Un vrai jouet ancien qui résonne des angoisses de toujours

Mon petit Poucet de José Pliya

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Mon petit Poucet
Texte et mise en scène de José Pliya
Assistante à la mise en scène : Danielle Vendé
Scénographie : Anne Guilleray
Costumes : Maylis Duvivier
Création lumière : Philipe Catalano
Création sonore : Brice Cannavo
Avec Lotfi Yahya et Sophia Leboutte
Spectacle créé au Varia à Bruxelles et actuellement en tournée

Ce n’est pas le conte de Perrault que met en scène José Pliya avec Mon petit Poucet, mais une variation tant musicale que plastique sur l’angoisse enfantine de la perte, cette appréhension de l’abandon qui dit la peur de ne pas être aimé, la peur aussi de perdre l’amour de ses parents. La pièce de Pliya développe un extraordinaire effet d’angoisse, le plateau est habité par un monumental étau de bois, tantôt castel d’où sortent les personnages comme des marionnettes grandeur humaine, tantôt immense boîte à surprise d’où bondissent de drôles de diables à ressort, mais aussi boîte à secret avec toute sorte de trappes, fenestrons et ouvertures qui découpent un cadre et font apparaître les personnages comme dans des vignettes de bande dessinée.
Toute l’esthétique du spectacle repose sur ces effets de découpe lumineuse, tantôt en rectangle horizontal étiré entre les deux billots de bois qui se rapprochent jusqu’à écraser les acteurs, tantôt petits vasistas qui laissent apparaître une tête dans un cadre et se découpe comme une peinture à la Vermeer, car les costumes ont ce cachet ancien qui évoque les temps d' »il était une fois », ce monde lointain et enfoui dans la mémoire de notre enfance. Tantôt surgissent les pages d’un livre et ses planches dessinées, tantôt ce sont des figurines qui s’animent comme les automates d’une boîte à musique dans ce dispositif de bois qui a tout d’un jouet ancien et tour à tour convoque la maison de bois perdue dans la forêt, le lit-cage d’Hans et Gretel, la rusticité des bûcherons, la profondeur oppressante de la forêt nocturne et l’appétit tout en démesure de l’ogre.
Une petite musique flotte au-dessus du plateau, résonne avec la matière acoustique de l’énigmatique cuisine des ogres et se fait entendre comme un écrin sonore pour la langue qui porte cette histoire et qui est d’une tonicité dont s’emparent les comédiens avec à l’évidence une extrême jouissance, celle de jouer la difformité, la monstruosité de ces parents défaillants, vus à travers la lorgnette déformante d’un enfant quand il se raconte des fables pour se faire peur. Dieudonné Kabongo avait créé en 2011 le rôle du père bûcheron, bourru et têtu, au Théâtre Varia à Bruxelles avec toute la prestance et l’humour qui le caractérisaient et ce fut sans doute un des derniers rôles de ce formidable comédien qui a brutalement disparu, il y a quelques mois. Lofti Yahya a repris le rôle avec une toute autre épaisseur et parvient magistralement à installer une tension et un mystère diffus qui vous donne la chair de poule, tandis que la pétillante Sophia Leboutte mastique les mots de Pliya avec délectation et nous fait vraiment entendre ce qu’oralité veut dire. Un petit bijou d’horlogerie théâtrale à ne pas manquer.

Actuellement en tournée :
Janvier-février 2012
– 12 au 12 janvier 2012 (3 représentations) à Arles, au [théâtre du pays d’Arles]
– 26 au 26 janvier 2012 (4 représentations) à Meylan, à [l’Hexagone-scène nationale]
– 1er au 3 février 2012 (5 représentations) à Malakoff, au [théâtre 71- scène nationale]

Avril 2012
– 16 au 16 avril 2012 (2 représentations) à Saintes, au [gallia-theatre.fr]

Mai 2012
– 15 mai 2012 (1 représentation) à Martigues, au [www.theatre-des-salins.fr]
– 22 au 22 mai 2012 (5 représentations) à Lyon, au [www.tng-lyon.fr]///Article N° : 10600

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© Pierre Niele
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