humilié par un camelot qui refuse de lui vendre un bâton de détachant, l’enfant se fait traiter de » sale juif » et chasser de la foule de badauds attroupés dont pas aucun ne prendra sa défense. Il se voit alors confronté à la honte, à l’incompréhension face à la brutalité et à la méchanceté du monde adulte ; rejeté par une France qui l’a accueilli en tant qu’immigré grec, il ne sait plus quel est ce pays qu’il vénère en secret et à qui il chante son amour de » serviteur étranger de ta langue « .
Les voix de Gilbert Laumord, Albert Camus et Issam Rachyqahrad, tous trois sobrement vêtus de costume noir et chemise blanche, se relaient et se font écho dans une narration émouvante, drôle et grave à la fois pour nous faire pénétrer dans les méandres de la psyché de l’enfant et du vieil écrivain qui le /se regarde.
Le dispositif scénographique est très simple et effectif : trois panneaux recouverts de papier peint défraîchi aux roses fanées, symboles du passé et de l’enfance piétinée (car ce sont des roses que l’enfant offre au camelot dans une insouciance innocente), figurent d’abord les trois murs d’une chambre où Cohen, parvenu au seuil de la vie, regarde derrière lui ; ces panneaux progressivement s’ouvrent et se déploient dans une diagonale qui coupe l’espace en deux mais projette aussi vers l’infini, l’au-delà, peut-être celui de pardon auquel invite Cohen à la fin de la pièce. Cohen/Timár dépassent la question de l’antisémitisme et de la peur de l’autre pour ouvrir à une humanité réconciliée avec elle-même.
L’humaine condition est aussi au cur de Boesman et Lena du Sud-Africain Athol Fugard(13) mise en scène par Philippe Adrien avec des comédiens guadeloupéens et camerounais.
Dans une atmosphère apocalyptique, alors que le soleil a disparu et que la fumée masque les débris d’un monde en ruines, un couple noir erre de bidonville en bidonville, chassé par des propriétaires terriers blancs. Nous sommes en Afrique du sud du temps de l’Apartheid. Boesman et Lena se haïssent mais ne parviennent pas à se séparer car c’est lui qui connaît la direction et elle qui lui sert de souffre douleur.
Elle est un vrai moulin à paroles, danse auprès du feu en chantant, alors que lui se tait, tout absorbé à la construction d’une bicoque de fortune en tôle et en toile. Pour oublier la misère, il boit et parfois, il la bat afin de ressentir l’humanité qu’il a perdue, car il ne ressent plus rien quand il se frappe alors que son corps à elle peut encore pleurer.
Un autre pauvre hère s’approche de leur campement en quête de chaleur humaine, d’eau, de réconfort. Lena le recueille comme elle a recueilli le chien qui ne les a pas suivi le matin où ils ont dû quitter précipitamment leur ancien abris. Bien qu’il ne parle pas la même langue qu’eux, elle se confie à cet étranger et lui raconte l’histoire de sa vie, les violences verbales et physiques infligées par un mari qui se venge des discriminations et injustices dont il est lui même victime.
Déchets humains, réduits à manger les détritus des blancs qui les rejettent une fois qu’ils n’ont plus besoin d’eux, ces hommes et cette femme ravalés au rang de chiens errants, n’en sont pas moins attachants ; une grande humanité ressort du jeu des comédiens et de la mise en scène sobre et feutrée d’Adrien.
Ce qui retient notre attention dans ce panorama des spectacles guadeloupéens joués cette année au festival d’Avignon, c’est tout d’abord le fait que la Guadeloupe soit représentée par des artistes qui travaillent avec des metteurs en scène, des compagnies, des comédiens qui ne sont pas nécessairement guadeloupéens autour de problématiques qui ne sont pas spécifiquement caribéennes.
La Guadeloupe entre ainsi en dialogue avec Haïti, l’Afrique du sud, l’Afrique du nord et de l’ouest. On assiste à un brassage des cultures, à une ouverture à l’autre, à l’ailleurs qui caractérise cette programmation 2014. Le désir de partager, d’échanger, de s’ouvrir à la différence est manifeste faisant de la création théâtrale une invitation à la tolérance, au respect, à l’enrichissement mutuel : l’Afrique, l’Europe, la Caraïbe se rencontrent et dialoguent tandis que se font écho des expériences humaines diverses comme le racisme et l’antisémitisme.
Ce qui retient aussi notre attention, c’est le mélange des arts, des langages, des esthétiques : le verbe et la voix se conjuguent aux mouvements des corps et la parole à la musique, à la danse dans une approche pluridisciplinaire du théâtre conçu comme un art poreux qui se nourrit et accueille en son sein d’autres poétiques, d’autres esthétiques.
(1) On peut notamment citer deux ouvrages de référence sur la question : Stéphanie Bérard, Théâtres des Antilles. Traditions et scènes contemporaires, Paris, L’Harmattan, coll. Images plurielles, 2009. S. Chalaye et S. Bérard (éd.), Émergences Caraïbes : une création théâtrale archipélique, Africultures, nº 80-81, 2010.
(2) La pièce d’Alain Foix Duel d’ombres a été jouée au Théâtre de l’Albatros avec Vincent Byrd Le Sage dans le rôle du Chevalier de Saint George Philippe Roy dans celui du Chevalier d’Éon.
(3) Noir de boue et d’obus de Chantal Loïal a été joué au Théâtre Golovine.
(4) Le temps suspendu de Thuram de Véronique Kanor a été mise en scène par Alain Timár et jouée au Théâtre des Halles avec Dominink Bernard et Ricky Tribord.
(5) Domino de Laurent Tanguy avec Laurence Joseph et Laurent Tanguy a été joué au Théâtre Bô.
(6) Un archipel de solitudes de Frantz Succab mis en scène par José Jernidier avec Harry Baltus, Dominik Bernard, Joël Jernidier, a été présenté au Collège de la Salle.
(7) La faute à la vie de Maryse Condé est une pièce mise en scène par José Jernidier avec avec Firmine Richard et Simone Paulin, et qui a été jouée à la Chapelle du Verbe Incarné.
(8) La vie sans fard, roman de Maryse Condé adapté et mis en scène par Eva Doumbia, a été joué à la Chapelle du Verbe Incarné.
(9) Touche moi de et avec Charlottes Boimare et Magali Solignat a été mis en scène par Philippe Beyhedt et joué au Théâtre Espace Roseau.
(10) L’épreuve de Virgilan de et avec Gilbert Laumord a été joué au Collège de la Salle avec Miracson Saint-Val et Jocleyn Ménard.
(11) Le rara est un carnaval rural qui a lieu les quarante jours précédents Carême pendant lesquels des groupes de musiciens traversent les villages en entraînant la population derrière eux.
(12) Ô vous frères humains d’Albert Cohen adapté et mis par Alain Timár a été joué au Théâtre des Halles avec Gilbert Laumord, Albert Camus et Issam Rachyqahrad.
(13) Boesman et Lena d’Athol Fugard mis en scène par Philippe Adrien a été joué à la Chapelle du Verbe Incarné avec Filip Calodat, Chrsitian Julien, Nathalie Vairac et Tadié Tuéné.Le laboratoire SeFeA remercie la Commission Culture du Conseil Régional de la Guadeloupe qui a soutenu le projet, ainsi que La Chapelle Du Verbe Incarné, Le Théâtres des Halles, le Village du Off et leurs équipes pour leur accueil et leur disponibilité. Un grand merci pour leur accompagnement et leur confiance à Fely Kacy-Bambuck, Thérèse Marianne-Pépin, Manuella Moutou, Lorette Paume, Greg Germain, Marie-Pierre Bousquet, Alain Timár, Christophe Galent, Olivier Barlet et Annick Pasquet.///Article N° : 12377